Les conditions d’accès aux formations en soins infirmiers dans l’Union européenne sont en cours de révision. Les associations d’enseignants et d’étudiants redoutent une formation à deux niveaux.
Article paru dans L'Infirmière Magazine daté du 15 décembre.
Initiée par le processus de Bologne, en 1999, et la création du cursus licence-master-doctorat, l’harmonisation des formations en soins infirmiers est à nouveau débattue par les instances de l’Union européenne (UE). Reconnaissant l’évolution de la profession au cours des trente dernières années et le nombre croissant de responsabilités des soignantes, la Commission européenne a proposé, dans le cadre de la révision de la directive sur la reconnaissance des qualifications professionnelles, de relever le nombre d’années d’enseignement général suivies par les candidats à l’admission de dix à douze, l’équivalent du baccalauréat français.
Une disposition que la commission ENVI (1) du Parlement européen a retoquée. Motif : le renforcement des conditions d’accès instaurerait de « nouvelles barrières artificielles » à la mobilité des professionnelles au sein de l’UE et irait « à l’encontre de l’objectif consistant à lutter contre le risque de pénurie de personnel qualifié », rapporte la députée européenne Anja Weisgerber.
« Retour en arrière »
Surtout, insiste la parlementaire allemande, il se heurterait aux différences entre les systèmes scolaires européens. En Allemagne, le niveau seconde suffit pour accéder à une formation d’infirmière technicienne, comparable à celle des aides-soignantes françaises. La grande majorité des députés de la commission ENVI, dont les Français, se sont rangés à l’avis des Allemands et ont voté un amendement ramenant à dix le nombre d’années d’enseignement général. Les états membres restent libres de relever ce seuil.
Pour les associations européennes d’enseignants et d’étudiants en soins infirmiers, entériner un système de formation à deux niveaux – infirmière technicienne et théoricienne – est un « retour en arrière » (2), allant à l’encontre de la reconnaissance d’une filière académique pour les infirmières. « Plus le niveau de formation est élevé, plus la sécurité des soins est élevée » insiste Jane-Laure Danan, trésorière de la Fédération européenne des enseignants en soins infirmiers. « La directive risque de tirer les choses vers le bas », ajoute-t-elle. Suivant l’exemple de l’Allemagne, des pays de l’Est seraient, selon elle, tentés de créer un niveau de formation inférieur pour les infirmières. « La directive est essentielle pour la mobilité des professionnels de santé. Quelle lisibilité auront ces diplômes ? »
Le Parlement européen, en séance plénière, examinera le texte en mars. Aux infirmières européennes de convaincre les députés d’ici là.
Aveline Marques
1- Environnement, santé publique et sécurité alimentaire.
2- Communiqué conjoint du Comité d’entente infirmières et cadres (Cefiec) et de la Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (Fnesi).