Geneviève Perennou, « Face à un patient âgé, l’hypnose peut se révéler très utile »

C’est une longue histoire. J’avais déjà publié à titre personnel plusieurs ouvrages sur l’hypnose, dont un en lien avec l’hypnose des personnes âgées, qui est déjà utilisé dans les Ehpad. Puis lors d’un congrès, j’ai rencontré Serge Sirvain, gériatre et nous avons souhaité produire un livre qui se veut un outil pédagogique, une bible pour aller chercher des outils qui soient utiles aux soignants. La gériatrie est le parent pauvre du soin en France, il nous paraissait important d’aborder l’hypnose pour cette catégorie de patients.

Il était important de refléter la pluridisciplinarité de l’univers gériatrique. Ce qui s’est révélé assez drôle, c’est que les différentes contributions que nous avons reçues débordaient de la mission initialement demandée et pouvaient donc s’inscrire dans un autre chapitre, ce qui montre bien la transversalité des sujets. Nous avons des contributeurs aux profils très variés : un anesthésiste gériatre, un neurologue chef d’orchestre et même un vétérinaire : ce dernier nous a apporté son regard sur la médiation animale mais aussi sur le rôle de l’animal dans l’induction d’un état de conscience modifié. Tous ces profils nous ont permis de couvrir un champ très large de la pratique en gériatrie.

Les soignants courent beaucoup pour l’acte technique, mais oublient le temps du prendre du soin. C’est vrai que cela requiert du temps, mais il serait faux de penser que mettre en place l’hypnose auprès des personnes âgées prend plus de temps. Au contraire ! La phase d’apprentissage prend un peu de temps, comme toutes les phases où l’on apprend, mais une fois la technique acquise, elle est intégrée et fait partie du soin, elle devient un geste pratique et ne prend pas plus de temps. Elle permet même d’en faire gagner. Quand on approche un patient âgé atteint de troubles cognitifs et qu’on n’arrive pas à entrer en relation avec lui, par exemple, pour lui faire la toilette, l’hypnose peut se révéler très utile pour y parvenir : en utilisant des métaphores autour de l’eau, comme vagues, bruine chaude, ruisseau, on peut réussir à entrer en contact et réaliser la toilette, sans heurts, sans difficulté. C’est un outil vraiment intéressant !

L’important est de travailler dans son champ de compétences : si on ne maîtrise pas l’hypnose, on ne la pratique pas, c’est juste un outil supplémentaire. Quant à la position de l’Ordre infirmier²…. il suffit de voir ce qui se passe dans les pays anglo-saxons, où ça avance énormément sur le sujet. L’hypnose est une pratique non-conventionnelle ? Il faut aller observer sur le terrain, voir comment cela se passe, explorer auprès des organismes de formation. L’hypnose a toujours existé : certes, il y a eu Charcot et des pratiques pas respectueuses des patients, qu’on ne peut pas cautionner, tout comme l’hypnose spectacle à laquelle les gens pensent quand on évoque le mot hypnose. Mais l’hypnose est bien plus que cela, c’est vraiment un outil pour le confort du patient, pour limiter la douleur. Et pour bien l’appréhender, il faut se former, auprès d’un organisme référencé par le CFHTB qui a déjà formé d’autres professionnels de santé.

Propos recueillis par Anne-Lise Favier

1. Hypnose médicale de la personne âgée pour les professionnels de santé en 43 notions, aux éditions Dunod. Collection Aide-Mémoire, 468 pages.

2. En décembre 2023, l’Ordre infirmier a publié sa position sur certaines pratiques non-conventionnelles, parmi lesquelles l’hypnose, concluant qu’elle « souffre essentiellement de son manque de reproductibilité, et ses bénéfices cliniques demeurent faibles ou incertains ».