Les infirmières en hygiène hospitalière ont axé leur dernier congrès sur l'importance des démarches collectives pour gérer le risque infectieux. Dans l'espace francophone, les idées ne manquent pas.
« Arriver à trouver une solution à un problème de légionelle entre un directeur financier qui n’a pas le budget et le directeur technique qui n’a pas le personnel nécessaire… c’est difficile ! », s’exclame Pascal Spinazze, infirmier et coordinateur en hygiène hospitalière au Centre hospitalier chrétien de Liège, en Belgique. Le ton est humoristique, mais il situe bien la problématique sur laquelle quelque 300 personnes ont planché lors des 12es Rencontres francophones des infirmier(e)s en hygiène hospitalière (1). « Nous avons voulu parler de l’intérêt d’une démarche pluriprofessionnelle », explique Marie-France Ertzscheid, vice-présidente de la Siihhf (2). Complexe, cette démarche passe par une capacité à « fédérer les énergies », assure cette dernière.
Architectes, chauffagistes…
Confrontée à des « valeurs importantes » de la bactérie légionella durant l’été 2004, l’équipe d’hygiénistes de l'hôpital liégeois a mis en place un « comité légionelle » mettant à contribution plusieurs services. Son but ? Comprendre le mode de fonctionnement de cette bactérie, percer à jour les causes, définir les actions à effectuer (comme le choc thermique) et surtout mesurer les conséquences de chaque décision.
« Cette expérience, qui a duré cinq années, nous montre que le débat concerne l’ensemble des intervenants : architectes, financiers, chauffagistes, prestataires externes, hygiénistes… estime Pascal Spinazze. Le défi de la légionelle résidait dans notre capacité à trouver ensemble la solution après avoir apporté nos avis, nos expériences, nos craintes ! »
Conclusion similaire pour l’expérience vécue par Jacqueline Louis, infirmière chef de service en hygiène hospitalière à l’institut Jules-Bordet de Bruxelles. « Nous avons vécu un chantier de rénovation d’un service pendant six semaines, raconte-t-elle. Je me suis fait expliquer les différentes phases techniques par l’architecte, puis je suis allée voir les entreprises. J’ai suivi l'ensemble du processus, en étant sur le terrain, en participant aux réunions de chantier et à la réception des travaux. »
Pilotage pluridisciplinaire
Pour Jacqueline Louis, l’hygiène hospitalière apporte une expertise en matière de prévention du risque aspergillaire et de maîtrise de la légionellose, qui concernent tout chantier et dont l’impact est particulièrement élevé et critique en milieu hospitalier. « Faire comprendre aux entreprises les dangers spécifiques liés à cet environnement est un rôle important pour l’équipe d’hygiène, ajoute cette infirmière. C’est le respect mutuel et la collaboration de chacun qui permettent de mener à bien un tel projet. »
Plusieurs témoignages ont démontré que la gestion du risque infectieux relève bien d’une responsabilité collective et institutionnelle. Ce sont par exemple les « agents multiplicateurs » imaginés au Québec pour diffuser l'information dans les services, ou encore la mise en place d’un véritable « programme sécurité » à l’hôpital de Morges en Suisse. « Chaque membre du groupe de pilotage pluridisciplinaire, que ce soit le responsable technique, le responsable informatique ou des ressources humaines, est interpellé pour qu’il intègre la gestion du risque infectieux dans son action », explique Roosevelt Abilorme, infirmière hygiéniste dont le poste est rattaché à la direction générale. Volonté de transversalité oblige.
Olivier Quarante
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1- Ces rencontres ont eu lieu les 30 septembre et 1er octobre à Nantes.
2- La Société des infirmiers et infirmières en hygiène hospitalière de France, qui s'est unie récemment à la Société française d'hygiène hospitalière (SFHH), pour former la SF2H.