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L’ordre infirmier a publié cette semaine les résultats d’une (énième) consultation sur l’état de la profession, mettant comme d’habitude en évidence un moral au plus bas. Seule différence : à quelques mois des élections, les résultats prennent un tour politique.
Sonder le moral et les aspirations des infirmières est devenu une action récurrente pour l’Ordre national des infirmiers (Oni) : on peut rappeler, entre autres consultations, celle qui fut organisée en vue de l’élaboration du livre blanc en 2019, ou encore celle qui fut menée dans le cadre du Ségur au printemps 2020. L’institution ordinale a renouvelé l’exercice cette année, avec la publication ce mercredi d’un nouveau sondage auprès de la profession. Et comme lors des éditions précédentes, les résultats brossent le portrait de soignantes constatant une dégradation de leurs conditions de travail, s’estimant pour beaucoup en burn-out et chez lesquelles l’envie de changer de métier est loin d’être rare.
Les chiffres égrenés par l’Ordre, issus des réponses de 60 000 infirmières à un questionnaire administré mi-décembre, ont donc un goût amer de déjà-vu, quand ils ne ressemblent pas à un enfonçage de portes ouvertes. On apprend par exemple que 85 % des infirmières salariées estiment que « leurs conditions de travail se sont plutôt détériorées depuis le début de la crise sanitaire », ou encore que 42 % d’entre elles indiquent qu’elles « ressentent actuellement un syndrome d’épuisement professionnel de type burn-out ».
Seulement 52 % d’infirmières ne comptent pas changer de métierCôté effectifs également, le tableau est aussi sombre que déjà connu : 70 % estiment être moins nombreuses « par rapport aux effectifs habituels de leur service ou de leur établissement », et 71 % regrettent de « ne pas disposer du temps nécessaire pour prendre en charge leurs patients ». De façon plus inédite, l’Ordre pointe le fait que 15 % des répondantes ont affirmé qu’elles comptent « changer de métier dans les 12 mois à venir ». Et comme un tiers des IDE ne se prononcent pas sur cette question, la consultation aboutit à un constat glaçant : seulement 52 % peuvent assurer « qu’elles ne comptent pas changer de métier dans les 12 mois à venir ».
Reste à savoir ce que l’Ordre entend faire de ces résultats. Sans surprise, l’institution demande l’instauration de ratios minimums en fonction du nombre de patients, ainsi qu’une évolution du cadre réglementaire de la profession pour élargir ses compétences. Mais, année électorale oblige, elle se positionne aussi en demandant la tenue des premiers « États généraux de l’attractivité des professions de santé ».
« Nous allons utiliser les résultats de cette consultation, mais aussi ceux d’un colloque que nous organiserons courant janvier, pour aller voir les candidats avec des propositions claires et précises, explique Patrick Chamboredon, président de l’Oni. L’enjeu est de trouver un moyen pour qu’on arrête d’observer de tels chiffres. » Et le Marseillais d’en appeler à mettre fin à un système où les infirmières « sont sous-employées, sous-valorisées financièrement, et n’ont pas assez d’opportunités ». Reste à savoir si, au-delà des questions directement liées à l’épidémie, la santé réussira à s’imposer comme un véritable thème de campagne.
Adrien Renaud