Faute d’accès prioritaires aux pompes, les infirmières ont dû jouer la carte de la débrouille ces derniers jours. D'ores et déjà, un bilan post-crise est à prévoir.
Plus d'essence dans les stations-service ? « Circulez, y a rien à voir ! » C’est un peu le discours que le Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (Sniil) a cru entendre ces derniers jours en contactant différentes préfectures. En l’occurrence : « Toutes déclarent attendre le feu vert du gouvernement pour déclencher le plan hydrocarbures permettant la mise en place d’un accès prioritaire aux stations-essences pour certaines professions. »
N’en demeure pas moins que, par endroits, il était bien difficile de se déplacer. Ou du moins de remplir son réservoir… Si bien que, toujours selon le syndicat, dès le 19 octobre, « dans au moins 17 départements de France, l’accès aux soins des patients suivis à domicile » risquait de ne plus être assuré.
Comme l’indiquait bon nombre de sites spécialisés, comme carbu.fr, durant le mouvement social lié à la réforme des retraites, l’offre de carburant s’est considérablement réduite sur l’ensemble du territoire nationale. Si la situation semble sur le point de revenir à la normale, tout n’est pas encore réglé. Et la façon dont la crise a été gérée pose question.
Cafouillage en Ile-de-France
En témoigne Thierry Amouroux, le président du conseil départemental de l’ordre infirmier (CDOI) de Paris : « C’était plutôt une partie de ping-pong entre le préfet et l’ARS [agence régionale de santé]. Le préfet estimait qu’il ne devait s’occuper que des services d’urgence. Quant à l'ARS, elle rappelait qu’elle n’avait pas le pouvoir de réquisitionner des stations. » Ce que confirme l’ARS, tout en précisant qu’elle « reste vigilante quant aux difficultés rencontrées par les professionnels de santé et fait remonter ces informations aux autorités concernées ». En attendant, c’est donc le statu quo (1). Ce qui est loin de satisfaire Thierry Amouroux, qui entend « dresser un bilan » et « parler de tout ceci avec M. Évin », le directeur de l’ARS francilienne.
D’autant que le système de la débrouille ne pouvait pas toujours fonctionner, en raison des impératifs propres au métier d’infirmière. Ne serait-ce que les horaires. « Mon surveillant m’a dit que je n’avais qu’à prendre les transports en commun, peste Céline, infirmière au centre hospitalier intercommunal de Poissy (Yvelines). Mais comment faire ? Je travaille de nuit… »
Petites avancées en Normandie
Entre les queues dans les stations-services qui grignotent le temps passé au chevet du patient et la panne sèche au beau milieu d’une tournée, les situations ont parfois été délicates, comme le raconte Karim Maméri, président de CDOI de Seine-Maritime. Si bien que les élus ordinaux ont déclenché leur propre cellule de crise. A l’aide de leur site Internet, ils ont ainsi tenté d’informer les IDE en temps réel sur la situation aux pompes.
Sur le terrain en revanche, les avancées ont paru plus timides, comme la mise en place de « stations dites prioritaires » (sur la base du volontariat) avec seulement certaines des files destinées aux professionnels de santé. « Il n’y a pas eu de réquisition, se désole Karim Maméri. En revanche, après un petit tapage médiatique, nous avons réussi à avoir une meilleure information de la part de l’ARS. »
Marjolaine Dihl
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1- Notre rédaction a tenté de joindre la préfecture, mais est restée sans réponse pour le moment.