A un an de l’élection présidentielle, le ministre de la Santé Xavier Bertrand écarte les sujets polémiques et joue la carte du dialogue avec les professionnels de santé; avec certains plus qu'avec d'autres.
Interrogé en marge d’une rencontre avec les membres de l’Association des journalistes de l’information sociale (Ajis) lundi 2 mai, le ministre de la Santé Xavier Bertrand s’est dit « déçu » par l’Ordre national des infirmiers (Oni) et par la polémique qui s’éternise autour du niveau de cotisation des infirmières. « La balle est aujourd’hui dans le camp de l’Oni », a-t-il lâché, ne souhaitant pas s’exprimer plus avant sur ce dossier. Une réserve que le « ministre des patients », comme il se qualifie lui-même, a semble-t-il choisi d’adopter sur bien des sujets. A un an de l’élection présidentielle, rien d’étonnant.
S’il continue d’affirmer que les restructurations hospitalières sont nécessaires, le ministre prétend qu’elles ne sont pas « guidées par des considérations purement économiques » : elles doivent répondre à un projet médical. Ainsi a-t-il cité le cas des établissements de Poissy-Saint-Germain-en-Laye (78), d’Henri Mondor (94) ou encore d’Albertville (73). « Si vous jouez la carte des économies en premier, vous n’êtes pas sûr d’avoir de la qualité derrière », a-t-il déclaré, soulignant toutefois que, compte tenu de la situation financière du système de santé, « on ne peut pas se permettre d’avoir des doublons ». Et d’enfoncer le clou : « De l’argent dans le système de santé, il y en a. Mais il faut savoir le gérer. »
Démographie : incitation ou incantation ?
Des annonces relatives au plan Hôpital 2012 seront faites en septembre ou en octobre, a-t-il rappelé. Le ministre s’engage à rencontrer de nouveau à l’automne prochain, comme il l’a fait le 12 avril dernier à l’Ecole militaire à Paris, l’ensemble des directeurs d’établissements hospitaliers, des présidents de CME et des directeurs de soins. Et les soignants ? Il n’en a pas parlé. Le 12 avril, la CGT avait organisé une petite manifestation devant l'Ecole militaire afin de protester contre l'exclusion des syndicats de personnels non médicaux (à l'exception des syndicats de directeurs). Les personnels ont aussi leur "mot à dire" dans le débat sur l'avenir de l'hôpital public, avait estimé le syndicat dans un communiqué, déplorant les choix politiques qui assimilent "l'hôpital à une entreprise rentable et compétitive » et relèguent « les soignants et plus largement les personnels à une simple variable d'ajustement dans une logique comptable et financière".
S’agissant des professionnels de santé de ville, Xavier Bertrand attend de voir comment vont se passer les négociations conventionnelles des uns et des autres et prévoit de rencontrer le Centre national des professions libérales de santé, également à l’automne. La démographie reste l’une de ses priorités et le ministre n’envisage l’issue de ce dossier qu’avec un seul mot d’ordre : « Incitation, incitation, incitation », a-t-il martelé.
Echec
Hélas, les incitations financières (majoration de 20 % des honoraires) mises en places par l’assurance maladie en 2007 pour inciter les médecins à s’installer dans les zones de « désert médical » couvrant 4000 communes classées en « zone déficitaire » sont un échec patent : seuls 50 médecins ont joué le jeu. Côté infirmières, rappelons que l’avenant 1 à la convention des libérales (1), qui a pour objet de réguler de manière expérimentale et limitée dans le temps la démographie infirmière, prend fin ce printemps. Il doit être évalué et, le cas échéant, adapté.
Concédant que la démographie est une problématique partagée par l’ensemble des professions de santé, Xavier Bertrand n’exclut pas de suggérer à l'Union nationale des professionnels de santé de traiter ce dossier dans le cadre de l’accord-cadre interprofessionnel, actuellement en discussion avec l’assurance maladie. Enfin, il attend qu’un zonage « plus cohérent et plus pragmatique » soit défini.
Texte: Sandra Serrepuy et Cécile Almendros
Photo: Sandra Serrepuy
1 - Effectif depuis un arrêté du 17 octobre 2008.
Assises du médicament
Le fonds d’indemnisation des victimes du Mediator devrait être voté avant les vacances parlementaires de l’été, a indiqué Xavier Bertrand. Des mesures législatives et réglementaires seront par ailleurs décidées pour réformer la politique du médicament. Dans ce cadre, le ministre de la Santé ne souhaite pas que soient interdites les prescriptions de médicament hors-AMM (1). Il considère que les médecins doivent rester libres de prescrire des médicaments, quels qu’ils soient, quand ils les estiment susceptibles de soulager leurs patients. « On est alors dans une forme d’essai clinique », a-t-il estimé. S. S.
1 – Autorisation de mise sur le marché.