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La Première ministre a annoncé la semaine dernière que la valorisation du travail de nuit des infirmières serait prochainement portée à 25 % par rapport au travail de jour. Une bonne nouvelle jugée à la fois insuffisante et floue par les syndicats.
Le gouvernement aurait-il (enfin) pris la mesure des attentes infirmières, notamment en termes de rémunération ? C’est ce qu’on pourrait croire à entendre les déclarations de la Première ministre Élisabeth Borne lors de son déplacement à Rouen la semaine dernière. « Ce sont des métiers difficiles pour lesquels il y a beaucoup de contraintes : le travail de nuit, le dimanche, les jours fériés…, a-t-elle estimé à cette occasion, citée par nos confrères d’APMNews. Il faut reconnaître, comme le président de la République s'y était engagé, ces contraintes particulières sur ces différents métiers. » Dans la foulée, la locataire de Matignon avait annoncé une revalorisation du travail de nuit pour les infirmières, qui sera désormais payé 25 % de plus que le travail de jour, ainsi qu’une augmentation de l’ordre de 20 % du travail les week-ends et les jours fériés.
« Merci de revaloriser un peu ces contraintes, mais ces primes arrivent sur des salaires de misère, a réagi Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI-CFE-CGC) sur le réseau social LinkedIn. Ce n’est pas avec cela que vous comblerez les 60 000 postes infirmiers vacants ! » Un constat que partage en substance Loïc Le Noc, secrétaire national de la CFDT Santé-sociaux. « C’est mieux que ce qui existe actuellement, mais il faut rappeler que dans certains autres secteurs, les heures de nuit sont revalorisées de 50, voire de 100 % par rapport aux heures de jour », estime celui-ci. La CFDT a calculé que l’annonce sur le travail de nuit correspondait à « entre 3 et 9 euros par heure en plus selon l’endroit où vous vous situez dans la grille », détaille-t-il.
Le discours et la méthodeSurtout, c’est la méthode que regrette le leader cédétiste. « Il n’y a eu aucune concertation, aucune négociation, un groupe de travail s’était réuni une fois sur le sujet il y a un an et demi et nous n’avions pas eu de nouvelles depuis, se souvient-il. Et puis jeudi, le cabinet nous appelle pour nous dire que des annonces seraient faites dans la soirée. » Par ailleurs, un certain flou semble encore entourer les annonces en question. « Nous avons fini par avoir confirmation que la revalorisation concernait tous les agents de la fonction publique hospitalière, et non les seuls aides-soignants et infirmiers, mais cela laisse en suspens la question des collègues du secteur privé associatif ou à but lucratif », souligne Loïc Le Noc.
Celui-ci relève également qu’on n’en est qu’au stade des annonces, et qu’il faut attendre les textes. Notons à ce sujet qu’Élisabeth Borne a annoncé que les revalorisations seraient inscrites dans le Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) : étant donné les soubresauts que connaît le gouvernement devant les députés et les sénateurs depuis un peu plus d’un an, on peut s’attendre à ce que ce texte soit passablement chahuté.
Par ailleurs, Loïc Le Noc regrette que le travail de nuit n’ait été abordé par la Première ministre que sous l’angle de la rémunération. « On sait que le travail de nuit est nuisible pour la santé, de nombreuses études l’ont montré, rappelle-t-il. Nous avions demandé l’instauration d’un repos compensateur, mais cela n’est pas du tout évoqué dans les annonces. » Un manque qui peut selon lui être préjudiciable au système de santé tout entier. « Il n’y a pas de prise en compte des conditions de travail, or on sait que c’est l’une des causes de la fuite des salariés », pointe-t-il. Élisabeth Borne en semble en être bien consciente. « Cela n’épuise pas les sujets de l’attractivité de l’hôpital », a-t-elle déclaré, toujours citée par APMNews, lors de son déplacement à Rouen. Il ne reste plus qu’à espérer que le prochain PLFSS, aborde cette thématique de manière plus énergique.