Parue au Journal Officiel le 6 juillet, la loi relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge est entrée en application le 1er août dernier. Revue synthétique de ce qu’il faut savoir.
Tandis que la loi du 27 juin 1990 n’envisageait les soins psychiatriques sans consentement du patient que sous la forme d’hospitalisations complètes, la loi qui la réforme et modifie au passage le Code de la santé publique (CSP) ajoute à l’hospitalisation la possibilité de prescrire un « programme de soins » sous contrainte. Diverses formes possibles : hospitalisation à temps partiel (de nuit, de jour…), soins à domicile, consultations en ambulatoire ou activités thérapeutiques (1).
Nouvelle terminologie
Le nouveau texte introduit toute une terminologie avec laquelle la communauté médicale et soignante, les patients, leurs proches, mais aussi le monde judiciaire vont devoir se familiariser :
- l’admission en soins psychiatriques à la demande d’un tiers (ADT) ou admission en soins psychiatriques à la demande d’un tiers urgent (ADTU) en cas de péril imminent pour la santé de la personne, remplace les hospitalisations à la demande d’un tiers (HDT).
- l’admission en soins psychiatriques sur décision du représentant de l’Etat (ADRE) ou admission en soins psychiatriques sur décision du représentant de l’Etat (ADRE) urgent remplace les hospitalisations d’office (HO). Elle concerne « des personnes dont les troubles mentaux … compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public » (2).
Hospitalisation sans tiers
La loi du 5 juillet 2011 instaure par ailleurs un nouveau type d’admission : l’admission en soins psychiatriques en cas de péril imminent (API). Autrement dit, en cas de péril imminent pour la santé de la personne, et d’impossibilité d’obtenir la demande d’un tiers, le directeur de l'établissement peut, constatant l’état mental de la personne, prononcer la décision d'admission au vu d’un seul certificat médical. Il doit cependant en informer la famille de la personne ou toute personne agissant dans l'intérêt du patient dans un délai de 24 heures (3).
Dans tous les cas, les personnes admises en soins psychiatriques sous contrainte font l'objet d'une période d'observation et de soins initiale de 72 heures sous la forme d'une hospitalisation complète. Deux certificats médicaux (à 24h et avant 72h) doivent confirmer la nécessité des soins. Un psychiatre peut alors proposer un type de prise en charge et éventuellement un programme de soins avant l’expiration du délai de 72 heures (4). Sur ce point précis, de nombreux psychiatres ont dénoncé la multiplication de ces certificats médicaux qui n’apportent rien à l’évaluation clinique. La nouvelle législation impose aussi un examen somatique dans les 24 heures suivant l’admission.
Intervention du juge
En ce qui concerne le juge, son intervention est requise pour les patients placés en hospitalisation complète. Le Conseil Constitutionnel a en effet estimé qu’une hospitalisation sans consentement représentait une atteinte à la liberté individuelle qui ne peut être ordonnée que par l’autorité judiciaire. En l’occurrence le juge des libertés et de la détention (JLD) contrôle le bien fondé de l’hospitalisation avant l’expiration du 15ème jour à compter de l’admission, puis à l’issue de chaque période de six mois. En cas de décision d’hospitalisation ordonnée par un tribunal, le premier contrôle a lieu dans les six mois. Le défaut de contrôle du juge avant l’expiration des délais conduit à une mainlevée de la mesure d’hospitalisation (5).
Sauf impossibilité pour raisons médicales, plusieurs modalités sont envisagées pour procéder à l’audition du patient : celle-ci peut s’effectuer au tribunal ou bien à l’hôpital dans une salle d’audience ou encore par visioconférence. Elle est publique, mais une audience à huis clos peut-être demandée (6)
De nombreux juges, déjà très sollicités par ailleurs, ont fait savoir qu’ils ne pourraient pas se déplacer. Ces mesures obligent donc les équipes soignantes à prendre en charge le transport des patients au tribunal. En vidant les services d’une part de leur effectif et dans des conditions de responsabilité difficiles à circonscrire.
Contrôle renforcé
La loi établit enfin une procédure de contrôle renforcé. Elle concerne les personnes :
- hospitalisées pour irresponsabilité pénale
- hospitalisées en unité pour malades difficiles (UMD)
- hospitalisées en ADRE
Et toutes celles qui ont connu ce type d’antécédents au cours des dix années précédentes.
Ce contrôle renforcé passe par la convocation d’un collège de trois soignants lorsque le psychiatre en charge du patient envisage une fin de l’hospitalisation complète (7).
Thierry Pennable
1 - Voir l'article 1 de la loi du 5 juillet 2011 et l'article L3211-2-1 du CSP.
2 - Art. 2 et 3 Loi ; art. L3212-1 et L3213-1 CSP.
3 - Art. 2 Loi ; art. L3212-1 CSP.
4 - Art.1 Loi; art. L3211-2-2 CSP.
5 - Art. 1 Loi ; art. L3211-12-1 CSP.
6 - Art.1 Loi ; art. L3211-12-2 CSP.
7 - Art.1 Loi ; art. L3211-9 CSP.