La sixième réunion de négociations conventionnelles entre les syndicats d’infirmiers libéraux et l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) jeudi a viré au marathon : près de 15 heures de tractations, mais toujours pas d’accord. Censée se tenir de 9h30 à 13h30, la réunion s’est terminée sur un constat d’échec, à une heure très avancée de la nuit, peu avant 5h du matin et sans que date soit prise pour une nouvelle rencontre, a-t-on appris de sources concordantes.
« Ca s’est terminé en queue-de-poisson », a déclaré le président de Convergence infirmière Marcel Affergan, présent à la réunion. Comme une semaine auparavant, les discussions ont essentiellement porté sur deux points : la régulation démographique et les revalorisations tarifaires. Dans les deux cas, les syndicats ne sont pas d’accord entre eux.
Marcel Affergan secrétaire général de Convergence infirmière estime que l’avenant sur la régulation démographique « est à peu près au point », sur le principe d’une arrivée pour un départ d’infirmière libérale en zone surdense accompagné d’une régulation de l’implantation des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad).
La veille de la réunion, le ministère a remis aux syndicats le projet d’arrêté visant à déterminer les critères les plus pertinents sur la nécessité de co-réguler l’offre infirmière libérale et l’offre de services de soins infirmiers à domicile. « Nous, on ne veut pas de création de Ssiad dans les zones surdenses. Le ministère, lui, veut un dispositif de souplesse où il pourrait y avoir des dérogations », a indiqué Marcel Affergan à espaceinfirmier.com.
Quant à inclure les HAD et les Ehpad dans le dispositif de régulation démographique, rien n’est fait, mais « on a reçu un courrier de la ministre dans lequel elle s’est engagée à le faire », a-t-il assuré.
De son côté, le Syndicat national des infirmiers et infirmières libéraux (Sniil) juge « inacceptable » l’ultime avenant proposé par l’Uncam et refuse d’apposer sa signature au document étant donné « le manque de précisions réglementaires sur la régulation des SSIAD, des Hospitalisations à domicile (HAD), des Etablissements hospitaliers pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) et des Centres de soins infirmiers (CSI) » et « la faiblesse des mesures incitatives » pour encourager les infirmières libérales à s’installer en zones sousdenses, conjuguées « à des contraintes administratives abusives ». « Ces mesures devaient favoriser l’implantation de nouveaux cabinets dans les zones sous-dotées, elles sont devenues dissuasives », déplore le Sniil sur son site Internet.
Dans tous les cas, les syndicats attendent toujours la finalisation de la répartition des zones sousdenses et surdenses. La délimitation précise du zonage est un préalable à toute signature de l’avenant, même s’il n’y aura « pas de variation fondamentale » du projet de découpage, selon M. Affergan.
La même ligne de faille partage les syndicats sur les revalorisations tarifaires. Face à la volonté de l’Uncam de repousser à mars 2009 le versement de la deuxième tranche de revalorisations tarifaires attendue au 1er août, le Sniil se montre catégoriquement opposé à un tel délai, tandis que les autres syndicats se veulent « plus souples sur le calendrier » à condition qu’il y ait des contreparties financières, explique Marcel Affergan.
« On peut attendre neuf mois de plus, mais on veut plus », résume-t-il, précisant que les négociations ont notamment porté sur le montant de cette enveloppe supplémentaire. Le montant proposé par l’assurance maladie jeudi soir pour la deuxième tranche de revalorisation était de 200 millions d’euros en année pleine -175 millions prévus initialement et 25 millions supplémentaires. Pour compenser le retard dans le versement et la hausse du prix du carburant, les syndicats, eux, ont demandé une rallonge de 50 millions d’euros. « Les caisses s’y opposent », selon Marcel Affergan.
Quoi qu’il advienne, a-t-il souligné, Convergence Infirmière a bien insisté sur le fait que l’application du futur accord sur la régulation démographique serait « conditionnée au versement des augmentations ». L’un ne commencera pas sans l’autre.
Pour le Sniil, il est tout simplement hors de question de consentir le moindre retard dans le versement des revalorisations. Le syndicat « exige de l’Uncam l’application des accords conventionnels avec en préalable l’augmentation tarifaire prévue au 1er août 2008 » et prévient qu’il « utilisera tous les moyens à sa disposition afin que les engagements conventionnels soient respectés ».
Sans nouveau rendez-vous fixé, les négociations risquent de se poursuivre cet été par courriers interposés pour une éventuelle reprise à la rentrée. « On nous balade, on se fout de notre gueule », estime, excédé, Jean-Louis Bouvet, président de l’Organisation nationale des syndicats d’infirmiers libéraux (Onsil) d’Île-de-France, qui a assisté à une partie de la réunion de jeudi. « Mercredi, on a été convoqué à deux réunions en même temps au ministère et on a reçu la convocation lundi soir pour le surlendemain, ce n’est pas sérieux », s’emporte le secrétaire général national de l’Onsil. Si ça continue, il va falloir mettre le feu aux autobus pour se faire entendre ! » C. A.