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10 000 selon les organisateurs et 4 500 selon la police. Les médecins manifestaient le 14 février contre la proposition de loi (PPL) de la députée Stéphanie Rist (Renaissance), examinée au Sénat.
10 000 médecins étaient dans les rues de Paris le 14 février. C’est le chiffre indiqué par les 11 syndicats médicaux qui ont organisé la manifestation devant le Sénat, où la PPL de Stéphanie Rist était examinée. La Préfecture n’a, quant à elle, comptabilisé que 4 500 manifestants. Mais au-delà des chiffres, l’événement est l’union qualifiée d’historique par les syndicats, réunissant médecins libéraux et hospitaliers, jeunes praticiens et même l’Ordre des médecins qui s’est finalement joint au mouvement.
Les raisons de leur colère ? Les mêmes depuis fin 2022 : la PPL de la députée de Renaissance qui ouvre l’accès direct à certaines professions, le manque de revalorisation financière dans le cadre des négociations conventionnelles avec l’Assurance maladie (celle-ci a proposé une augmentation du tarif de consultation d’1,50 € au grand dam des syndicats qui réclamaient une hausse d’au moins 5 €) et le manque de reconnaissance par le Gouvernement.
Une fureur qu’a essayé de calmer Stéphanie Rist dans un communiqué diffusé le 13 février au soir : elle a ainsi tenu « à apporter son soutien quant à la nécessaire revalorisation du tarif de la consultation des médecins et à la valorisation de leur engagement, y compris financièrement dans le cadre de la permanence des soins, de l’exercice coordonné et des soins de proximité ». Et d’expliquer que sa proposition de loi « maintient le médecin au cœur de la coordination du parcours de soins, tout en faisant davantage confiance aux compétences et à la complémentarité de l’ensemble des professionnels de santé ». Une PPL soutenue notamment par les infirmiers. Le Sniil (Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux) appelle ainsi « à la responsabilité des professionnels de santé, pour dépasser les corporatismes ».
CORPORATISME MÉDICAL SÉCULAIRECar les sénateurs ont largement modifié la PPL en l’adoptant en première lecture. Ainsi, l’accès sans prescription aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthophonistes ne pourra être possible que dans « les seules structures d’exercice coordonné les plus intégrées, partageant une patientèle commune : maisons de santé, centres de santé et équipes de soins primaires et spécialisés ». Quant à l’accès direct aux infirmiers, il reste cantonné aux infirmiers en pratique avancée (IPA) dans des structures d’exercice coordonné. Les sénateurs ont néanmoins étendu leur champ de compétences aux prescriptions de produits de santé et de prestations soumis à prescription médicale obligatoire. Ce qui suscite la grogne de la profession qui souhaitait de nouvelles compétences pour l’ensemble des infirmiers. De fait, 50 organisations d’infirmiers, dont les syndicats, ont signé le 14 février un communiqué commun pour « dénoncer aujourd’hui une opposition systématique médicale à toute évolution des professions de santé non médicales ». Et d’ajouter : « Les arguments avancés par certaines organisations [de médecins, NdlR] sont d’un autre temps et sont à l’opposé des préoccupations et des besoins des usagers de santé ». Les organisations d’infirmiers n’hésitent d’ailleurs pas à parler de « corporatisme médical séculaire et autoritaire ». Alors, après la colère des médecins, celle des 700 000 infirmiers ?
Magali Clausener