© Dr Laure Pauliac
En soutien aux revendications des infirmiers anesthésistes, qui sont en grève depuis le 2 novembre dernier, les professionnels de santé du Centre hospitalier de Dieppe ont posé nu devant l’objectif de l’un des chirurgiens de l’établissement, passionné de photo.
« Sans Iade, je suis à poil ; sans statut, je suis tout nu. » C’est avec ce message que les infirmiers anesthésistes (Iade) du CH de Dieppe ont souhaité attirer l’attention sur leur mouvement de grève national débuté le 2 novembre. « L’idée est venue de l’une de mes collègues, Mailys Lejeune, raconte Nicolas Paysan, Iade au CH de Dieppe. Nous cherchions une manière de donner de la visibilité à nos revendications. » Le brainstorming a conduit à cette idée de faire poser nu les soignants de l’établissement, mais aussi le personnel administratif. « Nous ne voulions pas d’un énième calendrier de gens nus », précise l’infirmier. L’aspect esthétique de la démarche a donc été discuté avec le chirurgien, passionné de photographie, qui a accepté de prendre les clichés mais également de poser. « Nous n’étions pas sûrs que les équipes, autres que la nôtre, acceptent mais finalement, tout s’est fait assez naturellement, se réjouit Nicolas Paysan. Ils se sont proposés d’eux-mêmes, ce qui montre bien que nos revendications ne sont pas exagérées. » « Nous avons voulu faire des photos non mensongères, complète le Dr Laure Pauliac, chirurgien viscérale et digestif au CH de Dieppe, qui a pris les photos de la campagne. Les soignants qui ont accepté de poser ont donc été photographiés dans le cadre de leur activité, tout comme la sous-directrice. » « Sans pour autant le soutenir, la direction comprend notre mouvement », précise Nicolas Paysan.
Reconnaissance de la pratique avancéeLa principale revendication des Iade porte sur la reconnaissance de leur autonomie au sein du bloc opératoire : ils souhaitent être reconnus comme des auxiliaires médicaux en pratique avancée. « Notre exercice quotidien sur le terrain répond aux exigences de la pratique avancée, nous sommes autonomes et indépendants, rappelle Nicolas Paysan, précisant que les Iade ne veulent pas pour autant devenir des IPA. Nous souhaitons la reconnaissance de la pratique avancée clinique, et non praticienne, car nous souhaitons le maintien du binôme Iade-médecin anesthésiste-réanimateur. » Cette reconnaissance du statut impliquerait une modification du décret d’actes car « le texte actuel nous définit uniquement comme des exécutants », regrette le soignant. « En tant que chirurgien, je ne peux que soutenir leur mouvement, souligne le Dr Pauliac. Au bloc, je ne peux rien faire sans les Iade car nous n’avons pas autant de médecins anesthésistes-réanimateurs que de salles de bloc. Et leur autonomie est réelle. »
Comme le rappelle le Syndicat national des infirmiers anesthésistes (Snia) dans un communiqué du 15 novembre, « le raisonnement clinique de haut niveau mis en œuvre par l’Iade lui permet d’investir pleinement l’autonomie que lui octroie son champ de compétences dans une pratique collaborative entretenue avec le médecin anesthésiste-réanimateur sur la base d’une stratégie anesthésique définie au terme de la consultation d’anesthésie. »
« Nous défendons également notre place en préhospitalier, poursuit Nicolas Paysan, car progressivement, nous nous faisons évincer des Smur au profit des IDE, qui coûtent moins chers pour les directions. » Et de préciser : « Attention, en aucun cas nous ne remettons en cause le travail des IDE. Nous ne voulons pas leur fermer la porte, mais nous souhaitons aussi garder notre place. Car si nous perdons ce panel en préhospitalier, nous allons progressivement être moins réactifs en peropératoire. »
Les infirmiers anesthésistes sont en grève jusqu’au 25 novembre.
Laure Martin