Quatre ordres de professionnels de santé, français et québécois, ont conclu un accord de reconnaissance mutuelle. Un cinquième, celui des infirmiers, profite de l’élan en signant une lettre d’intention.
Faciliter la mobilité des professionnels de santé québécois souhaitant travailler en France et vice versa. C’est désormais chose faite avec la signature à Paris, vendredi, de quatre arrangements sur la reconnaissance mutuelle (ARM) des qualifications des médecins, sages-femmes, pharmaciens et chirurgiens-dentistes. Les représentants ordinaux de chacune de ces professions ont été invités à apposer leur signature sur un document officiel en présence du Premier ministre québécois, Jean Charest, et de Roselyne Bachelot.
Pour les infirmiers, pas avant 2010
Pas encore tout à fait prêtes pour le grand saut, les représentantes des ordres infirmiers français et québecois – Dominique Le Bœuf et Lise Racette – se sont contentées de signer une lettre d’engagement en préalable à un ARM qui devrait voir le jour au plus tard au 1er juillet 2010. Dominique Le Bœuf refuse toutefois de parler de retard dans la signature de l’ARM infirmier : « Nous sommes même très en avance. Nous avons en effet tout finalisé en moins de quatre mois ! Disons que nous avons su tirer parti de l’expérience des autres ordres…»
Interviewée au sortir de la cérémonie, son homologue québécoise s’est déclarée également « très satisfaite de la rapidité à laquelle nous sommes parvenus à cet accord. Nous ne sommes pas à la traîne : au vu de la création toute récente de l’ordre infirmier français, il aurait été difficile d’être plus efficaces » (1). Elle a même précisé que l’ARM aurait pu « quasiment être signé dès maintenant ! Tant pis, nous en profiterons pour nous revoir au cours d’une seconde cérémonie, au Québec cette fois, pour la signature. Probablement au cours de la première semaine de mai. »
Concernant les quatre ARM déjà signés, leur mise en œuvre effective – rendue possible par les dispositions de la loi HPST – et ses décrets d’application devraient intervenir au plus tard à la fin du premier semestre 2010. Mais d’ores et déjà, l’entente est présentée comme « une chance pour nos deux pays, pour valoriser l’excellence et l’expérience de nos professionnels de santé », s’est réjouie Roselyne Bachelot avant de désamorcer « la crainte de voir partir nos professionnel [qui] n’a pas lieu d’être. Nos pays proposent le même niveau de vie, les flux sont prévisibles et nous nous attendons à ce qu’ils soient équilibrés » (2).
Pas d’équivalence des diplômes
Ces ARM s’inscrivent dans le prolongement de la signature, le 17 octobre 2007 à Québec, de l’Entente mutuelle des qualifications professionnelles, entre Nicolas Sarkozy et Jean Charest. Ces accords ne se limitent en effet aucunement au secteur de la santé : architectes, maçons et avocats en ont déjà signé un. À terme, cela devrait concerner près d’une centaine de métiers réglementés (3), et la santé fait partie des vingt-deux établis en priorité. Attention, l’Entente est basée sur la reconnaissance des qualifications et non sur l’équivalence des diplômes. « En cas de différences substantielles, l’expérience professionnelle sera prise en compte et, si nécessaire, des stages de mise à niveau ou d’adaptation, ainsi que des formations d’appoint, sont prévus », a tenu à souligner Roselyne Bachelot.
Le Premier ministre Jean Charest s’est dit lui aussi ravi de ce « pas de plus dans la création d’un nouvel espace économique » avant de rappeler que France et Québec « doivent tous deux faire face à de grands défis dans tout ce qui a trait aux services de santé publics. La signature de ces ARM est une première mondiale qui nous permet d’entrevoir l’avenir avec optimisme. ». À une dernière question émanant de la presse québécoise, déviant sur l’épidémie de grippe A(H1N1) vécue dans nos deux pays, Roselyne Bachelot s’est dite « très attentive à l’évolution du virus au Québec. Et nous saluons le succès de votre campagne de vaccination auprès de la population. » Mais la comparaison s’arrêtera avec la remarque amusée de Jean Charest : « Votre ministre est vaccinée. Pas moi. »
Candice Moors
Photo : Dominique Le Bœuf paraphe la lettre d'engagement, en vue d'un accord qui devrait prendre effet au plus tard au 1er juillet prochain. De gauche à droite, au second plan, Lise Racette (vice-présidente de l'ordre québécois), Jean Charest et Roselyne Bachelot. © C. M.
1- L’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ), qui existe sous cette appellation depuis 1974, n’avait pas pu signer de lettre d’engagement mutuel au printemps car la France n’était pas encore en mesure de désigner un représentant signataire.
2- D’après nos premières recherches, chaque année, plus d’une centaine d’infirmières françaises demanderaient une équivalence à l’OIIQ. Côté français, seulement quatre infirmières diplômées du Québec auraient déclaré un employeur en France au tableau 2008-2009 de l’OIIQ.
3- Liste actualisée des professions qui ont signé leur ARM sur le site du consulat de France au Québec: ici.