Dans son nouvel ouvrage, Ron l’infirmier – alias William Réjault – dénonce la déshumanisation des personnes âgées et part à la recherche de la prise en charge idéale.
Qu’y a-t-il de commun entre un exercice de kiné, un repas trop vite donné à une personne âgée et une extraction de selles ? Réponse : dans tous ces cas, le soignant commet peut-être un acte de maltraitance. C’est du moins ce qu’affirme Ron l’Infirmier dans son nouveau livre, qui interpelle le soignant sur le caractère protéiforme de la maltraitance.
Cette maltraitance s’exprime par exemple en « rendant un vieux incontinent », lorsqu’un infirmier débordé laisse une personne âgée faire ses besoins dans sa couche ; avec un placement dans un hôpital psychiatrique pour « se débarrasser d’un vieux encombrant, pour quelques semaines, histoire de souffler » ; par excès de sollicitude, en interprétant abusivement les désirs d’un patient incapable de s’exprimer ; ou même, selon l’auteur, en manquant de respect à un cadavre, « que l’on soit croyant ou pas».
William Réjault, qui s’appuie sur son expérience dans une maison de retraite favorisée du XVIIIe arrondissement de Paris, s’indigne des restrictions budgétaires qui ont consacré, depuis quelques années, le rôle des aides médico-psychologiques : « Les AMP sont devenues, au fil des années, les piliers des maisons de retraite. […] Ce sont elles qui apportent les repas dans les chambres, qui font manger ceux qui en ont besoin. […] Et elles sont même amenées à pratiquer des actes médicaux."
Mais pourquoi ce mépris pour la personne âgée, qui s’exprime aussi bien par la maltraitance que par les économies réalisées à leurs dépens ? William Réjault élargit le sujet en donnant la parole à Pascal Champvert, président de l’Association des directeurs au service des personnes âgées : « En France, estime-t-il, les gens se bercent encore dans l’illusion que c’est aux familles de s’occuper des vieux fragilisés. […] Personne n’a donc demandé à l’État de consacrer plus d’argent. De prendre en charge nos vieux. »
Le livre, dont la couverture porte un bandeau « Survivre en maison de retraite », délivre une série de conseils aux personnes âgées et à leur famille concernant le choix de l’établissement : nature du « projet de vie », présence d’un conseil de vie sociale et d’un volet de soins palliatifs… « Mieux vaut poser la question maintenant », suggère l’auteur.
Écœuré par la gestion des maisons de retraite « pour riches », William Réjault voit le salut dans les méthodes alternatives : le « Snoezelen », le « Cantou », l’animalo-thérapie, l’organisation de rencontres entre personnes âgées et jeunes enfants, la création de maisons de retraites communautaires pour femmes ou pour homosexuels, comme aux Etats-Unis, en Allemagne, aux Pays-bas et au Québec.
Maman, est-ce que ta chambre te plaît ? s’achève par un plaidoyer en faveur de l’euthanasie. William Réjault décrit l’attitude des soignants face à cette pratique, lorsqu’elle s’exerce de façon anonyme et clandestine : « Habituellement, je n’injecte que ce que je prépare moi-même, mais ce jour-là j’avais trouvé, posé sur le chevet du monsieur, des seringues préparées par le médecin, je suppose, enveloppées dans de l’aluminium. Je me suis douté qu’il y en avait une qui contenait une préparation létale. […] Personne n’a hésité. Tout le monde a injecté la seringue qui lui revenait. »
Adrien Le Gal