Dénonçant une « pénurie organisée » et le retard pris par la réingénierie de leur spécialisation, les infirmières de bloc des associations Unaibode et Aeeibo mettent la pression sur les ministères.
Les Ibode sont en colère, et elles le font savoir. La semaine dernière, leur stand au Salon infirmier donnait le ton. Surplombant les ateliers suture et lavage des mains, deux banderoles témoignaient de l’ambiance actuelle. Avec une revendication : « Un master pour les Ibode ». Et une condamnation sans appel : « le ministère veut la mort des Ibode. »
Objet de ce discours très offensif : le silence ministériel face à leurs revendications, traduisant selon elles un manque de considération. « Oui, nous allons jusqu’à dire que le ministère veut la mort des Ibode, car il organise selon nous la pénurie dans notre profession », clament en chœur Brigitte Louvel, vice-présidente de l’Unaibode (Union nationale des associations d’infirmiers de bloc opératoire diplômés d’Etat) et Aline Dequidt-Martinez, présidente de l’Aeeibo (Association des enseignants et des écoles d’infirmiers de bloc opératoire).
Depuis 2006, soulignent-elles, les représentants de la profession se sont engagés dans tout un travail de réingénierie du métier. Un travail qui n’aboutit pas, ajoutent-elles, car le ministère de la Santé ne répond pas présent. Les référentiels d’activités et de compétences ont été réécrits, celui concernant la formation des Ibode est en cours de finalisation… « mais pour qu’il soit pertinent, il faudrait qu’il puisse notamment intégrer l’évolution vers un niveau master. Or nous n’avons toujours aucune assurance sur ce point ! », expliquent-elles.
Boycott de réunions et pétition
En réponse, les Ibode donnent de la voix. Leur dernier coup d’éclat ? Convoquées le 11 octobre pour une réunion organisée à la DGOS (1), elles l’ont boycottée en réponse à l’absence de représentants du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche qui avaient argué d’un « emploi du temps trop chargé ». « Or en leur absence, on ne peut avancer concrètement sur le niveau master », tempête Brigitte Louvel. L’Unaibode a donc snobé la réunion. L’Aeeibo n’y est allée que le temps de lire un communiqué exprimant sa colère, relevant au passage des disparités de traitement entre Iade et Ibode.
« Les promesses de validation des acquis de l’expérience (VAE), de réforme des études par compétences, de pratiques avancées Ibode, de master, tout a tellement pris de retard que les écoles d’Ibode se vident », tonne Aline Dequidt-Martinez. Alors qu’une majorité d’Ibode exerçant actuellement ne vont pas tarder à prendre leur retraite, le nombre d’élèves en écoles d’Ibode a ainsi été divisé par trois depuis 1999, souligne-t-elle.
Et Brigitte Louvel d’ajouter que « la pénurie pose un véritable problème de santé publique, car elle va à l’encontre de tout ce qui est politique de gestion des risques et sécurité des patients… une politique pourtant définie par le ministère de la Santé lui-même ! »
Pour tenter de se faire entendre, Unaibode et Aeeibo font circuler une pétition, qu’elles ont mise en ligne sur leurs sites Web respectifs. Et les associations de professionnels préviennent : « Nous ne réintégrerons les réunions de réingénierie que lorsque nous aurons rencontré les représentants de l’Enseignement supérieur et de la recherche et obtenu de la part du ministère de la Santé l’assurance d’obtenir un master pour les Ibode. »
Emmanuelle Debelleix
1- Direction générale de l’offre de soins.