LP-IPVS
Les progrès dans le domaine de la santé conduisent aussi à des situations de vulnérabilité telles que le handicap, la dépendance ou la perte d’autonomie. En France, 20 millions de personnes vivent avec une pathologie chronique, 4 millions avec un cancer et des milliers avec les séquelles d’un accident traumatique. Autant de situations qui constituent un angle mort des politiques publiques et dont le constat a fait germer la naissance d’un Institut pour la prévention des vulnérabilités liées à la santé présidé par le Pr Régis Aubry.
« C’est un institut qui s’interroge sur la dimension éthique du progrès : est-ce que le progrès consiste à faire ce que l’on sait faire au seul motif qu’on sait le faire, si faire peut conduire à faire souffrir ? C’est ce champ-là, rendu possible par les avancées cliniques, que nous souhaitons explorer, en particulier, interroger la possibilité de notre système de santé à accompagner ce qu’il contribue à générer » a expliqué le Pr Aubry, professeur de médecine à l’Université de Bourgogne-Franche-Comté et membre du Comité consultatif national d’éthique, lors d’un colloque marquant le lancement de l’Institut pour la prévention des vulnérabilités liées à la santé fin novembre.
Fondé sur 4 piliers – l’observation, la recherche scientifique, la formation des professionnels et l’accompagnement clinique –, cet institut interdisciplinaire et indépendant, vise à observer et quantifier les situations de vulnérabilité pour améliorer la qualité de vie des personnes impactées.
Les vulnérabilités liées à la santé peuvent être de différentes natures : physique, lorsqu’elle se réfère à la dépendance fonctionnelle, la douleur post-opératoire et sous-tend une notion de fragilité ; psychologique, elle pointe vers la dépression et les syndromes post-traumatiques ; sociale, quand elle est liée au concept de précarité, de vulnérabilité relationnelle et de difficulté de communiquer, elle touche aussi les aidants ; enfin environnementale, elle fait le lien entre l’inadaptation de l’habitat et la solitude de l’individu qui aggrave sa situation.
RÉUSSIR L’INTERDISCIPLINARITÉ POUR L’ACCOMPAGNEMENT DE LA VULNÉRABILITÉ
Toutes ces vulnérabilités, générées directement ou indirectement par la médecine ou une prise en charge inadaptée, font émerger une responsabilité sociétale liée à leur non-prise en compte. Un vide que cet institut vise à combler. Pour y parvenir, cette nouvelle structure, associative pour le moment, s’engage dans trois axes majeurs de travail : tout d’abord la création d’un observatoire des vulnérabilités, grâce à l’appui de la Fondation de l’avenir, qui consistera à recueillir et analyser toutes les situations entrant dans ce champ des vulnérabilités ; ensuite, la mise en place d’un fonds de recherche interdisciplinaire pour connaître, décrire et comprendre les situations de vulnérabilité et enfin le lancement d’une expérimentation clinique soutenue par l’ARS Bourgogne-Franche-Comté, consistant à évaluer les vulnérabilités pour ensuite mieux les accompagner.
Sur ce dernier volet, une mise en commun de compétences est prévue : celles de patients experts, mais aussi d’infirmiers de pratique avancée, de travailleurs sociaux, éducateurs, ergothérapeutes, kinésithérapeutes ou encore de psychologues. Ces premiers travaux permettront de structurer l’avenir de cet institut des vulnérabilités qui pourrait prendre à terme la forme, selon le Pr Aubry, d’un institut hospitalo-universitaire ou d’une fondation sous tutelle.
Anne-Lise Favier