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17/08/2021

La recertification des compétences pose question

Dès le 1er janvier 2023, les professionnels de santé dotés d’un ordre, dont les infirmières, devront faire certifier leurs compétences tous les six ans, par une liste d’actions dont les modalités restent à définir. Les organisations infirmières restent sur leurs gardes.

Le Journal officiel a publié, le 21 juillet, l’ordonnance fixant le cadre de la recertification régulière des compétences des sept professions de santé dotées d’un ordre professionnel, dont les infirmières font partie (aux côtés des médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes, pharmaciens, masseurs-kinésithérapeutes et pédicures-podologues). Cette obligation de certification sera applicable à partir du 1er janvier 2023. Une décision accueillie avec un enthousiasme inégal selon les syndicats et organisations.

L’ordonnance est prise sur le fondement de l’article 5 de la loi « Ma Santé 2022 » du 24 juillet 2019, qui, initialement, concernait uniquement les médecins, avant d’être étendu aux six autres professions de santé à ordre. Sur une période de six ans, les soignants devront avoir réalisé des actions visant à « actualiser leurs connaissances et leurs compétences, renforcer la qualité de leurs pratiques professionnelles, améliorer la relation avec leurs patients et mieux prendre en compte leur santé personnelle ». Les professionnels en exercice au moment de l’entrée en vigueur du texte auront, eux, neuf ans pour remplir ces obligations.

L’Ordre national des infirmiers (ONI), très engagé sur cette question, se félicite de la parution de cette ordonnance. « L’ADN de l’ONI, c’est de s’assurer que la bonne personne intervienne au bon moment pour les patients, rappelle son président Patrick Chamboredon. La recertification s’inscrit dans cette optique, au bénéfice de la qualité des soins. Pour le patient, c’est la garantie d’être soigné par des professionnels dont les pratiques et les connaissances sont actualisées. »

Acharnement

L’ordonnance prévoit que les actions de certification seront librement choisies par le soignant, en lien avec l’employeur pour les salariés, parmi une liste figurant dans un référentiel national. Les ordres professionnels seront ensuite chargés de contrôler le respect de cette obligation. Les référentiels nationaux ne sont pas encore parus, ils feront l’objet d’un décret par le Conseil d’État, qui fixera également les modalités de détermination et de réalisation des actions, ainsi que leur financement. Le texte précise toutefois que les actions engagées au titre du développement professionnel continu (DPC), de la formation continue et de l’accréditation seront prises en compte.

L’ordonnance institue également un Conseil national de la certification périodique, chargé de définir « la stratégie, le déploiement et la promotion de la certification périodique » en fixant ses orientations scientifiques et en émettant des avis rendus publics.

« Cette certification pose beaucoup de questions, nous attendons de connaître les modalités exactes, mais nous avons du mal à comprendre ce que ça va ajouter à l’évaluation annuelle de nos pratiques professionnelles, s’interroge Céline Durosay, secrétaire nationale du syndicat Coordination nationale infirmière (CNI). Le texte est publié en même temps que l’obligation vaccinale pour les soignants, qui ont l’impression qu’on se méfie d’eux et qu’on s’acharne. »

Garder du sens

Un autre point qui éveille la vigilance de la CNI concerne le choix des actions : sera-t-il réellement libre pour les agents ou orienté en fonction des objectifs de leur service ? Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) partage cette réserve. « Pour le DPC, déjà, l’offre de formation est embolisée par des formations aux adaptations techniques ou réglementaires internes, et trop peu de formations “cœur de métier” sont proposées, constate-t-il. Sur le fond, la recertification est intéressante, mais c’est bien les modalités d’application du texte qui feront la différence. »

L’Association nationale française des infirmières et des infirmiers diplômés et des étudiants (Anfiide) souligne également le manque de moyens dont dispose l’Ordre pour s’assurer du respect de cette disposition. « Nous espérons que la tutelle va faire de la pédagogie pour que cette mesure ne soit pas vue comme coercitive, souhaite Philippe Bordieu, vice-président de l’Anfiide. L’objectif est de garder du sens à notre métier, donc, si on se retrouve dans une usine à gaz, la cible sera manquée et on ajoutera encore de la complexité. »

Lisette Gries

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