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Après une forte mobilisation en juin dernier, les infirmières scolaires ont repris le chemin de l’école. Une rentrée qui s’avère toutefois perturbée par une surcharge de travail liée à la gestion de la crise sanitaire et la défiance envers l’obligation vaccinale.
Des classes qui affichent complet, des élèves démasqués à l’extérieur, une équipe encadrante animée par la perspective d’un retour à la vie quasi-normale dans l’établissement… Pour un peu, cette rentrée 2021 pourrait donner l’impression d’un retour à la presque normalité, sauf que la réalité est tout autre. « Certes, ça fait du bien de voir le visage complet des élèves dans la cour, mais il ne faut pas se fier aux apparences : ces derniers sont très stressés par la situation actuelle et s’inquiètent de savoir comment l’année va se dérouler. Pour ceux qui ont des besoins particuliers, il y a eu beaucoup de défaut de suivi, voire d’arrêts de soins. Trois jours après la rentrée, ma consultation croule déjà sous les rendez-vous ! », s’inquiète cette infirmière scolaire d’un collège situé en Seine-Maritime. Aux missions qui incombent généralement à ces soignantes, telles que la gestion des PAI (projet d’accueil individualisé), la mise à jour des trousses d’urgence ou l’orientation des élèves vers les bons professionnels de santé, il faut en effet composer avec une charge de travail supplémentaire du fait de la gestion de la crise sanitaire. « Pendant l’été, il y a eu du relâchement du côté des gestes barrières, et c’est à nous que revient la charge de faire appliquer le protocole. Nous recevons aussi beaucoup d’appels de familles, qui se posent des questions sur la Covid et la vaccination. C’est un gros travail de pédagogie qui prend du temps, et ce temps n’est pas rémunéré », fulmine Saphia Guereschi, secrétaire générale du Snics-FSU, l’un des syndicats des infirmières de l’Éducation nationale.
Suspension de salaireUn manque de reconnaissance financière qui, s’il est dénoncé de longue date, a conduit plus de 1 000 infirmières scolaires à descendre dans la rue au mois de juin dernier. « La Covid nous occupe beaucoup depuis 18 mois. Et chaque fois qu’il faut s’adapter aux mesures dictées par l’Éducation nationale, on s’adapte. Depuis la rentrée, les infirmières scolaires sont de nouveau sur le pont, mais tout se passe comme s’il n’y avait pas eu de crise », enrage la représentante syndicale qui constate un mal-être croissant de ces professionnelles. Pour preuve, cette enquête réalisée par le SNICS-FSU en mai dernier dans laquelle deux infirmières de l’Éducation nationale sur trois déclarent être en souffrance au travail. « Je vois de plus en plus de collègues qui souhaitent se mettre en disponibilité ou changer de spécialité, confirme Gwenaëlle Durand, IDE au sein du lycée Carriat à Bourg-en-Bresse (Ain) et secrétaire générale du Snies-Unsa Éducation. Comment leur jeter la pierre ? Même dans les centres de vaccination, les infirmières sont mieux payées que les fonctionnaires de l’Éducation nationale… »
Au-delà de la rémunération, reste un autre problème de taille : la vaccination des personnels de santé, obligatoire depuis la promulgation de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire. « Au 15 septembre, toutes les infirmières scolaires devront avoir reçu au moins une dose et devront présenter un test négatif toutes les 72 heures. Puis, faute de pass sanitaire au 15 octobre prochain, les non-vaccinées seront sanctionnées. Que vont-elles faire ? Où vont-elles être reclassées ? Au lieu de faire planer le doute sur d’éventuelles sanctions pour ceux qui n’auraient pas le pass sanitaire, le Ministère ferait mieux de chercher des solutions », scande l’IDE burgienne.
IncertitudesDes solutions, Saphia Guereschi en a, à commencer par celle de confier aux personnels soignants non-vaccinés d’autres tâches qui ne nécessitent pas de l’être. Autre requête : renforcer les moyens humains pour remplacer les postes non pourvus, en créer d’autres et mener une « véritable politique d’éducation à la santé ». « Actuellement, nous ne sommes que 7 700 en France alors que nous devrions être 23 000 pour que tous les établissements scolaires puissent bénéficier d’une consultation infirmière, regrette la secrétaire générale du Snics-FSU. Nous souhaiterions également la mise en place de dépistages et de vaccination aux abords immédiats des établissements, ainsi que la mise en place d’une politique de dépistage ciblée et réactive par des équipes mobiles à chaque cas de Covid dans la classe. » Autant de points qui seront débattus, espère-t-elle, lors de la réunion avec la DGRH ce mercredi 8 septembre.
Éléonore de Vaumas