06/08/2008

Financement de l’assurance maladie : un rapport Igas-IGF suggère de taxer les aliments gras, sucrés, salés pour lutter contre l’obésité

Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et de l’Inspection générale des finances (IGF) préconise de taxer certains aliments qui contribuent au surpoids et à l’obésité, pour lutter contre leurs effets nocifs sur la santé et, surtout, pour tenter de redresser les comptes de l’assurance-maladie.

Remis fin juillet aux ministres du Budget Eric Woerth et de la Santé Roselyne Bachelot, ce rapport n’est pas encore public, mais le quotidien économique « Les Echos » s’en est procuré copie.

Outre l’impératif gouvernemental de réduire le déficit de l’assurance maladie pour un retour à l’équilibre des comptes à l’horizon 2011, les rapporteurs justifient le principe d’une nouvelle taxe par le développement de pathologies liées au surpoids et à l’obésité, telles que l’hypertension, le diabète, mais aussi certaines formes de cancers, directement lié à « l’excès de la consommation de graisses, de sucres rapides et de sel, mais aussi d’alcool ».

Or, préviennent les auteurs du rapport, « si les déséquilibres alimentaires encore constatés aujourd’hui devaient perdurer, il est peu douteux que la prévalence des troubles et pathologies chroniques augmentera (…) et rendra peu soutenable l’avenir du financement de la protection sociale ». D’où l’idée d’une taxe, dont personne ne peut préjuger de l’efficacité nutritionnelle, reconnaissent cependant l’Igas et l’IGF.

C’est pourquoi « il convient clairement de présenter cette action fiscale comme une mesure de financement de l’assurance maladie, produisant par ailleurs un effet de signal à l’égard des consommateurs et des industries agroalimentaires», expliquent-ils.

Trois dispositifs fiscaux sont évoqués : la hausse des droits d’accises sur les boissons sucrées via une taxe spécifique, le relèvement du taux de TVA de 5,5% actuellement à 19,6% sur les aliments « trop gras, trop sucrés, trop salés qui ne sont pas de stricte nécessité » et enfin la hausse de la TVA sur les produits de grignotage, sandwiches, pizzas, hamburgers, etc.

Un premier conflit d’intérêts risque de se faire jour avec les alcooliers dans la mesure où l’Igas et l’IGF observent qu’il « ne serait guère cohérent de taxer davantage les boissons sucrées (…) tout en continuant de laisser inchangée la fiscalité applicable aux boissons alcoolisés, y compris les vins ». La revalorisation des droits d’accises pesant sur l’alcool est « fondée non seulement en raison des coûts sociaux de celui-ci », argumentent-ils, « mais aussi de ses effets sur certains cancers, trois fois plus importants que ceux des autres produits alimentaires ».

Mais le problème le plus évident pour le gouvernement va être de faire accepter l’idée de nouvelles taxes à une population déjà éprouvée par un pouvoir d’achat en berne, plombé par une forte inflation générale et une augmentation tendancielle des prix des carburants. D’autant que les populations qui se nourrissent le moins bien sont souvent les plus défavorisées. Ce sont elles qui risquent d’être le plus fortement pénalisées par ces taxes.

D’ailleurs, selon une source gouvernementale citée par « Les Echos », « ces taxes nutritionnelles ne seront pas proposées par l’exécutif lors des textes budgétaires de l’automne ». Le gouvernement escompte une baisse de l’inflation, notamment dans le secteur alimentaire.

L’idée d’un rapport sur « la pertinence et la faisabilité d’une taxe nutritionnelle » remonte à l’année dernière. Lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2008, les sénateurs avaient voté la création d’une taxe de 1% sur les boissons sucrées hors eaux minérales aromatisées et jus de fruits, censée rapporter plus de 500 millions d’euros par an. Mais la proposition avait ensuite été rejetée en commission mixte paritaire.

A l’époque, le ministre du Budget Eric Woerth faisait partie des opposants à la taxe au motif, notamment, qu’il serait dès lors « difficile de ne pas évoquer les boissons alcoolisées » dont la fiscalité n’a pas évolué depuis plus de 25 ans. « Je me propose de vous remettre à la fin du premier semestre 2008, en liaison avec la ministre de la Santé, un rapport sur le coût sanitaire des aliments trop gras, trop salés, trop sucrés et d’étudier les modalités d’une telle taxe », avait cependant suggéré M. Woerth.

Le rapport remis fin juillet à M. Woerth et Mme Bachelot cite quelques chiffres alarmants sur le surpoids et l’obésité qui concerneraient plus de quatre personnes sur 10 (41,6%) en France. Le nombre de personnes obèses aurait ainsi augmenté de 2,3 millions en 10 ans, entre 1997 et 2006 pour s’établir à 5,9 millions d’individus. Parallèlement, le nombre de patients traités pour diabète a crû de 25% en cinq ans. Plus de 10 millions de personnes souffrent d’hypertension contre 8,6 millions il y a cinq ans.

C. A. (avec APM)

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