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La HAS retire des recommandations

27/09/2011

La HAS retire des recommandations

La Haute Autorité de santé a suspendu six recommandations professionnelles en raison de la non-déclaration d’intérêts, voire de conflits d’intérêts majeurs de la part des experts ayant participé à leur élaboration.

La Haute Autorité de santé (HAS) a annoncé le 15 septembre la suspension de six recommandations professionnelles (1), dont la procédure d’élaboration ne garantissait pas absolument l’indépendance des experts impliqués. Quelque « 70 recommandations ont été réexaminées, a expliqué Jean-Luc Harousseau, actuel président du collège de la HAS. Nous en avons trouvé six pour lesquelles des spécialistes du groupe de travail présentaient un risque de conflit d’intérêts majeur ou n’avaient pas rendu leur déclaration publique d’intérêts. »

A l’origine du revirement : une action lancée fin 2009 par Formindep (2). Durant deux ans, l’association "pour une formation et une information médicales indépendantes de tout autre intérêt que celui de la santé des personnes" a en effet réclamé le retrait de deux autres recommandations concernant le traitement du diabète de type 2 et de la maladie d’Alzheimer, après avoir mis en évidence, parmi les déclarations publiques d’intérêts des experts réunis pour les élaborer, des liens majeurs avec un, voire plusieurs laboratoires pharmaceutiques commercialisant des médicaments contre ces affections. Une opposition entre intérêt particulier et mission de service public que la législation française sanctionne clairement.

Des infirmières dans les groupes d'experts de la HAS

La mobilisation de Formindep a débouché en mai dernier sur l’abrogation, par ordre du conseil d’Etat, des recommandations concernant le diabète de type 2, tandis que la HAS décidait également de suspendre celles consacrées à la maladie d’Alzheimer. Dans la foulée, l’institution s’engageait à réviser l’ensemble des recommandations publiées entre 2005 et 2010 (date à laquelle la HAS a durci sa politique de gestion des conflits d’intérêts). « La légitimité de la Haute Autorité se fonde sur sa rigueur scientifique et son indépendance intellectuelle, souligne le président du collège de l’institution, et compte tenu de la crise actuelle de confiance envers les institutions de santé, liée au drame du Mediator (3) , il nous fallait redonner confiance aux professionnels de santé comme au grand public. »

Philippe Foucras, médecin généraliste et fondateur de Formindep salue ces nouvelles décisions et souligne l’intérêt d’un recours citoyen. « Mais nous pensons que davantage de textes devraient être réexaminés pour les mêmes raisons, poursuit-il. La HAS ne retire que ceux dont elle suppose que les conclusions peuvent être réellement biaisées. » Pour autant, la Haute Autorité semble effectivement s’engager sur la bonne voie, puisqu’elle a également commencé à filmer les délibérations de sa commission de la transparence pour la réévaluation de la classe des médicaments anti-Alzheimer (qui seront prochainement mises en ligne). « Il y a également un vrai mouvement engagé par la HAS pour modifier le recrutement des experts, qui s’ouvre également à d’autres leaders d’opinion, explique Philippe Foucras. Pour preuve, aujourd’hui, des médecins généralistes et même des infirmières sont associés à leurs groupes de travail. »

De nouvelles recommandations avant fin 2012

Pour l’heure, les équipes de la Haute Autorité cherchent à constituer de nouveaux groupes d’experts « ne présentant pas de conflit d’intérêts majeur » afin de reprendre toute la procédure d’élaboration des six documents fraîchement suspendus, ainsi que celui concernant la prise en charge de la maladie d’Alzheimer. De nouvelles recommandations pour le traitement médicamenteux du diabète de type 2 sont en cours d’élaboration. Jean-Luc Harousseau espère voir l’ensemble des huit nouvelles recommandations publié avant fin 2012.

En attendant, les textes suspendus restent considérés comme des références. Même si, comme le souligne Jean-Luc Harousseau, « elles ne sont pas opposables », les recommandations professionnelles publiées par la Haute Autorité sont de plus en plus souvent considérées comme une norme de prise en charge, notamment par la Sécurité sociale et les structures de formation médicale continue ou initiale.

Sandra Mignot  

 

1 - Diagnostic, prise en charge thérapeutique et suivi des spondylarthrites; Prévention vasculaire après un infarctus cérébral ou un accident ischémique transitoire; Polyarthrite rhumatoïde : diagnostic et prise en charge initiale; Polyarthrite rhumatoïde : prise en charge en phase d’état; Prise en charge des complications évolutives d’un épisode dépressif caractérisé de l’adulte; Prise en charge des patients adultes atteints d’hypertension artérielle essentielle.

2 - Le collectif Formindep a été lancé en mars 2004 à l’initiative de Philippe FOUCRAS, à l’époque médecin généraliste dans le Nord et formateur en médecine générale, pour soutenir l’appel lancé aux Conseils nationaux de formation médicale continue de déclarer leurs conflits d’intérêts. Il regroupe des professionnels de santé et des patients soucieux de favoriser une formation professionnelle indépendante, dégagée de toute influence d’organismes pouvant avoir d’autres finalités que l’intérêt seul des patients.

3 - Le Mediator (benfluorex), médicament antidiabétique commercialisé entre 1976 et 2009, et utilisé hors AMM comme coupe-faim, aurait provoqué la mort de quelque 500 patients et l’hospitalisation de plusieurs milliers d’autres. Dans cette affaire, outre la responsabilité du laboratoire Servier, l’Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) est également pointée du doigt pour avoir maintenu l’AMM du médicament, douze ans après les premières suspicions de lésions cardio-vasculaires induites par la molécule…

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