Titre de l'image

15/11/2022

Violences sur les soignants : une enquête alarmante

Le collectif Santé en danger a compilé les données de plus de 1 000 professionnels de santé touchés par des violences dans l’exercice de leur métier. Verbales ou physiques, ces violences proviennent de l’extérieur mais aussi de collègues. Les victimes ne savent pas toujours quelles suites y donner, alors même que les conséquences sur leur propre santé sont importantes.

Créé en 2020 pour porter les revendications des professionnels du soin (lire encadré ci-après), le collectif Santé en danger s’est penché sur les violences subies au travail. Début septembre, l’association a diffusé un questionnaire en ligne à ses adhérents et via sa page Facebook. Un peu plus de 1 000 personnes ont répondu, parmi lesquelles une vaste majorité (98 %) ont été victimes de violence au cours des 24 derniers mois. Le biais de recrutement de cette étude est évident — les répondants ont souhaité remplir le questionnaire parce que le sujet les touche directement — et les résultats ne peuvent donc pas être considérés comme représentatifs de la violence vécue par l’ensemble des soignants. Cependant, le détail des chiffres donne un aperçu du type de violences auxquelles sont exposés les professionnels.

« Risques du métier »

Près des deux tiers (59 %) des répondants ont été victimes de violences externes (de la part des patients ou de leur entourage). Parmi eux, 83 % ont été la cible d’injures ou d’insultes et 59 % de provocations sans menace. Plus inquiétant, 16 % ont reçu des menaces de mort et 2,5 % des menaces avec armes. Les passages à l’acte physique sont trop courants : 39 % ont été victimes de violences volontaires avec atteintes à l’intégrité physique. Cinq personnes rapportent même des faits de violence avec arme, quatre personnes ont été victimes d’agression sexuelle, une a subi un viol et une, un fait de violence volontaire entraînant une mutilation.

Seules 65,4 % des victimes ont dénoncé les faits à leur hiérarchie ou à leurs représentants, et 10 % à peine ont porté plainte. « Dans certains services, comme en psychiatrie ou en gériatrie, les professionnels considèrent que les violences venant des patients font partie des risques du métier, détaille Audrey Baskovec, infirmière et administratrice de l’association Santé en danger. Ce sont plutôt les violences commises par les familles ou les patients intolérants à la frustration qui font l’objet d’un signalement. »

Alerter l’opinion et les pouvoirs publics

Plus du tiers des répondants (38,5 %) ont été victimes de violences internes (de la part de collègues ou de la hiérarchie). Les provocations sans menace sont les faits les plus courants (75 %), mais aussi les insultes et injures (42 %) et les propos outrageants (30 %). Huit personnes ont reçu des menaces de mort, 17 ont été victimes de violences physiques et deux rapportent même des violences volontaires ayant entraîné une mutilation. « Le questionnaire permettait de laisser des commentaires : les actes de violences internes sont assez choquants et laissent entrevoir des formes de maltraitance institutionnelle », s’alarme Audrey Baskovec.

Moins de la moitié des victimes ont alerté leur hiérarchie, mais 14 % ont démissionné suite à cet épisode, et 10 % ont demandé à changer d’affectation.

Parmi les répondants, près de 60 % n’ont reçu aucune formation à la gestion de l’agressivité et moins de 14 % connaissent l’Observatoire national des violences en milieu de santé, qui dispose d’une plateforme de signalement des faits. « Les conséquences psychologiques et somatiques des violences sont importantes, elles participent à la perte d’attractivité de nos métiers, remarque Audrey Baskovec. Nous souhaitons alerter les pouvoirs publics et l’opinion sur cette réalité, et réfléchir, notamment avec les ordres professionnels, à des pistes d’action. » Pour que les soignants soient enfin mieux protégés !

Lisette Gries

FOCUS

SANTÉ EN DANGER : UNE ASSO POUR REVALORISER LES MÉTIERS DU SOIN

Le collectif Santé en danger a été fondé en juillet 2020 par Dr Arnaud Chiche, anesthésiste-réanimateur dans le Pas-de-Calais, suite aux annonces du Ségur de la santé, jugées insuffisantes. Le collectif s’est constitué en association (loi 1901) et compte quelque 6 000 adhérents, mais agrège des dizaines de milliers de sympathisants sur les réseaux sociaux. Ouverte à toutes les professions de santé, issues des secteurs public, privé et libéral, l’association demande la tenue d’un Ségur 2 et porte des propositions pour réformer le système de soins. Ses membres participent aussi aux instances locales du Conseil national de la refondation (CNR), organisées par le gouvernement.

Liens utiles :

https://solidarites-sante.gouv.fr/professionnels/ameliorer-les-conditions-d-exercice/observatoire-national-des-violences-en-milieu-de-sante/dgos-onvs

https://collectif-sed.org/

À LIRE ÉGALEMENT

- Martin L., « Insécurité des soignants au travail : une prévention difficile à mettre en œuvre », sur espaceinfirmier le 09/09/2019

- Coq-Chodorge C., « Violences à l'hôpital : les urgences parisiennes appellent à la grève », sur espaceinfirmier le 10/04/2019

- Renaud A, « Les Idels attendent un sursaut de la profession », dans L'infirmière Libérale Magazine n° 358 du 01/05/2019

- Martin L., « Violences dans les établissements : les infirmières cibles numéro un », sur espaceinfirmier le 29/09/2017

À découvrir

Toutes nos formations pour les professionnels de santé.

- Gestes & soins d'urgence
- Douleurs
- Management
- Droit & éthique
- SST
- Santé mentale & handicap


Télécharger le catalogue
Feuilleter le catalogue