UNE BD POUR DÉCOMPLEXER LES SOINS PALLIATIFS

POURQUOI CETTE ENVIE DE TÉMOIGNER PAR LE DESSIN ?
J’ai toujours adoré dessiner et j’étais un grand consommateur de BD. À l’hôpital, je vivais des moments de grande émotion et de grande richesse humaine, sans pouvoir l’exprimer autant que je le souhaitais. À travers ces récits, j’ai voulu raconter mon expérience au travail et démystifier les soins palliatifs. En 2017, j’ai commencé à publier mes histoires sur mon compte Instagram (l.homme.etoile), puis j’ai voulu en faire une BD : c’est comme ça qu’est né mon premier roman graphique “A la vie” en 2020. Puis un second, l’année suivante, etc. “Constellation” est mon quatrième roman graphique.

QUELS MESSAGES AVEZ-VOUS VOULU FAIRE PASSER DANS CE DERNIER ?
Tout comme “A la vie” et “Je serai là !”, je m’inspire de mon quotidien et des personnes que j’ai accompagnées. Cette fois, je me suis autorisé à aller plus loin, en approfondissant certaines réflexions et en racontant ce que m’avaient apporté ces rencontres. C’est ma façon à moi de les digérer ! Avec cet opus, j’ouvre aussi une nouvelle fois les portes de mon service. Les soins palliatifs restent encore méconnus du grand public et je souhaite offrir l’image la plus fidèle possible de ce qu’il s’y passe et de nos missions, sans sombrer dans le pathos.

POURTANT BEAUCOUP D’ÉMOTIONS SE DÉGAGENT DE CETTE BD ! VOUS N’HÉSITEZ PAS D’AILLEURS À MONTRER VOS ERREURS…
Nous exerçons un métier de propositions où il est primordial d’apprendre à connaître les personnes que nous accompagnons. Pour cela, on tâtonne pour trouver la juste proximité dans la relation avec le patient et tenter d’offrir des propositions cohérentes. Aussi il arrive que cela ne fonctionne pas, et j’ai à cœur de l’illustrer avec humilité et humour. Et puis parfois cela matche. C’est alors une petite victoire. Les soins palliatifs offrent une grande souplesse dans l’accompagnement des patients. En tant que soignants, nous bénéficions de plus de temps avec eux. J’y ai trouvé un terrain de jeu sur lequel exprimer toute l’humanité avec laquelle j’avais envie de soigner. J’ai voulu partager tout cela dans ma BD.

LA PARUTION DE “CONSTELLATION” COÏNCIDE AVEC LES DÉBATS SUR LA FIN DE VIE. L’OCCASION DE FAIRE ENTENDRE VOTRE VOIX ?
Je ne me sens pas du tout l’âme d’un militant, mais je sais que toute la communauté palliative me soutient ardemment. Malgré moi, j’engage la profession dans mes prises de parole et si aujourd’hui je peux permettre une meilleure diffusion des soins palliatifs, j’en serai le premier satisfait. Aujourd’hui, en France, une personne sur deux n’y a pas accès ou trop tard, alors que quand la souffrance est bien accompagnée, la demande d’aide à mourir disparaît. En Belgique, le pays dont je suis originaire, les soins palliatifs interviennent plus tôt dans la prise en charge. J’aimerais que cela soit le cas ici dans les prochaines années, même si à Metz j’ai le sentiment que nous sommes plutôt bien lotis.

AVEZ-VOUS D’AUTRES PROJETS ÉDITORIAUX ? AURONT-ILS UN LIEN AVEC VOTRE PRATIQUE ?
Je suis actuellement en cours d’ancrage de ma prochaine fiction. Un récit qui se déroule en dehors de l’hôpital et de la thématique de la maladie mais qui aborde néanmoins des thèmes qui me sont chers. J’espère pouvoir le publier au printemps prochain. En parallèle, je récolte des témoignages pour un magnifique projet de BD-reportage dont je garde la thématique encore secrète mais qui s’annonce puissant.

Propos recueillis par Eléonore de Vaumas