« Il faut changer de regard sur les personnes atteintes de troubles psychiques »

Le but est de mixer les publics et de mettre dans un même événement des usagers, des professionnels de santé, des associations, des institutionnels qui peuvent tous parler de santé mentale. Nous organisons le festival en collaboration avec l’Unafam et avec le soutien de l’Agence Régionale de Santé (ARS) Paca, la Région Sud, la Fondation de France, l’Agefiph et Klesia. Il y aura des conférences avec des scientifiques, des ateliers et des stands, et surtout une dimension festive avec des DJ et des performances de stand-up. Nous voulons montrer que l’on peut parler de santé mentale dans un cadre festif et aussi que l’on peut regarder ce sujet avec moins de noirceur. On veut initier une dynamique de changement en créant un autre monde où l’on s’écoute et se respecte. Chacun vient tel qu’il est avec sa différence. La santé mentale touche beaucoup de personnes. Aujourd’hui, les générations changent, le monde change, il faut donc vraiment changer de regard dans la société sur les personnes qui ont des troubles psychiques.

J’ai toujours aimé fédérer les gens et je voulais créer quelque chose sur la prise en compte et l’accompagnement de la santé mentale. Nous avons démarré avec France Médiation puis ESPER Pro a vu le jour dans le but de faire reconnaitre le savoir expérientiel aux pouvoirs publics. Au même moment, en 2012, j’ai été un des dix médiateurs de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur lors du lancement du programme pilote sur une formation à la médiation en santé mentale et à la valorisation du savoir expérientiel d’usagers des services de santé mentale. Ce programme s’est déployé dans les Hauts-de-France (ex Nord-Pas-de-Calais), en Ile-de-France et en Provence-Alpes-Côte d’Azur. C’était vraiment le début de la pair-aidance professionnelle en santé mentale en France. Au départ de cette aventure, nous étions deux, maintenant ESPER Pro compte vingt-deux salariés dont vingt ont été recrutés car ils ont un savoir expérientiel. Nous participons à l’évolution des représentations sociales de la maladie mentale grâce à des actions de sensibilisation auprès des acteurs du système de santé mais aussi auprès de tous les citoyens. Le festival Relève en est un bel exemple. Nous nous appuyons sur le concept de rétablissement en santé mentale qui repose sur cinq principes fondamentaux qui tout au long du parcours de santé servent de point de repères : l’Espoir, le Soutien, le Plaidoyer pour soi-même, l’Empowerment (sa capacité d’agir) et la Responsabilisation. Le rétablissement est un croisement de savoirs autour duquel tout le monde peut se retrouver.

En effet, depuis décembre 2019, nous avons un financement de l’Agence régionale de santé (ARS) de la région PACA pour la création de la plateforme régionale de pairs ressources en santé mentale (PRPR). C’est un maillon essentiel du dispositif de santé mentale sur notre territoire et nous nous appuyons sur les établissements (Valvert, AP-HM, Centre hospitalier Henri Guérin à Pierrefeu-du-Var, Centre hospitalier Montperrin à Aix-en-Provence…) de la Région. La pair-aidance est un métier, et il faut donc construire le savoir expérientiel qui constitue le socle de la pratique. En fait, nous sommes là où il y avait un manque. Notre activité socle consiste à proposer un accompagnement tout public individuel ou en groupe, au téléphone ou en visioconférence, sans critère de gravité. Nous aidons aussi à la professionnalisation en contribuant à la formation des pair-aidants. Nous avons également un volet santé communautaire dans lequel s’intègre le festival Relève. Et nous développons les formations (le rétablissement en santé mentale, la pratique de la méthode IPS-Individual Placement and Support, l’intégration des médiateurs en santé mentale, les formations premiers secours en santé mentale), pour les bénévoles de l’association, les usagers et les professionnels en dehors de l’association. Et enfin, nous disposons d’un volet prestation de service afin de déployer et d’essaimer les pairs-aidants sur le territoire. Le but est d’implanter des médiateurs dans chaque département et qu’ils soient soutenus par une structure. Le médiateur à une compétence et une vision de l’accompagnement différente des autres professionnels, ainsi que des représentations sociales et du monde. Son apport est essentiel.

Propos recueillis par Isabel Soubelet