L’accompagnement du vieillissement est une priorité de l’Etat, ne cesse-t-on de nous répéter. Mais lorsqu’il s’agit de trouver des financements, les professionnels du secteur sont renvoyés dans leurs buts.
« L’Etat a créé une sorte d’usine à gaz dont le seul objectif est de faire croire au grand public qu’il fait quelque chose alors que c’est faux ! ». Lorsqu’il s’agit de décrire l’état d’esprit des principaux acteurs de l’accompagnement des personnes âgées en ces temps de rigueur budgétaire, Joëlle Legall ne mâche pas ses mots. Présidente la FNAPAEF (Fédération nationale des associations de personnes âgées et de leurs familles), elle fait partie des nombreux intervenants du secteur venus assister aux 8e Assises des personnes âgées, jeudi 25 et vendredi 26 novembre derniers à Marseille. Même inquiétude chez Jean-Louis Bascoul, président de l’Uriopss (Union régionale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux) Languedoc-Rousillon. Présentant les résultats d’une enquête menée par son organisme dans de nombreux établissements, l’orateur tire la sonnette d’alarme : « Il existe bien une augmentation du taux d’accompagnement des malades mais cela contient à peine l’accroissement du nombre de personnes concernées ».
Les coûts avant l’humain
« Objectiver les prestations et objectiver les coûts » martèlera plus tard Sabine Fourcade, directrice générale de la Cohésion sociale (DGCS) dans un discours remarquable de langue de bois. Répétant sans cesse la nécessité d’équilibrer les enveloppes et de multiplier les expérimentations, la seule représentante de l’Etat n’a pas remporté tous les suffrages, loin de là. Car ce que déplorent les professionnels du secteur, c’est justement cette obsession des chiffres au détriment de l’humain. « Que dire qui soit entendu ou compris aujourd’hui plus qu’hier, face à une logique qui nous semble si éloignée de celle que l’on porte ? » se désespère Isabelle Meunier, la directrice de l’Uriopss Languedoc-Roussillon, qui insiste : « Les financements que les pouvoirs publics affectent aux structures de notre secteur reflètent la place que la société accorde aux publics les plus fragiles. » Des financements qui se réduisent sans cesse, entraînant « une augmentation de la part payée par la personne âgée et sa famille ». Alors que le montant moyen de la retraite est de 850 euros par mois pour les femmes et de 1450 pour les hommes, le prix d’hébergement en Ehpad reste en effet supérieur à 2000 euros. Sans assurance privée, il n’y a donc pas moyen de s’en sortir sans ruiner le reste de sa famille.
Des solutions à trouver
De l’argent, pourtant, il semblerait bien qu’il y ait des moyens d’en trouver. C’est, du moins, l’avis de Francis Idrac, président de la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie). Parmi les solutions qu’il propose : l’augmentation de la contribution générale des retraites, ou, par exemple, la création d’une autre journée de solidarité. Pour lui aussi, le financement de l’accompagnement à la perte d’autonomie est d’abord une question de priorités d’Etat. Mais pas question, comme certains sénateurs l’avaient envisagé il y a quelques années, de proposer une APA (Allocation personnalisée à l’autonomie) reprise sur succession, ce qui reviendrait à appauvrir encore les familles déjà trop mises à contribution. Cette allocation, même dans les cas les plus extrêmes, ne couvre aujourd’hui que 92 heures d’accompagnement par mois. Soit 3 heures par jour…
A son tour, et pour alléger l’atmosphère, Joelle Legall lance une idée : « Nous suggérons de faire des plantations de cannabis dans tous les établissements. Tous ceux qui voulaient rester à leur domicile arriveront en courant. Cela coûtera ainsi moins cher au gouvernement qui n’aura plus que des petites graines à mettre dans les enveloppes financières. » L’histoire ne dit pas si cette saillie fera rire Roselyne Bachelot qui avait fait parvenir à l’assemblée une vidéo sur laquelle, elle le dit et le répète en substance : tout va bien.
Laure de Montalembert
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