FDS
Le collectif Femmes de Santé, qui rassemble désormais 2 700 membres, a tenu ses états généraux le 6 décembre, après une année de travail dédiée à la place de la femme dans le secteur professionnel de la santé. Discrimination, violences sexistes et sexuelles : le point sur les constats et les solutions déployées.
Comment mieux accompagner collectivement l’engagement des femmes dans le domaine de la santé ? Tel était l’objet des différents ateliers qui se sont tenus le matin même des états généraux du collectif Femmes de santé, et dont les restitutions, ouvertes à la presse, se sont déroulées l’après-midi. Pour rappel, le collectif, qui a fêté ses 5 ans en 2024, se fixe pour mission de contribuer par l’intelligence collective, pluridisciplinaire et par la sororité, à la co-construction d’une santé durable, équitable et égalitaire et de mettre en lumière l’expertise ainsi que les initiatives des Femmes de Santé. Il travaille chaque année sur l’une de ses 3 thématiques phares : la place des femmes dans la santé, la santé de la femme et la santé environnementale.
LES FEMMES TOUJOURS VICTIMES DE DISCRIMINATIONS
Comme rappelé lors des états généraux, le secteur professionnel de la santé humaine se féminise. Si les paramédicaux, notamment les aides-soignants et les infirmiers ont toujours été majoritairement des femmes, les médecins sont désormais concernés par la féminisation de la profession. Aujourd’hui, les femmes représentent 50 à 60 % des effectifs. « D’après les enquêtes et les publications scientifiques, cette réalité contribue à améliorer la santé des femmes, car cela diversifie les équipes de soin, donc participe à une meilleure prise en charge des besoins spécifiques par la réduction des biais sexistes, la promotion de la prévention ou encore l’amélioration de la relation médecin/patiente », a expliqué le Dr Catherine Azoulay, gynécologue endocrinologue, membre du comité éthique et stratégique du collectif Femmes de Santé.
54 % DES MÉDECINS FEMMES ONT ÉTÉ VICTIMES DE VIOLENCES SEXISTES ET SEXUELLES
Les professionnels de santé, notamment les étudiantes en santé, rencontrent de nombreuses difficultés dans leur parcours. « 60 % des femmes réussissent le concours de médecine, mais dans les services hospitaliers, en 2024, ce sont encore majoritairement les hommes qui sont chefs de service ou PU-PH, a dénoncé Maïssa Boukerrou, présidente du Syndicat représentatif parisien des internes de médecine générale. Il n’y a pas de femmes, il n’y a pas de vraie transformation. » De même que certaines idées persistent concernant des spécialités médicales dont certaines seraient « plus féminines » que d’autres, notamment la médecine générale « supposée permettre plus de flexibilité pour notre vie de famille, a-t-elle souligné. Si l’on veut devenir chirurgienne, on nous fait bien comprendre que notre vie privée va en être impactée ! » Les ambiances carabines sont également encore très présentes, notamment dans les blocs opératoires avec « des blagues sexistes placées sous le coup de “blagounettes” pour les minimiser, a poursuivi Maïssa Boukerrou. Face à ces situations, les femmes rencontrent des difficultés pour trouver leur place. » Parfois, la réalité de certaines devient encore plus sombre : d’après une étude du Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) de novembre 2024, 54 % des médecins femmes ont déjà été victimes de violences sexistes et sexuelles. De même que 48 % des femmes médecins en ont été victimes, dans le cadre de leur parcours étudiant : 44 % ont subi des outrages sexistes et sexuels, 16 % du harcèlement sexuel, 8 % des agressions sexuelles et 1 % un viol. L'Ordre national des infirmiers vient de présenter des chiffres similaires. Alors comment agir ?
DES ACTIONS CONCRÈTES
Certaines entreprises agissent sur plusieurs plans pour lutter contre toutes formes de violences et d’inégalités. Au sein du groupe MGEN par exemple, un plan d’actions pour lutter contre le sexisme et le harcèlement sexuel a été mis en place en 2023, ainsi que préalablement, un plan d’actions égalité homme-femme. « Aujourd’hui, nous avons un index salarial d’égalité professionnelle de 98/100, et notre comité de direction affiche un taux de féminisation à 55 % alors qu’il était de 14 % en 2020 », s’est félicitée Sofia Lopes, directrice développement Ressources humaines.
De son côté, l’AP-HP a mis en place en septembre 2021, une cellule permettant de recueillir, orienter et traiter les signalements concernant des actes de violences verbales, physiques ou morales, d’agissements sexuels et sexistes, de harcèlement moral ou de discriminations. Cette cellule, qui peut être saisie par tout professionnel de l’AP-HP qui serait victime ou aurait connaissance de tels agissements, fonctionne en lien avec les facultés de santé d’Île-de-France et complète les dispositifs préexistants dans les 38 hôpitaux de l'AP-HP. « Nous avons également organisé une campagne de prévention, afin de censurer les comportements et faire en sorte que certains arrêtent de banaliser des propos », a fait savoir Piérelle Boursaly, adjointe à la directrice du département santé, qualité de vie et conditions de travail de la DRH/Direction des affaires médicales (DAM) à l’AP-HP. Au 1er octobre 2024, 153 signalements avaient été effectués. Désormais, l’AP-HP travaille sur des actions de formation dédiées sur le sujet.
Laure Martin