14/12/2009

Les conséquences de l’excision en France : une enquête inédite

L’Ined présente les premiers résultats de l’enquête Excision et Handicap. Ils révèlent des données inédites sur les femmes concernées par cette pratique en France et sur les conséquences à long terme de cette mutilation.

On estime que 53 000 femmes sont concernées par l’excision en France. Jusqu’à présent, les données sociales ou épidémiologiques manquaient cruellement à ce sujet. Les premières informations livrées par l’enquête ExH renseignent tout d’abord sur le profil de ces femmes. Une comparaison avec les migrantes ou filles de migrantes non excisées révèle en effet qu’elles sont moins instruites et moins actives : 22 % n’avaient jamais été scolarisées (contre 3 % des femmes non excisées). Elles ont en général des familles plus nombreuses (17 % des femmes excisées avaient cinq enfants et plus, contre 5 % des femmes non excisées), des compagnons plus âgés (39 % ont un conjoint qui a dix ans de plus contre 23 %), et se différencient par une entrée dans la sexualité liée à l’entrée dans la conjugalité.

Côté physiologique, les femmes excisées déclarent subir plus fréquemment des infections urinaires et gynécologiques (33 % de plus que dans la population témoin). Elles signalent des douleurs et des gênes dans la région génitale (+18 %). Une sur dix rencontre des difficultés au quotidien pour marcher, uriner, ou porter certains vêtements tels qu’un pantalon. 13 % ressentent des douleurs pendant les rapports (contre 6 % des femmes non excisées). Par ailleurs, les femmes excisées déclarent plus fréquemment des difficultés à éprouver du désir sexuel (25 % contre 12 %), voire ne ressentent pas de désir du tout (23 % contre 14 %).

Diminution dans l'Hexagone
Les chercheuses de l’Institut national des études démographiques (Ined) ont également tenté de cerner le risque de perpétuation de la pratique sur les générations suivantes. Leurs résultats montrent que 11 % des filles des femmes excisées ont également vécu cette mutilation. Mais ce n’est le cas que pour 3 % de celles qui sont nées en France, avec une nette diminution après 1989 : seules 1 % des filles nées entre 1990 et 1999 dans l’Hexagone sont concernées, et aucune de celles nées après 2000. « Malgré les limites du mode déclaratif, cela marque l’impact puissant des procès pour excision qui ont eu lieu dans les années 1980 et celui de la pénalisation de cette pratique », commente Emmanuelle Piet, médecin de PMI en Seine-Saint-Denis.

Néanmoins, l’enquête révèlerait la persistance d’un risque pour 30 % des enfants des femmes interrogées. En effet, si rares sont les parents qui disent vouloir faire exciser leur fillette, 15 % disent ne pas savoir ce qu’ils feront à l’avenir ou affirment que leur conjoint n’a pas d’idée arrêtée sur la question. Par ailleurs 15 % pensent qu’un risque subsiste de la part des grands-parents si leur enfant rentre au pays…

L’enquête a été réalisée entre 2007 et 2009 dans les PMI et hôpitaux de cinq régions (Île-de-France, Haute-Normandie, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Pays de Loire et Nord-Pas-de-Calais) identifiées comme prioritaires dans la lutte contre l’excision par la Direction générale de la Santé. 3093 femmes migrantes ou nées de parents migrants ont été interrogées. Parmi elles 635 étaient excisées. D’autres résultats devraient être publiés courant 2010, l’ensemble des données (notamment les volets médicaux remplis par les médecins, ou encore des données concernant l’attitude du conjoint, le type d’union, etc.) n’ayant pas encore été analysées.

Sandra Mignot

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