La 11e journée régionale du Collège des acteurs de soins infirmiers Midi-Pyrénées a mis en lumière le besoin des professionnels de santé en matière d'éthique et de pluridisciplinarité.
Alors que le grand public est invité à s'exprimer sur la fin de vie dans le cadre de la mission Sicard (1), les acteurs du Collège en soins infirmiers Midi-Pyrénées, avec la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap) ont fait salle comble, le 9 novembre, à Toulouse : 300 professionnels sont venus écouter médecins, infirmières, psychologue et philosophe s'exprimer sur les questions éthiques au quotidien.
La fin de vie suscite inévitablement nombre de questions pour lesquelles Pierre Ancet, maître de conférences en philosophie et chercheur au CNRS en Bourgogne, a défini quelques notions indispensables en matière d'éthique : la « dignité », la différence entre « vie humaine » et « vie organique » ou encore entre « fin de vie » et « fin d'autonomie ». Il a également rappelé combien le rapport au corps ou au temps change selon que l'on est en bonne santé, en soins palliatifs, médecin ou infirmière. Une intervention bien accueillie par des professionnels en demande, car confrontés à des situations chaque fois plus complexes dans une société qui a tendance à éviter le sujet.
Les IDE, des sentinelles
Selon le Dr Anne Richard, présidente sortante de la Sfap, « il n'y a pas de réponse simple à une situation complexe, juste la moins mauvaise solution ». « Au profit du patient, le contexte des soins palliatifs a favorisé la mise en œuvre d'une démarche pluridisciplinaire, la création de réseaux - tiers indispensable au domicile, bien que mis en péril par les budgets actuels - et une approche de la personne dans sa globalité, a-t-elle rappelé. Les soins palliatifs apportent des repères permettant un abord humain et professionnel des situations. Sachons garder cette posture de pionnier en développant la réflexion éthique sur nos pratiques pour contrebalancer les progrès techniques. »
Noëlle Carlin, cadre de santé en équipe mobile de soins palliatifs et co-responsable de l'Espace éthique du CHU de Grenoble, a positionné les compétences en éthique comme avant tout transversales, basées sur des valeurs professionnelles et personnelles, et acquises par l'expérience et le dialogue. « Les IDE sont au cœur des situations et des dysfonctionnements éventuels, à même de percevoir les manques ; ce sont en quelque sorte des sentinelles de l'éthique. Leur apport à une compétence en éthique est donc essentiel, sinon spécifique », a exposé Noëlle Carlin, encourageant les soignants à prendre la parole. Une parole salutaire et légitime pour tous les acteurs de la prise en charge des patients, indépendamment de la hiérarchie.
Porter la parole du patient
Au quotidien, le garde-fou de la loi du 22 avril 2005 dite Leonetti rappelle le statut du patient décisionnaire. Elle vient soutenir la pratique infirmière, selon Maryse Mailly, infirmière au sein de l'unité de soins palliatifs (USP) du CHU de Montpellier. Elle s'est fait l'écho des travaux du Collège des acteurs en soins infirmiers du Languedoc-Roussillon : « La loi légitime un positionnement éthique en accord avec la démarche infirmière : en cas de refus de soin, de demande de sédation ou d'euthanasie, la relation d'aide prend tout son sens. Elle nous incite à nous placer dans la finalité du soin, à respecter le sens de l'existence humaine, à participer à une réflexion interdisciplinaire... A nous, infirmières, il revient particulièrement de porter la parole du patient, en médiateur, et de développer une attitude d'écoute sans jugement. » L'application de la loi suscite toutefois quelques frustrations : « Quand recueillir les directives anticipées ? Souvent trop tard... », a reconnu le Dr Bernard Pradines, médecin gériatre à Albi.
La journée aura nourri la réflexion des participants et confirmé la nécessité de placer l'éthique entre toutes les mains. Pourquoi pas au niveau de la formation initiale ? C'est ce que tente d'instaurer le Pr Thierry Marmet, chef de service en USP à l'hôpital Joseph-Ducuing de Toulouse, sous forme d'ateliers de réflexion avec les étudiants de médecine en stage. Une initiative qu'il rêve de voir se généraliser, qui plus est, à une échelle pluridisciplinaire.
Sophie Magadoux
(1) Le rapport doit être rendu le 22 décembre.