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Deux représentantes des Infirmiers en pratique avancée (IPA) ont été reçues par le ministre de la Santé, Olivier Véran, le 19 avril. L’occasion de faire le point sur les dossiers freinant le déploiement de la profession.
Julie Devictor, présidente du Conseil national professionnel (CNP) des IPA, et Tatiana Henriot, présidente de l’Union nationale des infirmiers en pratique avancée (Unipa), ont eu l’opportunité de rencontrer le ministre de la Santé pour évoquer ce qui bloque l’implantation de la pratique avancée en France.
Blocages dans la prescription à la CnamPremier point abordé et non des moindres : le système d’information de la Caisse nationale de l’Assurance maladie (Cnam), qui ne reconnaît pas les IPA comme prescripteurs, générant de nombreux freins sur le terrain. « Olivier Véran a appelé Thomas Fatôme [directeur général de la Cnam, NDLR] devant nous afin de comprendre les raisons de ce blocage dans la prescription », fait savoir Tatiana Henriot. Le fichier Sesam-Vitale n’est en effet pas à jour, entraînant deux difficultés. Tout d’abord, en libéral, les IPA peuvent facturer à leur Cpam quatre forfaits trimestriels de suivi par an et par patient. « Cependant, les Cpam leur réclament, à tort, la prescription du médecin, dénonce Tatiana Henriot. Nous ne sommes pas une profession prescrite donc nous n’avons pas à fournir de prescription du médecin pour pouvoir facturer. » Deuxième problème : les autres professionnels de santé ne reconnaissent pas leur prescription car les IPA n’étant pas reconnus comme prescripteurs par la Cnam, ils n’arrivent pas à se faire rembourser. « Cette situation a aussi une autre conséquence, à savoir l’ingérence professionnelle des autres acteurs du soin dans notre activité car ils ne connaissent pas notre domaine d’intervention », dénonce Tatiana Henriot. Thomas Fatôme aurait fait savoir au ministre de la Santé que ses équipes travaillent à la régularisation de la situation.
L’accès direct des IPA, qui n’est pas encore acté à ce jour, a également été abordé. « Le ministre de la Santé nous a assuré qu’il fallait selon lui ouvrir cet accès, indique Tatiana Henriot. Comme nous avons le droit de prescription, un texte réglementaire ne peut pas nous empêcher de l’appliquer. » Olivier Véran aurait missionné Vannessa Fage-Moreel, sous directrice Ressources humaines à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) de lui faire remonter tous les freins à l’exercice de la pratique avancée et se serait engagé à modifier les décrets rapidement.
Revalorisation financièreAutre point de blocage : le modèle économique des IPA libérales, qui empêche le déploiement de la profession. « La révision de notre modèle économique a été confiée par Olivier Véran à Sophie Sergent-Decherf, sa conseillère en charge des professions de santé, afin d’accélérer le déploiement des IPA en ville », explique la présidente de l’Unipa. Et d’ajouter : « Notre travail en ville doit être déployé avec un modèle économique encourageant afin que nous puissions intervenir dans le champ des soins primaires avec une approche sur les déterminants de santé. » Le salaire des IPA hospitaliers devrait également évoluer, notamment dans le cadre de la revalorisation des grilles salariales des paramédicaux de la Fonction publique hospitalière. « Le ministre de la Santé nous a mentionné les 53 euros d’augmentation comme pour les spécialités infirmières, mais nous attendons les détails techniques de la mise en œuvre, assure Tatiana Henriot. Il a aussi évoqué une prime spécifique et une Nouvelle bonification indiciaire (NBI) pour les IPA. »
Et de conclure : « Ce rendez-vous redonne de l’espoir, d’autant que la crise sanitaire ne nous a pas aidés dans notre implantation. Mais nous restons vigilants sur la mise en œuvre et le suivi des actes pour solutionner les difficultés de terrain. Nous sommes dans l’attente d’un vrai accompagnement, de moyens et de ressources car nous sommes face à des difficultés réelles alors que notre rôle est fondamental dans le parcours de vie des patients. »
Laure Martin