Trois personnes ont chuté de plus de trois mètres à proximité du rassemblement des salariés des établissements sanitaires et sociaux privés non lucratifs, organisé à Lyon à l'occasion d'un congrès de la Fehap. Les manifestants protestaient contre la dénonciation de la convention collective de 1951.
Un grave accident est survenu jeudi matin lors de la manifestation organisée en marge du 36e congrès de la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (Fehap), à Lyon (1). Trois salariées de la clinique mutualiste de Saint-Etienne, dont au moins deux infirmières, ont fait une chute de trois mètres. Aux alentours de 11h30, une grille d'aération métallique au sol a cédé sous leurs pieds, les précipitant dans une fosse. Deux d'entre elles, dont une infirmière, ont été hospitalisées -l'une à Lyon Sud, l'autre à Saint-Etienne. Leur état "n'inspire pas d'inquiétude", selon un communiqué de la secrétaire d'Etat à la Santé. En revanche, vendredi matin, le pronostic vital de la troisième personne, une infirmière responsable du syndicat CGT de la Clinique de la Mutualité de Saint-Etienne, était engagé. Victime d'un "traumatisme crânien sévère", elle a été opérée dans la nuit de jeudi à vendredi d'un œdème au cerveau, à l’hôpital neuro-cardiologique de Lyon. Vendredi après-midi, la secrétaire d'Etat Nora Berra s'est rendue au chevet de la première infirmière, hospitalisée à l’hôpital Lyon Sud, "pour lui témoigner sa sympathie et son soutien, et, plus généralement, exprimer son empathie aux personnels soignants, qui ont été très choqués par cet accident".
Les versions sur le déroulement des faits divergent. Selon le récit des syndicats, des tirs de gaz lacrymogènes des forces de l'ordre auraient provoqué un mouvement de foule et entraîné les manifestants vers ces grilles métalliques. Selon la préfecture du Rhône, « les blessures occasionnées aux personnes ne sont pas directement liées à une charge des forces de l'ordre ». Ces dernières ont dû faire usage des gaz lacrymogènes face à « une pression forte et agressive ». Les manifestants auraient tenté de pénétrer dans la Cité des congrès, où était réunie la Fehap. Trois femmes incommodées par les gaz se seraient rendues vers un point d'eau pour se laver les yeux. « A leur retour, elles sont passées sur une grille d'aération très éloignée du lieu de la manifestation, laquelle a cédé à leur passage et a entraîné leur chute dans une fosse de trois mètres de profondeur. » A vrai dire, la grille en question était située à quelques mètres seulement du rassemblement qui comptait 1500 personnes selon la police, 2000 selon les syndicats, toutes massées devant l'entrée de la Cité des congrès de Lyon, barrée par un imposant cordon de forces de l'ordre. Une expertise a été ordonnée pour déterminer les raisons pour lesquelles la grille a cédé sous le poids des trois personnes.
Discussions rompues
Cet accident n'a fait que renforcer la colère des salariés des établissements sanitaires et sociaux venus protester contre la dénonciation partielle de leur convention collective datant de 1951. « Ce sont tous les acquis qui sont remis en cause », s'insurgeait hier après-midi Bruna Duboille, secrétaire générale CGT de la santé et de l'action sociale du Rhône. Et d'énumérer : « La récupération des jours fériés, les primes de départ à la retraite, le paiement des heures supplémentaires... ». Etaient également présents les salariés des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées, qui craignent quant à eux de voir leur convention nationale 66 pareillement dénoncée.
La Fehap et les syndicats ont désormais jusqu'à fin 2012 pour s'entendre sur une nouvelle convention. Les syndicats la voudraient plus avantageuse que la précédente. La Fehap estime, elle, nécessaire de revoir à la baisse certains avantages afin d'assurer le bon fonctionnement des établissements. « Notre objectif est de dégager des marges de manœuvre pour les établissements, en particulier ceux qui sont en grande difficulté financière, sans toucher à la masse salariale », indiquait jeudi le directeur général de la Fehap, Yves-Jean Dupuis. « Quelques-uns sont au bord du dépôt de bilan. » Mais pour l'heure, les discussions sont rompues. La CFDT, notamment, expliquait jeudi ne pas vouloir « s'engager dans un énième cycle de discussions stériles avec [la] chambre patronale ».
Emotion
Jeudi en fin de journée, la Fehap - qui avait reçu plus tôt une délégation de salariés - a publié un communiqué suite à l'accident de la matinée. La Fédération et les congressistes ont souhaité « faire part de leur grande émotion et de leur peine devant ce terrible accident ». « Qu'ils arrêtent de casser leurs salariés », réclamait pour sa part Elisabeth Douaisi, infirmière à Nantes et secrétaire de la Fédération nationale Sud santé-sociaux. Ce mardi, la fédération CFDT Santé-Sociaux a réaffirmé dans un communiqué que «la colère doit pouvoir s’exprimer sans crainte de représailles disproportionnées».
Texte et photo: Sandra Jégu
1 – A la cité des congrès, le 6 octobre 2011.