Le rapport annuel de la Cour des comptes sur la situation financière de la Sécurité sociale donne le ton de ce que seront les débats dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2012 : le moment est grave, le déficit abyssal.
« La dépendance à la dette est devenue le poison de la Sécurité sociale. La dette sociale est une drogue. » Didier Migaud, le premier président de la Cour des comptes, n’a pas mâché ses mots, jeudi 8 septembre, en présentant le rapport annuel des magistrats de la rue Cambon sur la Sécurité sociale. Introduction traditionnelle aux discussions préparatoires du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, ce rapport de la Cour des comptes se veut chaque année un peu plus alarmiste quant à l’avenir de notre système de protection sociale. Ainsi apprend-on que « jamais le déficit de la Sécurité sociale n’a atteint un niveau aussi élevé qu’en 2010 ». Et pour cause : les déficits des régimes obligatoires de base de Sécurité sociale et du Fonds solidarité vieillesse se sont établis en 2010 à -29,8 milliards d’euros, soit 1,5% du PIB.
La Cour des comptes pointe le niveau excessif de la dette sociale, qui atteint 136,2 milliards d’euros, un montant que se partagent la Caisse d’amortissement de la dette sociale (Cades), pour 86,7 milliards d’euros, et l’Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (Acoss), pour 49,5 milliards d’euros.
Hôpital : des marges de progrès « considérables »
Dans ce contexte, le respect de l’Objectif national des dépenses de l’assurance maladie (Ondam) en 2010 représente la bonne nouvelle de l’année, même si la Cour l’associe à certaines conditions « favorables », telles que « l’absence de revalorisation significative d’honoraires de professions de santé ». Les magistrats de la Cour des Comptes appellent à la poursuite des efforts en matière de maîtrise des dépenses de santé. Ainsi, affirme Didier Migaud, « la recomposition de l’offre de soins doit porter principalement sur l’hôpital, qui représente plus de 72 milliards d’euros de dépenses d’assurance maladie ». Surtout, « les marges de progrès sont considérables », assure-t-il. En matière de tarification à l’activité par exemple, les contrôleurs de la rue Cambon relèvent une « distorsion du lien entre tarifs et coûts et l’importance des dotations forfaitaires d’intérêt général ». Au final, jugent-ils, les établissements ne sont pas encouragés à gagner en compétitivité.
Les CHU, qualifiés de « vaisseaux amiraux de l’hospitalisation publique » sont montrés du doigt. Didier Migaud cite ainsi l’exemple des Hôpitaux civils de Lyon, second CHU de France, qui tirent l’essentiel de leurs ressources de l’activité d’accouchement, alors que leur performance en matière de recherche « est particulièrement inégale ». « Au nom de leur spécificité, ils ont été pourtant très fortement bénéficiaires des dotations forfaitaires d’intérêt général et des aides contractuelles accordées par les pouvoirs publics », note Didier Migaud. Dans ce contexte, la Cour appelle à redéfinir le dispositif des aides contractuelles et à « mettre fin à des financements accordés dans le seul objectif de minorer le montant des déficits ».
Enfin, les coopérations hospitalières, encouragées par la loi HPST, se développent de façon hétérogène sur le territoire. Les agences régionales de santé doivent jouer un rôle moteur sur ce sujet, en faisant la promotion des outils disponibles. Le rapport pointe par exemple la région Rhône-Alpes, qui ne dispose aujourd’hui que de deux communautés hospitalières de territoire (CHT).
Sandra Serrepuy