© Chafia Kaoulal
À quelques jours du premier tour des élections législatives, Espaceinfirmier.fr tend le micro à ces soignants qui se verraient bien au Palais-Bourbon. Aujourd’hui, rencontre avec Chafia Kaoulal, Ibode reconvertie dans l’industrie, et candidate LR dans le Doubs.
J’ai commencé en bas de l’échelle, en faisant des ménages, puis j’ai économisé pour me payer mes études d’infirmière à Vesoul. J’ai travaillé à la polyclinique de Franche-Comté à Besançon, et au bout de deux ans j’ai fait ma spécialité Ibode. Après vingt ans d’ancienneté au bloc, j’ai eu envie de changer, et depuis sept ans je réalise du support clinique pour un laboratoire qui fait des endoprothèses aortiques : on étudie la faisabilité des dossiers avant chirurgie, on fournit le matériel et on est présents lors des opérations.
Et comment est né votre engagement politique ?Cela fait quelques années que je trouve que la France va mal, qu’elle est blessée, lésée, pour parler en infirmière. Elle est dépouillée de son savoir-faire, les gens sont divisés, les incivilités sont grandissantes, il y a un manque d’autorité… et je me suis toujours dit que je m’engagerais un jour. En 2017, je m’étais intéressée à Ludovic Fagaut, qui était candidat LR aux législative à Besançon. En 2020, il m’a recontactée pour être sur sa liste aux municipales, et cela m’a plu, même si je n’ai pas été élue. Puis, cette année, je me suis proposée pour être candidate aux législatives, cela a du sens pour moi : je suis issue de l’immigration, j’ai eu la possibilité de grandir dans un pays qui donne accès à l’éducation, à la santé, qui offre à chacun la possibilité de s’exprimer, j’ai beaucoup reçu et maintenant, c’est à moi de rendre.
Si vous êtes élue, que comptez-vous faire pour la santé ?Cela fait des années que la santé est maltraitée, et cela a été exacerbé pendant la crise sanitaire : quand j’ai vu que certaines de mes collègues devaient s’habiller avec des sacs poubelles pour se protéger du virus, j’ai trouvé cela absolument effarant. Je pense que l’un des problèmes est que la France compte parmi les pays qui dépensent le plus pour leur administration, à l’hôpital comme ailleurs. Il y a des chefs, des chefs de chefs, des sous-chefs, une hiérarchie énorme, et il me semble essentiel de faire dégonfler cette bureaucratie pour faire des économies et embaucher, par exemple, des infirmières.
Mais où trouver ces infirmières, alors qu’il y a des postes vacants à l’hôpital ?Il n’est pas surprenant de voir qu’il y a des postes vacants : les infirmières travaillent dans des conditions infernales, n’ont pas les moyens d’exercer correctement, et on les paie mal. Si on permettait aux gens de travailler dans de bonnes conditions et qu’on les payait de manière satisfaisante, on trouverait des candidats.
Que pensez-vous de l’idée de confier davantage de responsabilités aux infirmières, qui est une revendication de nombreux représentants de la profession ?Je pense que c’est une bonne chose, c’est important de donner des possibilités d’évolution, pour les infirmières « standard » comme pour les infirmières spécialisées, d’ailleurs.
Comment vivez-vous cette campagne ?J’adore, c’est très enrichissant humainement et intellectuellement. Il y a beaucoup de contact, et dès que je ne travaille pas, le soir ou le week-end, je pars faire le tour de la circonscription, je fais du porte-à-porte, je tente de discuter avec un maximum de personnes. Et tout ce que je vois me permet de mieux comprendre les problèmes rencontrés par les gens, qu’il s’agisse du pouvoir d’achat, de l’insécurité, des éoliennes…
Si vous êtes élue, conserverez-vous une activité de soins ?Je me suis juré que si je devais être élue députée, je resterais connectée, probablement en faisant des missions d’intérim. Il me semble important de garder un pied dans le réel, de continuer à prendre la température de ce qui se passe dans le pays.
Propos recueillis par Adrien Renaud
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Renaud A., « Infirmières et législatives : “Sortir du médicocentrisme” », Espaceinfirmier.fr, le 08/06/2022.