Les eurodéputés de la commission du marché intérieur ont adopté un texte entérinant un système de formation en soins infirmiers à deux niveaux au sein de l'Union. Mais, pour être reconnue, la formation devra remplir un certain nombre de critères.
La bataille parlementaire engagée depuis plusieurs mois autour des conditions d'accès aux formations en soins infirmiers au sein de l'Union européenne est en passe d'aboutir à un compromis faisant office de pis aller.
Dans le cadre de la révision de la directive sur la reconnaissance des qualifications professionnelles, qui permet aux soignantes de librement circuler et travailler au sein des états membres de l'Union, la Commission européenne a proposé de relever le minimum requis avant l'entrée en formation de 10 à 12 années d'enseignement général validées -soit un niveau baccalauréat. Une norme déjà en vigueur dans une majorité d'états membres. Outre l'harmonisation des formations européennes, le relèvement du seuil vise à garantir la sécurité des soins, alors que de plus en plus de responsabilités sont confiées aux infirmières.
Opposition allemande
La proposition a suscité une levée de boucliers des eurodéputés allemands, néerlandais et belges, soucieux de préserver leur système de formation, où l'on peut accéder, avec un niveau seconde, à une formation d'infirmière « technicienne ». Lors de l'examen du texte dans les différentes commissions du Parlement européen appelées à se prononcer (1), plusieurs amendements ont été déposés pour ramener le pré-requis à 10 années d'enseignement général. Un recul dénoncé par plusieurs organisations professionnelles européennes et françaises.
Mercredi 23 janvier, la commission marché intérieur et protection des consommateurs (IMCO) a finalement abouti à un compromis : si 12 années d'enseignement général validées sont requises pour accéder à une formation universitaire en soins infirmiers, 10 ans suffisent pour intégrer une « école professionnelle ». Le texte entérine, ainsi, l'existence d'un système de formation à deux niveaux au sein de l'Union européenne.
Garde-fous
Néanmoins, la commission IMCO impose des garde-fous : pour être reconnue par les états membres, la formation en soins infirmiers doit durer au minimum trois ans, et se composer de 4600 heures d'enseignement théorique et clinique. Le texte énumère un certain nombre de compétences que doit acquérir une infirmière au cours de sa formation : coordination, éducation thérapeutique, autonomie de diagnostic... En clair, les pays où l'on peut accéder à une formation technique en soins infirmiers à la fin de la seconde préserveraient leur système de formation ; mais, les infirmières « techniciennes » formées dans ces pays ne pourraient pas travailler dans les autres états membres, à moins de se remettre à niveau.
Une « avancée faite de petites subtilités » dont se réjouit la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers. « Les amendements ramenant à dix ans sont supprimés et la mention des douze ans vient souligner le fait qu'il faut avancer », expose Karina Durand, vice-présidente en charge de l'international. « Ce compromis nous préserve de mobilités catastrophiques et protège nos systèmes de soins. » Le texte sera étudié au printemps par la présidence irlandaise du Conseil européen, avant d'être soumis au vote du Parlement, réuni en séance plénière, en juin. D'ici là, « il faut qu'on reste vigilant », prévient Karina Durand.
Aveline Marques
(1) Quatre commissions du Parlement européen ont été appelées à se prononcer sur la proposition de directive. Les commissions environnement, santé publique et sécurité alimentaire (ENVI), culture et éducation (CULT) et emploi et affaires sociales (EMPL) ont donné leur avis mais c'est la commission marché intérieur et protection des consommateurs (IMCO), « commission au fond », qui a le dernier mot.