SALON : En prison, l’Ucsa veut « faire passer un message » aux détenus
Les détenus, population à haut risque sanitaire ? Les études épidémiologiques ne comportent aucune ambiguité. « 80% des entrants sont globalement en bonne santé, remarque Bernard Chauffray, infirmier à l’Ucsa de Saint-Quentin, en Isère. Mais 80% sont fumeurs, 50% ont besoin de soins dentaires, de façon urgente pour certains (2,7%) ». Les initiatives prises dans les Ucsa permettent d’améliorer le soin des détenus, qui présentent des risques considérables. Par exemple, l’Ucsa de Saint-Quentin a mis en place des cours de gymnastique pour les personnes à mobilité réduite. « Il y a beaucoup de personnes âgées incarcérées, souvent pour des délits de mœurs. Leurs victimes, plus jeunes qu’elles, mettent du temps à ressortir leur histoire. Des gens sont donc incarcérés à 80 ans ». C’est pour cette raison que les personnes âgées sont souvent mises à l’index par les autres détenus. « En prison, il vaut mieux avoir tué un flic ou braqué une banque que d’avoir commis un délit de mœurs, constate Bernard Chauffray. Comme les personnes âgées évitent la promenade, la gymnastique leur permet de faire de l’exercice en étant protégés. » Les infirmiers tentent d’éduquer les détenus à l’hygiène, notamment lors de la douche. « Pour ne pas être agressés sexuellement sous les douches, les détenus se lavent en caleçon et ils gardent souvent des claquettes. Ils ne s’essuient pas bien après, et les mycoses se multiplient. Il faut leur expliquer, leur faire passer un message sur l’hygiène. » La pratique du sport pose aussi problème : « les détenus ont besoin de se défouler, ils ne prennent pas le temps de s’étirer. En 1998, après la Coupe du monde, on a fait venir le médecin de l’équipe de France, il a été très bien accueilli. » Quant aux consultations ouvertes pour parler du sida et des hépatites, convaincre les détenus d’y assister est difficile : « Ils n’osent pas venir, ils ont peur que les autres détenus en concluent qu’ils sont concernés » Lors des consultations individuelles, des préservatifs sont à disposition, juste à côté de la balance : « On les a mis là parce que les détenus se pèsent beaucoup. » Le travail en prison a considérablement changé depuis 1992 et la création des Ucsa, unités de soignants qui dépendent d’un hôpital et qui travaillent dans les centres de détention. « Avant, il fallait passer le concours de l’administration pénitentiaire, se rappelle Bernard Chauffray. Les médicaments étaient distribués par les surveillants. Ils ont très mal pris le fait de perdre ce pouvoir. Mais aujourd’hui, ça se passe mieux avec les jeunes surveillants, qui n’ont pas connu l’ancienne époque. »
A.L.G.
Mardi 16 octobre 2007, La prévention en milieu pénitentiaire, Sigolène Boyer-Tyrol et Bernard Chauffray.
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