La psychiatrie fera partie des invités d’honneur du Salon infirmier, qui ouvre ses portes ce mercredi. L'EPS Maison Blanche (Paris) présentera la mise en place d’un programme d’éducation thérapeutique permettant de diminuer les hospitalisations. Cécile Bourseiller, faisant fonction de cadre de santé, et Fathia Kalloubi, infirmière, racontent leur expérience.
L’Infirmière Magazine : Le programme d’éducation thérapeutique que vous avez contribué à mettre en place est-il une nouveauté dans votre établissement ?
Cécile Bourseiller : Ce programme n’est pas nouveau puisque c’est le troisième du genre élaboré à Maison Blanche. Cependant, les deux autres n’ont été mis en place que dans un centre médico-
psychologique (CMP), tandis que le nôtre prend en charge des patients du CMP et en hospitalisation. Cette spécificité nous semble importante, car cela permet une continuité dans le suivi des patients ayant adhéré à ce programme, qu’ils soient en crise, donc hospitalisés, ou bien stabilisés, donc suivis en CMP.
L’I. M. : Comment avez-vous eu l’idée de proposer ce programme ?
C. B. : Ce projet est né de la demande de soignants qui, devant certains constats, ont voulu essayer de faire évoluer les choses. L’analyse de la file active de notre secteur a montré qu’elle est majoritairement constituée de patients schizophrènes et psychotiques ; celle des modes et durées d’hospitalisation a fait ressortir le fait que de très fréquentes réhospitalisations avaient lieu peu de temps après la sortie des patients. Nous avons aussi cherché à étudier les besoins de ces patients face à leur maladie. Toutes ces données ont démontré l’intérêt d’un programme d’éducation thérapeutique. Une formation suivie par deux agents à l’université technologique de Compiègne (UTC) a donné les moyens d’élaborer les bons outils (diagrammes radar, analyse de questionnaires…). Différents ateliers existaient déjà avant, mais ils ne faisaient pas partie d’un programme coordonné par des soignants, et n’étaient pas non plus évalués. Parmi eux, citons l’éducation au pilulier, les groupes de parole, l’éducation à l’hygiène… Une autre formation, suivie par quatre de nos agents, a permis de concevoir et de modéliser un programme d’éducation thérapeutique global à partir de ces ateliers.
L’I. M. : Quels constats et conclusions en avez-vous tirés ?
Fathia Kalloubi : Pour chaque patient intéressé par le programme, un diagnostic éducationnel spécifique est mené au préalable. L’évaluation nous a permis de constater une meilleure adhésion aux soins qu’avant la mise en place du programme d’éducation thérapeutique. Le patient n’est plus opposé aux soins, comme c’était souvent le cas avant ; sa perception globale des soins et des soignants a changé positivement. Il prend plus facilement son traitement et communique davantage sur son ressenti positif et négatif de la maladie. On retrouve beaucoup moins de traitements recrachés ou dissimulés qu’auparavant… Il y a donc nettement moins de situations de rupture de soins. Nos objectifs, qui étaient de réduire le plus possible la fréquence et la durée des périodes d’hospitalisation des patients en crise, de les rendre le plus autonomes possible afin de pouvoir instaurer un suivi stable en ambulatoire, sont atteints !
L’I. M. : Comment les patients et les différents soignants ont-ils perçu ce programme ?
F. K. : Positivement ! Beaucoup de patients sont demandeurs, c’est un signe plus que positif ! Et puis, ils reviennent régulièrement aux ateliers, ils sont ponctuels, voire en avance. Ils sont capables de mieux se gérer et savent demander à être hospitalisés quand ils se retrouvent en crise. Ce programme permet une véritable prise de conscience de leur maladie, dont ils deviennent acteurs. D’ailleurs, ils se posent comme des « ambassadeurs » de notre programme, et participent à l’éducation thérapeutique de leurs pairs.
Propos recueillis par Carole Ivaldi
Mise en place d'un programme d'éducation thérapeutique en psychiatrie, mercredi 16 octobre, 15h45-16h45, salle Vega B, Pavillon 7/3, Porte de Versailles, Paris. Le programme des conférences du Salon infirmier.
Article paru dans L'Infirmière magazine n°331, daté du 15 octobre.