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La Fédération nationale des infirmiers (FNI) a dévoilé cette semaine ses propositions pour la présidentielle. Parmi elles, une mesure coup-de-poing : et si le métier d’infirmière devenait une « profession médicale à compétences définies » ?
Certains commentateurs se demandent quand la campagne présidentielle va véritablement commencer. Question légitime si l’on s’intéresse aux candidats, mais pas si l’on s’intéresse aux organisations infirmières, qui annoncent les unes après les autres les idées qu’elles souhaitent soumettre aux prétendants à la magistrature suprême. Après le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil), qui a dévoilé il y a deux semaines dernière sa plateforme « Débats d’Idels », ou l’Ordre national des infirmiers (ONI) qui organisait le 20 janvier un colloque aux allures de programme électoral, c’était mardi au tour de la FNI de présenter ses réformes prioritaires.
Et le moins que l’on puisse dire est que la première d’entre elles ne manque pas de panache. Le syndicat majoritaire chez les Idels souhaite en effet que le futur locataire de l’Élysée fasse de la profession infirmière une « profession médicale à compétences définies », à l’instar des sages-femmes, par exemple. « Nous avons aujourd’hui un problème d’accès aux soins extrêmement prégnant que ni la pratique avancée, ni le desserrement du numerus clausus ne permettront de régler rapidement, justifie Daniel Guillerm, président de l’organisation. Nous proposons donc de nous appuyer sur le tissu libéral infirmier, qui est organisé à l’échelle des territoires et qui assume une véritable continuité des soins, pour améliorer la situation. »
S’appuyer sur la réingénierieConcrètement, la FNI entend saisir l’opportunité offerte par la réécriture du décret de compétence, annoncée par le ministre de la Santé lors du colloque ordinal de janvier, pour rebattre les cartes. « Olivier Véran a dit qu’il était prêt à aller assez loin, nous lui disons “chiche !” », sourit le représentant syndical. Parmi les compétences qu’il souhaiterait voir ajoutées à ce qui ne serait plus une profession paramédicale, il cite notamment les domaines de la prévention ou de l’éducation thérapeutique du patient, mais ne s’y limite pas. « Nous devons aller vers un élargissement du champ de prescription de la profession, affirme-t-il. Aujourd’hui, quand nous avons une personne âgée déshydratée et que nous n’avons pas de médecin traitant sous la main pour prescrire la réhydratation par voie parentérale, nous sommes obligés d’hospitaliser le patient. Or, nous sommes formés au dépistage de la déshydratation, et serions capables de poser une réhydratation sans avis médical. »
Avec un niveau masterBien sûr, l’élargissement des compétences de la nouvelle profession médicale s’accompagnerait d’un allongement de la durée des études. « Il faut un niveau master, même s’il ne faut pas forcément ajouter deux ans d’études, comme pour les IPA », estime Daniel Guillerm. Il doit aussi aller de pair avec une meilleure valorisation. « Si nous contribuons à désengorger les files actives, il me paraît normal qu’il y ait un transfert budgétaire », estime-t-il. Et quand on lui demande s’il n’a pas peur de se heurter à une opposition frontale de la part des médecins, le président de la FNI répond que ceux-ci peuvent se rassurer. « Il ne s’agit pas de les remplacer, et le diagnostic médical doit être sanctuarisé, affirme-t-il. Mais il faut comprendre qu’à côté de ce diagnostic médical, il peut y avoir un diagnostic et un suivi infirmiers. » Pas sûr que cela suffise à arrondir les angles…
Adrien Renaud
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Renaud A., « Les Idels plongent dans le grand bain de la présidentielle », Espaceinfirmier.fr, le 19/01/2022.