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Manque de reconnaissance et absence de perspectives… La consultation menée en ligne du 30 avril au 5 mai par l’Ordre national des infirmiers met une fois de plus le doigt sur des réalités maintes fois exprimées. Elles sont 40 % à vouloir changer de métier mais aussi 92 % à penser qu’il faut revoir le rôle et les attributions des infirmières.
Les résultats de cette consultation à laquelle plus de 30 000 infirmières ont répondu révèlent les sentiments partagés qui animent la profession : si les répondantes se disent à 90 % « fières de leur profession » et la jugent à 70 % épanouissante, 40 % d’entre elles indiquent que la crise « leur a donné envie de changer de métier » (+ 3 points par rapport à une enquête menée par l’Ordre en octobre 2020) et 21 % (+ 4 points) se disent au contraire renforcées dans leur détermination d’être soignantes ; 51 % considèrent que « la profession ne permet pas de connaître de véritables évolutions et perspectives de carrière ».
Manque de reconnaissance et scepticismeLe désabusement est palpable à travers les chiffres : 46 % des répondantes estiment que « depuis le début de la crise sanitaire, le métier infirmier n’est pas mieux reconnu par les patients et le grand public », « pas mieux reconnu par les autres professions de santé » pour 46 %, « pas mieux reconnu par les pouvoirs publics » pour 77 %, tandis que 90 % estiment que « la profession infirmière n’est pas reconnue à sa juste valeur au sein du système de santé ». Et pourtant, 86 % jugent que la crise sanitaire a révélé leur rôle essentiel dans le système de soins. Cherchez l’erreur…
Le scepticisme domine s’agissant des perspectives : 64 % estiment qu’elles ne sont « pas mieux préparées collectivement pour répondre à de nouvelles vagues épidémiques grâce aux enseignements tirés de cette année de Covid » et 91 % que le système de santé n’est pas en capacité de répondre aux grands enjeux sanitaires de demain. Si les infirmières sont nombreuses à attendre des changements en profondeur, 95 % d’entre elles souhaiteraient que « les enseignements de cette crise permettent de faire évoluer notre système de manière significative », et 56 % pensent que ce ne sera pas le cas.
90 % pour la révision du décret de compétencesS’agissant de la profession infirmière, 96 % des sondées pensent que « les enseignements de cette crise permettent de faire évoluer la profession de manière significative ». Et pour 92 % d’entre elles, « la crise sanitaire a démontré qu’il faut revoir le rôle et les attributions des infirmières » (60 % se disent tout à fait d’accord avec cette proposition).
À court terme, priorité est donnée à la révision du décret de compétences, une nécessité pour 90 % des personnes consultées. Les infirmières souhaitent que leur champ de compétences soit élargi, 97 % aimeraient notamment qu’il soit renforcé « dans la prévention et l’éducation thérapeutique et que leur contribution soit mieux reconnue ». Elles sont d’ailleurs 95 % à souhaiter « un meilleur positionnement des infirmières dans la gouvernance du système de santé ». Des évolutions sont encore attendues en matière d’organisation des soins : 98 % des soignantes souhaitent « le renforcement de la coordination ville/hôpital » (+ 7 points depuis la consultation de juin 2020) et 74 % y sont très favorables (+ 9 points).
Enfin, pour répondre aux enjeux du système de soins à dix ans, les infirmières souhaitent « devenir actrices de la coordination, de la gestion du parcours patient et de son orientation » (92 %). Elles sont favorables au « développement de l’usage de nouvelles technologies dans leur pratique » (85 %) et à l’idée d’évoluer « vers d’autres champs d'expertise comme la santé publique, le judiciaire, la veille et la sécurité en santé » (79 %).
Fort des enseignements de cette enquête, l’Ordre infirmier annonce le lancement d’une démarche « de réflexion collective et de prospective sur l’avenir de la profession à dix ans », rassemblant des infirmières et les parties prenantes, à commencer par les patients. Ceci afin de répondre aux enjeux de santé à venir : vieillissement de la population, maladies chroniques, déserts médicaux, pandémies… Vaste programme.
La rédaction