28/05/2009

Organiser un suivi à long terme après un cancer pédiatrique

Le 18 mai, la fondation Wyeth réunissait à Paris trois pédiatres spécialisés dans l’immunologie et l’oncologie pour alerter sur la nécessité de l’organisation d’un suivi des adultes ayant été traités pour un cancer dans l’enfance. « Aujourd’hui, près de 80 % des enfants atteints de cancer sont guéris, estime Claude Griscelli, ancien professeur de pédiatrie et de génétique médicale à l’Université Paris-Descartes et président de la fondation. Mais il n’y a pas de suivi à long terme des conséquences de la maladie et de son traitement. »

Pourtant une personne sur 850 âgées aujourd’hui de 20 à 45 ans a été traitée pour un cancer dans l’enfance, ce qui représente 40.000 à 50.000 personnes en France, et 60 % risquent de présenter des séquelles.

Celles-ci sont multiples et peuvent intervenir à différents termes. Certaines apparaîtront immédiatement comme les suites d’une amputation ou de l’ablation d’un organe. D’autres se manifesteront beaucoup plus tardivement. « Si la rechute à long terme est exceptionnelle chez l’enfant, note Danièle Sommelet, professeur émérite de pédiatrie et ex-présidente de la société française des cancers et leucémies de l’enfant, ces patients guéris sont plus à risque de présenter un autre type de cancer, mélanome et carcinome notamment. » Par ailleurs, l’exposition à certains traitements peut entraîner des séquelles cardiaques qui apparaîtront à l’âge adulte, voire à l’occasion d’une grossesse.

Perdus de vue

Sans oublier les répercussions sur l’insertion professionnelle ou sociale lorsque ces enfants devenus adultes choisiront une profession où un questionnaire de santé doit être rempli ou qu’ils seront amenés à contracter une assurance-vie. « Vous n’imaginez pas le nombre de démarches que l’on me demande pour aider d’anciens patients à entrer dans une compagnie aérienne ou dans la fonction publique, voire à intégrer une école d’infirmière", insiste Danièle Sommelet.


Pourtant, à l’heure actuelle, en France, aucune organisation n’a été pensée pour superviser ce suivi et des pédiatres-oncologues reçoivent parfois leurs anciens patients jusqu’à l’âge de 25 ou 30 ans, quand ceux-ci ne sont pas tout bonnement perdus de vue. « Certains établissements se préoccupent d’organiser un transfert en service adulte, mais c’est loin d’être une généralité", explique François Doz, oncologue pédiatre et directeur délégué pour l’enseignement et la recherche à l’hôpital de l’Institut Curie. Plusieurs obstacles empêchent de « passer la main ». Les patients sont souvent très attachés à l’équipe pédiatrique d’origine, les médecins d’adultes ne s’estiment pas formés sur les cancers de l’enfant et leurs traitements, mais surtout, la transmission n’est tout simplement pas organisée. « Il y a pourtant de nombreux modèles aux Etats-Unis, au Canada, en Grande-Bretagne, en Australie où le transfert fonctionne bien, souligne Danièle Sommelet. Il nous faut donc trouver le nôtre en adéquation avec notre système et notre culture sanitaire. »

Infirmières coordinatrices?
François Doz propose une consultation pluridisciplinaire, gérée par des infirmières coordinatrices. Danièle Sommelet suggère d’abord que chaque enfant guéri se voie remettre un document écrit résumant le diagnostic, les modalités de traitement, les séquelles possibles attendues, les examens à réaliser, leur rythme et leur durée ; document qui devra être transmis au médecin traitant. Puis que soit organisée une coordination des soins, également autour d’une infirmière, dans les CHU : « Il faut tisser un filet autour de chaque patient, car en fonction du type de cancer, de l’âge du diagnostic et des traitement reçus, les risques ne sont pas les mêmes", résume-t-elle. 

Claude Griscelli propose, lui, la création d’un diplôme universitaire pour des médecins généralistes. « Enfin il ne faut pas oublier que nous travaillons aussi, tout en augmentant les taux de guérison, à diminuer les séquelles des traitements", conclut François Doz.

 

Sandra Mignot

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