Maxime Dubois
Infirmière depuis six ans au sein du service d’oncologie du CHU de Besançon, Laure Wagner-Gaudin, 29 ans, propose depuis le mois d’avril aux patients atteints d’un cancer, de l’activité physique adaptée (APA) en boxe anglaise. Un dispositif qui permet d’agir sur leur condition physique et psychologique. Explications.
En quoi consiste les séances de boxe adaptée pour les patients en cancérologie ?
Les séances de boxe adaptée sont proposées aux patients en oncologie et en hématologie, uniquement sur prescription de leur médecin. J’organise deux sessions collectives par semaine, d’une heure chacune, au sein de la Maison des familles du CHU. Lors de la séance, les exercices sont les mêmes pour les six patients. En revanche, les objectifs à atteindre en termes d’intensité, de force, de vitesse, sont personnalisés en fonction des capacités de chacun.
La boxe est un sport particulièrement intéressant pour les patients en cancérologie, car lorsqu’on est atteint d’une maladie, les muscles fondent, le moral peut être en berne et on peut se sentir souvent fatigué. Ce sport apporte des bénéfices physiques, affectifs, émotionnels, sensoriels et cognitifs. Lors des séances, nous travaillons la coordination ainsi que le travail du haut et du bas du corps. Nous sommes en permanence en tension sur nos jambes. La sangle abdominale et les dorsaux sont mobilisés, tout comme les trapèzes, les épaules, les biceps et les triceps. D’un point de vue psychologique, je trouve que ces séances permettent une reprise de la confiance en soi. Je souhaite que les patients se sentent forts et puissants et je mets tout en œuvre pour qu’ils y parviennent. Cette activité est aussi une bonne manière de lâcher les émotions.
Les bénéficiaires viennent aux séances, gratuites, aussi longtemps qu’ils le souhaitent, elles ne sont pas limitées dans le temps. Elles s’adressent aussi bien aux patients en cours de traitement ou post-traitement. C’est important car à l’issue d’un traitement, le patient n’a pas nécessairement la force, ni la capacité de retourner dans une salle de sport « standard », au contact de personnes très actives. Cependant, étant coach de boxe bénévole dans un club de sport, j’aimerais, à terme, organiser ce retour, en tenant compte de l’accompagnement psychologique que cela implique.
Comment est née cette idée de proposer de la boxe adaptée ?
Le projet s’est mis en place progressivement. En oncologie, nous prenons en charge des patients en soins continus et en soins palliatifs. Et j’ai remarqué que ma pratique de la boxe, depuis plus de 15 ans, m’aide à gérer toute la souffrance que nous recevons quotidiennement en tant que soignant. Ce sport me sert notamment de soupape de décompression et m’aide à évacuer. Il m’a aussi permis de gagner confiance en moi au fur et à mesure des années. Aujourd’hui, je suis davantage ″posée″, je prends les situations plus calmement, aussi parce que je sais qu’avec la boxe, je vais pouvoir lâcher mes émotions. En constatant ces effets avantageux sur moi qui suis en bonne santé et qui n’ai à traverser que des tracas de la vie quotidienne, je me suis toujours dit que pour les personnes confrontées à la maladie et à la mort, la boxe pourrait être particulièrement bénéfique. En revanche, je me suis longtemps interrogée sur la façon de procéder pour pouvoir leur proposer.
Comment s’est concrétisé le projet ?Ce sont plusieurs de mes diplômes qui m’ont permis de parvenir à le mettre en place. J’ai obtenu mon diplôme de coach sportif, à savoir un Brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport (BPGEPS) mention boxe. En parallèle, j’ai aussi obtenu en 2021 du CHU, le financement d’un Diplôme universitaire (DU) d’activité physique adaptée nutrition et cancer, dispensé par l’UFR STAPS et l’UFR Santé associés à l’Institut régional fédératif du cancer (IFRC) de Franche-Comté. Pendant mon DU, un oncologue m’a apporté un réel soutien à mon projet, tout comme l’IRFC, qui finance l’accès aux soins de supports dont l’APA. L’IRFC travaille avec de nombreuses associations et j’ai été mise en relation avec le président d’OncoDoubs, également intéressé par mon projet. Cependant, j'ai dû convaincre pour obtenir des financements. Pour me donner les chances de réussir, fin 2022, j’ai demandé au CHU de pouvoir exercer à 75 %. J’ai ainsi pu créer RIPOSTE, mon auto-entreprise, qui porte l’activité de boxe adaptée. Le CHU a soutenu mon projet en acceptant ma diminution de temps de travail et mon cumul d’activité.
Aujourd’hui les séances sont remplies, deux autres devraient ouvrir prochainement, toujours financées par OncoDoubs.