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Dans le cadre du plan de lutte contre les fraudes fiscales porté par le ministère des Comptes publics, dont les contours ont été présentés par le ministre Gabriel Attal le 9 mai, la Direction de la sécurité sociale a informé les syndicats représentatifs des infirmières libérales, d’une nouvelle mesure en réflexion pour la profession.
Les syndicats représentatifs des infirmières libérales (Idels) voient rouge. La Direction de la sécurité sociale (DSS) les a informés d’une réflexion en cours sur l’introduction de « la suspension automatique de la participation de l’Assurance maladie à la prise en charge des cotisations des praticiens et auxiliaires médicaux en cas de fraude détectée et avérée ».
Des mesures conventionnelles jugées insuffisantesActuellement, les différentes conventions signées entre l’Assurance maladie et les représentants des professionnels de santé prévoient déjà qu’en cas de non-respect des dispositions conventionnelles, les soignants peuvent faire l’objet de différentes sanctions, dont la suspension de la participation des caisses à la prise en charge des avantages sociaux pour des durées de douze mois, maximum. Cependant, comme le précise la DSS dans le courriel envoyé aux syndicats, dont Espace Infirmier a pris connaissance, « ces sanctions n’interviennent toutefois qu’à l’issue de la procédure conventionnelle pour fraude ». De fait, « pendant la durée de la procédure, le professionnel de santé fraudeur continue de bénéficier de tous les avantages de la convention, notamment de la prise en charge par l’Assurance Maladie d’une partie de ses cotisations sociales ». Un modèle que la DSS envisage de réformer en proposant de « pouvoir suspendre automatiquement la prise en charge des cotisations sociales par l’Assurance Maladie dès lors que des fraudes ont été détectées et avérées ». Il est précisé que cette suspension automatique aura vocation à s’appliquer uniquement au cas de fraudes et non à tous les cas de réclamation d’indus, et nécessitera au préalable une modification législative voire réglementaire qui précisera les conditions et modalités d’application, notamment la durée de la sanction possible selon la gravité des manquements.
Un soutien attendu par la professionInvités à faire part de leurs observations sur ce projet, qui pourrait être intégré au prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, les syndicats n’ont pas manqué de faire part de leur mécontentement. « Avec cette mesure, les tutelles ne tiennent plus compte des dispositions conventionnelles, dénonce John Pinte, président du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil). Nous craignons que l’appréciation de la fraude relève de leur propre analyse, voire que l’application de cette mesure devienne automatique. »
Pour les syndicats, la difficulté repose principalement sur la qualification réelle de la fraude car « l’Assurance maladie et la Cour des comptes ont tendance à rapidement accuser les infirmières libérales de fraude, alors que d’après nous, ce sont davantage des erreurs répétées, liées à une méconnaissance de la Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP), associée à des prises en charge compliquées ou/et à des ordonnances mal rédigées », insiste John Pinte. La complexité de la NGAP est dénoncée de longue date, d’autant plus qu’elle évolue fréquemment, au gré de la signature des avenants à la convention nationale. Les tutelles pourraient certes reprocher aux Idels de ne pas suffisamment se former à l’application de leur NGAP. Mais les syndicats dénoncent là aussi l’absence de formation dédiée, financièrement prise en charge. Et John Pinte de conclure : « Les tutelles doivent arrêter d’être en permanence dans la suspicion de la fraude et dans le contrôle. Elles devraient plutôt chercher à aider les Idels. »