Insultes, menaces, atteintes physiques, dégradations de matériel… un observatoire recense les agressions qui s'exercent à l'hôpital, et propose des pistes pour les prévenir.
La montée de la violence dans les établissements de soins, illusion ou réalité ? Pour répondre à cette question, Fabienne Guerrieri, responsable de l’Observatoire national des violences en milieu hospitalier à la Direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (ministère de la Santé), a présenté des chiffres lors d'une conférence, jeudi dernier (1).
Une hausse mais des biais
Toutes formes confondues, le nombre de signalements de violences dans les établissements est passé de 2 690 en 2006 à 3 433 en 2008. Il devrait continuer à progresser en 2009.
Parmi ces signalements, il faut distinguer les « atteintes au personnel », comptant pour 89 % des signalements, des « atteintes aux biens » (vols, dégradations de matériel) qui représentent 11 % du total.
Il faut préciser que les chiffres de l’observatoire ne sont recueillis que depuis 2005, décision prise à la suite du meurtre d'une infirmière et d'une aide-soignante à l'hôpital psychiatrique de Pau. Premier biais : les données recueillies par système déclaratif progressent de façon mécanique car les établissements prennent connaissance du dispositif petit à petit. Le secteur public regroupe quelque 90% des établissements ayant déclaré des actes violents.
Second biais : le mode déclaratif est lié au vécu et à la sensibilité de chacun. Le seuil de tolérance varie avec le service et les personnes, certains faits seront déclarés dans un établissement et pas dans un autre…
Les victimes sont à 82% le personnel de l’établissement, 10% sont des patients. Parmi les signalements d’atteintes à la personne recensées en 2008, 60% sont de niveau 3 (violences volontaires, atteintes à l'intégrité physique, bousculades, crachats, coups, menaces avec arme, agressions sexuelles). Les atteintes à la personne de niveau 2 (menaces d'atteinte à l'intégrité physique ou aux biens de la personne, menaces de mort, port d'armes) représentent 20%, et les atteintes de niveau 1 (injures, insultes et provocations sans menaces) aussi 20%.
Les violences les plus graves, de niveau 4 (homicides, violences volontaires entraînant mutilation ou infirmité permanente) comptent pour 1 %. Les services les plus touchés par ces violences sont la psychiatrie (52 %) et les urgences (14 %).
Peu de plaintes déposées
Quelques pistes ont été proposées pour lutter contre ce phénomène : favoriser l’adaptation technique et organisationnelle des services touchés par la violence, dispenser des formations spécifiques au personnel qui y est confronté (gestion du stress, prise en charge de la violence), et enfin approfondir une politique de sécurisation des hôpitaux, en lien avec les services de police.
En dépit de ces constats, un paradoxe : 83 % des actes violents déclarés ne sont suivis d’aucune plainte ou déclaration de main courante. Cela peut s’expliquer par la lourdeur des procédures, la non-réponse de l’institution judiciaire. Il faudrait mettre en place un système plus fluide, estime donc Fabienne Guerrieri.
Carole Ivaldi
1- « La violence dans les établissements de soins », conférence organisée par la mutuelle MACSF, le 21 janvier à Paris.