En amont de la Journée mondiale de lutte contre les mutilations sexuelles féminines, ce mercredi 6 février, un colloque a permis d’évoquer le rôle des infirmières scolaires en matière de prévention et de signalement.
La pratique est en recul. De l’avis des spécialistes réunis lundi 4 février à l’université de Créteil pour une journée de réflexion sur la prévention des mutilations, organisée par la délégation aux droits des femmes et à l'égalité d'Ile-de-France, le nombre de femmes excisées en France a chuté depuis les années 1980. Près de 53 000 adultes seraient aujourd’hui concernées dans l’Hexagone. Selon l’enquête ExH, présentée par la chercheuse Armelle Andro, 11 % d’entres elles perpétuent cette tradition.
Idées reçues
« Les efforts fournis en protection maternelle et infantile ont porté leurs fruits pour protéger les fillettes de moins de six ans. Mais, une fois scolarisées et surtout à l’adolescence, nous sommes démunis », prévient Christine Beynis, présidente du Groupe pour l'abolition des mutilations sexuelles féminines (Gams), qui craint un manque d’information des infirmières. En témoigne Fernanda, l’une des participantes au colloque. « Pour ma part, depuis que je travaille dans l’Éducation nationale, je n’ai jamais assisté à des réunions sur ce sujet », admet cette IDE d’un collège de la région parisienne. Si, comme l’a rappelé Agnès Huleux, responsable de l’action sociale des élèves du Val-de-Marne (94), « les établissements scolaires disposent d’assistants sociaux, infirmières et médecins pour mener des actions de prévention », sur le terrain, la spécificité de l’excision semble difficile à appréhender pour les professionnels. A fortiori lorsque le personnel soignant doit se partager entre plusieurs établissements.
Dans un tel contexte, trouver les mots justes et savoir repérer les situations à risque s’avèrent complexes. Les populations qui pratiquent l’excision de façon traditionnelle ne proviennent, en effet, pas toutes de la même région du globe. « Cela se retrouve surtout en Afrique subsaharienne, mais c’est variable en fonction des communautés d’origine, insiste Aurélie Latourès, chargée de mission à la délégation aux droits des femmes et à l'égalité d'Ile-de-France. Les Wolofs (1) ne sont pas concernés, par exemple. En revanche, cela se voit en Egypte, dans certaines communautés du sous-continent indien ou chez les Kurdes de Turquie. »
Vacances à risques
Il ne s’agit pas de suspecter systématiquement les familles issues de ces régions, mais la vigilance reste de mise. « En particulier lorsque toute la famille part en vacances dans le pays d’origine », martèle Malika Amellou, gynécologue responsable d’un service de la protection maternelle et de la planification familiale et de la périnatalité à Paris, avant de suggérer d’effectuer un signalement si nécessaire : « Si les parents sont d’accord pour ne pas exciser leurs filles, ils sont parfois soumis aux pressions communautaires. Un rappel à la loi peut les aider à résister. » D’autant que la peine encourue peut aller jusqu’à 10 ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende.
Texte et photo: Marjolaine Dihl
1- Une ethnie notamment présente au Sénégal.