Le documentaire "Nos fragilités ordinaires", réalisé par Ilan Flammer, montre que l'argent ne permet pas de dispenser des soins d'une qualité supérieure en psychiatrie.
Dans l’oeil d’Ilan Flammer, réalisateur du documentaire « Nos fragilités ordinaires » (1), deux services de psychiatrie situés dans les Hauts-de-Seine : d’un côté celui du centre d'accueil et de soins hospitaliers de Nanterre, de l’autre celui de la clinique du Château, à Garches. Et deux questions sous-jacentes : existe-t-il une psychiatrie à deux vitesses en France ? La prise en charge des malades dépend-elle du niveau de vie (et de la mutuelle) des patients ?
Dès les premiers plans du documentaire, le spectateur ne peut que constater le contraste des lieux de prise en charge : à Nanterre, les locaux sont tristes et rudimentaires ; à Garches, c’est le luxe: parc immense, chambres magnifiques dignes d’un hôtel 4 étoiles… Alors, la prise en charge des patients psychiatriques est-elle comparable dans le public et dans le privé ?
Divergences
Pour le Dr. Triantafyllou, chef du service psychiatrie à Nanterre, « on voit les mêmes maladies, mais pas les mêmes patients ». À Nanterre, la population, plus jeune, précaire et d’origine immigrée, connaît des conditions de vie plus dures, rendant les soins et le suivi des patients plus difficiles. Pour exemples, une patiente très isolée qui vit à l’hôtel depuis des années, et un ex-taulard déclaré non responsable de ses actes par des experts lors des jugements.
À Garches, une femme classe et classique, en proie à une grande dépression, décrit avec un accent des plus snobs les torrents de larmes qui ont accompagné ses nombreux voyages à l’étranger, car elle souffrait terriblement de ne plus avoir la même image sociale qu’auparavant…
Côté rémunération du personnel, les psychiatres du privé, au statut libéral et payés à l’acte, n’ont rien à envier à ceux du public, salariés.
Et les infirmiers dans tout ça ?
À Garches comme à Nanterre, les infirmiers restent dans l’ombre du médecin, au point que l’on peut compter leurs mots sur les doigts d’une main. Bien qu’oralement reconnus par les médecins, leur rôle incontournable dans la prise en charge des patients en psychiatrie n’est à aucun moment montré. Serait-ce la peur inconsciente d’être sanctionnés qui les rend ainsi muets ?
Finalement, l’hôpital public paraît plus humain que le privé, mais le grand écart entre les services choisis rend peut-être certains moments du documentaire caricaturaux.
Carole Ivaldi
1- Le documentaire a été diffusé sur France 2 le 15 mai dans l'émission Infrarouge. Il est disponible en vidéo à la demande ici et devrait faire l'objet de rediffusions ultérieures.