Suppression de l'Afdef: nombreuses reconversions infirmières en sursis

24/02/2011

Suppression de l'Afdef: nombreuses reconversions infirmières en sursis

La non-reconduction de l’Allocation en faveur des demandeurs d’emploi en formation provoque un tollé chez les chômeurs qui souhaitaient devenir infirmiers. Une pétition, une page Facebook et de nombreuses voix réclament le maintien de cette aide financière.

Pour Khadija, cela s’est joué à quatre jours. À quatre jours près, cette jeune femme de 36 ans aurait pu entreprendre des études d’infirmière en toute sérénité. Car elle savait qu’elle toucherait des indemnités tout au long de ses trois années d’études : à ses droits au chômage qui courent jusqu’en janvier 2012, devait succéder l’Allocation en faveur des demandeurs d’emploi en formation (Afdef).

Jusqu’au 31 décembre 2010, date à laquelle les parlementaires ont choisi de ne pas la reconduire (1), cette aide financière permettait d’encourager les demandeurs d’emploi à se former à des métiers dits en tension (infirmières, aide-soignantes...) dont la liste était établie par les préfets de région. Mais Khadija a eu le malheur de faire tamponner son dossier le 4 janvier. Trop tard. Elle a malgré tout effectué sa rentrée le 7 février dernier.

« Si l’Afdef n’est pas reconduite, je ne ferai que la première année car je toucherai mes indemnités chômage. Après, je serai obligée d’arrêter car je ne pourrai pas payer les frais d’une nounou », raconte cette mère d’un jeune enfant, qui ne décolère pas. « Ce projet de reconversion professionnelle, je l’ai mûrement réfléchi. J’ai beaucoup travaillé pour décrocher le concours... »

Fronde sur Facebook

Des histoires comme celle-là, on en retrouve des centaines sur Internet. En particulier sur la page Facebook « Etudiants infirmiers pôleurs » (2), créée par Élodie Da Silva, qui vient d’entrer en première année dans un Ifsi du Bas-Rhin. « Je ne comprends pas que le gouvernement puisse supprimer cette aide alors qu’elle donnait l’opportunité à des personnes sans emploi d’entrer dans des formations où le besoin en main d’œuvre est très fort et va même augmenter avec les papy-boomers », s’alarme l’étudiante de 20 ans.

Fin février, la page Facebook comptait près de 800 membres, et la pétition en ligne 3.200 signatures. La Fédération nationale des étudiants en soins infirmiers (Fnesi) et certains élus ont apporté leur soutien. « Il faut rester mobilisés pour que l’Afdef soit reconduite. En 2009, le gouvernement avait déjà essayé de la supprimer, mais ils avaient fini par céder devant le tollé que cela avait provoqué », s’enflamme Elodie, qui ne veut pas perdre espoir.

De fait, tout n’est pas perdu puisque dans le cadre de la bataille gouvernementale contre le chômage, le ministre de l’Emploi, du Travail et de la Santé Xavier Bertrand vient de laisser entendre (3) que l’allocation de formation pour les demandeurs d’emploi serait reconduite « dans les semaines qui viennent ». « Nous allons remettre en route cette allocation. J'en parle en ce moment avec l'ensemble des partenaires sociaux et il y aura même un effet rétroactif depuis le début de l'année », a déclaré le ministre.

Des actes pour dissiper les doutes

De quoi rassurer les nombreux aspirants au métier d’infirmière en passe de renoncer à leur projet professionnel ? Peut-être. Pas sûr. Les personnes concernées attendent des actes. A l’image de Nadine, 35 ans, qui continue à préparer le concours, malgré ses doutes : « Avec tous ces débats, je suis complètement perdue. Je n’arrive pas à me concentrer. Même si je réussis le concours, je ne pourrai pas entrer en Ifsi si l’Afdef est définitivement supprimée », s’inquiète-t-elle.

Le sujet devrait être abordé lors des négociations sur la nouvelle convention de l’assurance-chômage qui prend fin au 31 mars prochain. Initiée en 2001 sous le nom d’AFF (Allocation de fin de formation), l’Afdef concerne chaque année près de 30 000 personnes. Financée d’abord entièrement par l’État, puis en partie par lui et par le Fonds de sécurisation des parcours professionnels (FPSPP), elle représente un budget de 157 millions d’euros. Selon l’Unedic, « le problème vient simplement du financement » : « L’État souhaite que cette allocation soit financée entièrement par les partenaires sociaux. »  Affaire à suivre.

Aurélie Vion

1- Régie pour 2010 par le décret n° 2010-574 du 31 mai 2010, l’Afdef aurait dû, pour être reconduite, être inscrite dans la loi de finances pour 2011. Ce qui n’a pas été le cas.

2- Pôleurs : usagers de Pôle Emploi.

3- Il s’exprimait dans le Journal de 20h sur TF1 le 23 février 2011.

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