La Guyane recrute des médiateurs en santé communautaire | Espace Infirmier
 
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24/05/2024

La Guyane recrute des médiateurs en santé communautaire

L’Agence Régionale de Santé Guyane a lancé un Appel à Manifestation d’Intérêt ouvert jusqu’au 15 juin pour le déploiement de médiateurs en santé communautaire. Ce dispositif expérimental mené sur un an a pour objectif de favoriser le recours effectif des populations à la prévention et aux soins.

La Guyane est précurseur dans le domaine de la médiation en santé et c’est aussi le premier territoire où les permanences d’accès aux soins de santé (Pass) sont dotées de médiateurs en santé. Pour aller plus loin dans cette logique de « l’aller vers » et répondre aux spécificités du territoire, l’ARS a lancé un Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) pour le déploiement de médiateurs en santé communautaire avec une enveloppe dédiée d’un montant maximal de 600 000 euros. Il s’inscrit dans le cadre du programme opérationnel Guyane Santé 2030 qui vise à faire converger l’espérance de vie des Guyanais avec celle des Français de l’Hexagone. Il faut rappeler que la Guyane est un territoire grand comme le Portugal, compte 300 000 habitants et est occupé à 95 % de forêts. Les cultures sont multiples -créole antillais, brésilien, Bushinengués, Chinois, Mong, Surinam, Afghans, Syriens …-, et pas moins de 19 langues sont parlées sur le territoire où existe une grande précarité. L’accès aux soins pour les habitants des communes de l’intérieur et des quartiers d’habitat spontané (bidonvilles) sont difficiles (absence de transports, de télécommunication…) et répondent à des enjeux spécifiques. Ils sont éloignés des grandes villes de Cayenne, Kourou et Saint Laurent-du-Maroni et donc, des hôpitaux, des professionnels de santé libéraux, des associations, des institutions et des collectivités. Et le constat est qu’aujourd’hui, les actions de prévention et de promotion de la santé qui existent touchent peu ces populations malgré les nombreux efforts réalisés.

Un nouvel acteur à l’interface du soin, de la prévention et des populations

« À l'intérieur du territoire, la population est dispersée le long des fleuves, les villages sont coupés du littoral faute d'infrastructures de transport, souligne Maud Leguistin, chargée de mission santé publique à la direction de la santé publique de l’ARS Guyane. Nous avons un réseau de Centres délocalisés de prévention et de soins (CDPS) qui compte entre 15 et 20 sites. Ils assurent des consultations avec ou sans rendez-vous, gèrent les urgences. Les médiateurs en santé y sont déjà présents pour faciliter les choses notamment avec la barrière de la langue et les différences culturelles. Ils peuvent faire de l’aller vers, de la prévention ou accompagner les patients dans les soins. Dans le cadre de l’AMI, nous ajoutons une approche communautaire à la médiation en santé. Nous voulons accompagner les populations d’un quartier en réalisant une veille au plus près des personnes puisque les médiateurs en santé recrutés seront issus du territoire dans lequel ils interviennent. Cela permet de détecter le plus tôt possible les signaux faibles, les pathologies déjà avancées et les signaux forts ayant un potentiel impact sur la santé. » Le dispositif sera d’abord expérimenté pendant un an dans deux territoires de 2 000 habitants chacun : l’un dans une commune de l’intérieur du sud Guyane et l’autre dans un quartier d’habitat spontané du littoral. Au quotidien, les médiateurs en santé communautaire pourront suivre les populations, connaître leurs besoins et leurs attentes. « Notre objectif est d’aller davantage vers l’accompagnement in situ et de recueillir des données, ajoute la chargée de mission en santé publique. Cette expérimentation doit nous permettre de comprendre ce que serait l’idéal de la médiation en santé, l’idée de la médiation en santé étant que les personnes soient ensuite autonomes. » Au Brésil, tout proche, les agents de santé communautaire déployés notamment dans les favelas, ont la particularité de pouvoir pratiquer un certain nombre de gestes, d’actes qui en France sont exclusivement réservés aux professionnels de santé.

Des objectifs multiples

Cet AMI a pour ambition de remplir trois objectifs. Premièrement, spécifier le profil et les compétences attendues des médiateurs en santé communautaire, nouvel acteur à l’interface du soin, de la prévention et des populations mais aussi construire un référentiel de formation de base pour permettre d’assumer cette fonction dans les territoires isolés avec une approche communautaire renforcée. Deuxièmement, déployer le dispositif sur deux territoires isolés et spontanés pour évaluer sa faisabilité, les freins éventuels à lever et les conditions de réussite du dispositif. Et troisièmement, mesurer l’impact de l’installation d’un pool de médiateurs en santé communautaire en Guyane d’ici à 2030. Tout cela dans le but d’apporter une réponse aux spécificités du territoire en matière de santé. À savoir un manque de sensibilisation des populations aux questions de santé publique et environnementale, un phénomène de renoncement aux soins et de dégradation des états de santé voire d’aggravation de certaines pathologies, des retards de prise en charge importants liés à des diagnostics tardifs, une faible mobilisation de leurs droits par les personnes en général, et de leur couverture sociale en particulier, et des situations de risques amplifiés (exposition aux métaux lourds, addictions, IST, grossesses précoces). Car c’est bien le développement de la prévention et des soins qui est au cœur de ce projet expérimental.

Isabel Soubelet

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