Les nouvelles agences régionales de santé (ARS), créées le 1er avril dernier, rassemblent de nombreux pouvoirs. Mais que comptent-elles en faire exactement ? Marie-Sophie Desaulle, directrice de l’ARS des Pays de la Loire, nous répond.
Quels sont les grands axes à développer dans votre région en matière d’offre de soins ?
La première chose que l’on a faite a été de prendre la mesure des besoins de la population. Pour ce qui est de l’espérance de vie sans incapacité, la région est très bien placée, dans les premières de France. La « mortalité évitable », c’est-à-dire qui survient avant 65 ans, est dans la moyenne nationale. En revanche, les Pays de la Loire sont moins bons en ce qui concerne les décès liés aux conduites à risque ou addictives. Les accidents de voiture dus à l’alcool, les cancers, le suicide… Nous allons traiter cela. Par exemple, nous accentueront la prévention de l’hyperalcoolisation des jeunes en mobilisant les professionnels de santé, les hôpitaux, les associations mais aussi l’Education nationale et les entreprises.
Comment pouvez-vous agir contre la pénurie de professionnels de santé ?
L’ARS s’inscrit dans la continuité de la Mission régionale de santé (1), qui avait lancé une analyse de la densité d’infirmières. Plusieurs territoires ruraux de la région sont sous-dotés, principalement dans la Sarthe et la Mayenne. Nous souhaitons y développer des maisons de santé, car je suis persuadée que le regroupement des professionnels est la meilleure solution.
Quelle coordination entre médical et médicosocial, hospitalier et extrahospitalier envisagez-vous ?
La coordination est l’enjeu principal des ARS. Il nous faut éviter que le patient subisse une rupture entre l’hospitalier et l’ambulatoire. Pour cela, nous allons nous appuyer sur les réseaux de santé et mettre en place une protocolisation sur la base de bonnes pratiques.
Quelle recherche des meilleurs parcours de soins ?
La logique veut d’abord que nous nous assurions que le parcours de soins est adapté aux besoins du patient, qu’il est pris en charge là où il le doit. L’organisation de l’offre va en découler naturellement. Par exemple, certaines personnes âgées sont hospitalisées car il n’y a pas suffisamment d’offre en soins de suite ou en aide à domicile. Il faudra identifier leurs attentes, et si elles souhaitent rester chez elles, renforcer les soins infirmiers à domicile.
Comptez-vous associer les ordres, et plus particulièrement l’ordre infirmier, à la validation des projets de coopérations entre professionnels de santé (lire ici) ?
Nous avons déjà rencontré le comité de liaison interordres. Nous avons abordé ensemble la question de l’exercice partagé des activités. L’ordre infirmier pourrait même devenir force de proposition sur ce thème.
A domicile, quelle frontière entre l’hospitalisation et les services de soins infirmiers ?
Nous allons devoir définir qui fait quoi. Dans un premier temps, cela pourrait passer par des contrôles, afin de s’assurer que la prise en charge est adéquate.
L’ARS peut-elle renforcer le rôle de prévention des infirmières libérales auprès des patients ?
Pour la prévention, nous nous appuierons sur toutes les bonnes volontés. Mais pour l’instant, on n’en est pas encore là ! Nous n’en sommes qu’à la définition du projet.
Que faudrait-il développer en termes de formations pour les infirmières ?
Nous n’avons aucune compétence sur la formation initiale en Ifsi. On intervient davantage sur l’aspect prévisionnel, c’est-à-dire déterminer le nombre d’infirmières dont nous avons besoin dans la région et les compétences qui nous manquent. La formation continue pourra être organisée en fonction de ces besoins.
Quelle coordination avec les autres acteurs de la santé dans la région ?
Notre volonté, c’est d’avoir une organisation régionale qui puisse à la fois mener une réflexion et mettre en œuvre des politiques. La Conférence régionale de la santé et de l’autonomie sera le lieu de l’élaboration de décisions avec l’ensemble de nos partenaires. La première rencontre aura lieu au début du mois de juillet.
Quelle écoute sera accordée aux associations de patients ?
Les associations de patients seront associées à cette conférence et au conseil de surveillance de l’ARS. Nous pensons aussi monter une instance de consultation informelle avec des associations de patients, de personnes âgées et de personnes handicapées.
Selon quels critères allez-vous définir les « territoires de santé » que vous devez créer ?
Avant, ces territoires étaient définis par l’agence régionale de l’hospitalisation, donc dans une logique hospitalière. À l’avenir, l’ambulatoire et le médico-social seront aussi pris en compte. Pour l’instant, on regarde ce qui se fait en médecine libérale, à l’hôpital. On devrait définir les territoires de santé en septembre prochain.
L’association de lutte contre le sida Aides dénonce une baisse des subventions régionales (elles auraient chuté de 22% au premier trimestre 2010). Les associations ont-elles raison de s’inquiéter ?
Nous n’avons pas encore réparti tout le crédit de l’année, il est donc trop tôt pour s’inquiéter. Rien ne dit que les subventions annuelles vont baisser.
Propos recueillis par Hélène Colau
1- Les missions régionales de santé, créées par la loi de décentralisation de 2004, visent à renforcer le lien entre l’Etat et l’Assurance maladie, par exemple à propos de la démographie médicale ou de la permanence des soins. Ces instances sont désormais intégrées aux ARS.