Une étude menée en Ile-de-France montre une bonne acceptabilité du dépistage en routine du VIH par les usagers des urgences hospitalières.
L’une des mesures phares du plan national de lutte contre contre le VIH/sida et les infections sexuellement transmissibles 2010-2014 consiste à étendre le dépistage du VIH à la population générale. Le plan invite ainsi les médecins généralistes à proposer une prescription de sérologie à tout patient âgé de 15 à 70 ans, qui n’en aurait jamais fait. La question se pose alors de savoir quelle sera la réaction des personnes à ce nouveau dispositif. Une étude menée dans des services d’urgences franciliens et dont les résultats sont publiés dans le dernier Bulletin épidémiologique hebdomadaire de l’Institut de veille sanitaire (InVS), permet d’apporter quelques éléments de réponses.
A l’instar de la plupart des pays à faible prévalence d’infection à VIH en population générale, la France a jusqu’ici privilégié la démarche volontaire de dépistage en cas de prise de risque, notent les auteurs de l’étude. Mais « cette stratégie basée sur la perception du risque a montré ses limites », poursuivent-ils, notamment eu égard « au nombre trop important de personnes ignorant leur séropositivité et diagnostiquées trop tard », a rappelé lundi le ministre en charge de la Santé Xavier Bertrand lors d’une conférence de presse. D’où l’idée d’améliorer, d’étendre, voire de « banaliser le recours au test en dehors de toute exposition à un risque », a indiqué Xavier Bertrand.
Dépistage gratuit par test rapide
L’étude dirigée par Anne-Laure Crémieux, de l’hôpital Raymond-Poincaré à Garches (AP-HP), a été réalisée dans 27 services d’urgences d’établissements hospitaliers publics et privés d’Ile-de-France, région de France métropolitaine où a été recensée la moitié des découvertes de séropositivité depuis 2003. Etaient éligibles à l’étude les usagers des urgences âgés de 18 à 64 ans. En étaient exclues les personnes se sachant déjà séropositives, celles présentant une urgence vitale ou incapables de donner leur consentement éclairé pour raisons psychiatriques, d’intoxication ou de garde à vue.
Pendant six semaines, tous les jours et 24 heures sur 24, les patients se voyaient proposer gratuitement un dépistage par test rapide par le personnel infirmier ou médical du service, qui leur remettait une notice d’information et recueillait leur consentement écrit. Environ deux tiers des personnes à qui le dépistage a été ainsi proposé l’ont accepté : 12.111 sur 19.361, soit 62,5% de taux d’acceptabilité en moyenne, sachant que celui-ci s’est révélé moins élevé dans les services d’urgences de Paris intra muros qu’en périphérie de la capitale, précisent les auteurs. En cas de refus, une infirmière en consignait le motif : parmi les plus fréquents, le fait d’avoir récemment fait un test (48%) ou de ne pas avoir pris de risque (28%).
Formation des infirmières et des médecins
Dans chaque établissement, les équipes urgentistes de jour comme de nuit avaient été préalablement formées à la proposition et à la réalisation de ces tests de dépistage rapide (TDR) lors de séances d’une heure environ.
En cas de résultat négatif, la personne était informée oralement et par écrit par le personnel infirmier, tandis qu’en cas de réactivité, elle était prise en charge par un médecin urgentiste avec prélèvement immédiat d’un échantillon de sang pour confirmation par un test Elisa et Western blot. Quand la séropositivité était avérée, le patient obtenait un rendez-vous dans les trois jours avec un médecin infectiologue qui lui remettait le résultat définitif et démarrait la prise en charge.
Pour Anne-Laure Crémieux et ses collègues, ces résultats montrent que « la réticence des consultants vis-à-vis du test n’apparaît pas comme un obstacle à la mise en place du dépistage aux urgences », observation, ajoutent les chercheurs, « susceptible de lever les craintes du personnel soignant souvent exprimées lors des séances de formation ».
Si cette étude permet d’appréhender une certaine recevabilité du dépistage systématique du VIH, notons toutefois que le public des urgences diffère de la patientèle des médecins généralistes et que si dans l’étude le test proposé est le TDR, c’est un test classique que les médecins généralistes seront amenés à proposer plus systématiquement à leurs patients aux termes du plan VIH/sida 2010-2014.
Cécile Almendros