Victime d'une agression : des droits à faire valoir - L'Infirmière Libérale Magazine n° 180 du 01/03/2003 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 180 du 01/03/2003

 

Juridique

Il n'est pas exceptionnel d'être victime d'une agression ou de simples gestes violents, de la part d'un malade ou de sa famille, lors d'une visite à domicile. Du simple dépôt de plainte au commissariat à la constitution de partie civile, l'infirmière dispose de plusieurs moyens pour obtenir réparation.

Les actes d'incivilité, plus que la violence proprement dite, sont en constante augmentation depuis plusieurs années : du simple refus d'ouvrir sa porte aux crachats, au vol de la sacoche, ou à l'ordre agressif, voire violent, de quitter le domicile, jusqu'aux coups et blessures, tout cela constitue bien des « infractions pénales », pouvant faire l'objet de poursuites.

DÉPOSER PLAINTE : POUR QUOI FAIRE ?

L'objet d'une plainte n'est pas d'obtenir personnellement réparation d'une infraction dont on a été victime. Il s'agit d'engager des poursuites pénales afin que le responsable soit sanctionné par une peine d'amende (au profit de la société), voire de prison. La plainte peut être déposée dans n'importe quel commissariat. Elle peut aussi être directement adressée, par courrier recommandé, au parquet, auprès du tribunal de grande instance. Cette plainte peut viser précisément l'auteur des faits ou un suspect possible (un membre de la famille du malade, par exemple). Néanmoins, il s'agit d'une plainte simple, c'est-à-dire sans constitution de partie civile, rien n'oblige alors les autorités judiciaires à engager des poursuites. En effet, il arrive fréquemment que le parquet, pourtant convaincu de l'existence d'une infraction, considère les poursuites comme inutiles. C'est le cas pour des faits dont la gravité est jugée relative en raison de l'encombrement et du manque de moyens dont souffrent les tribunaux. Le parquet peut également hésiter à poursuivre une personnalité « importante » visée dans une plainte simple.

LA RÉPARATION CIVILE MALGRÉ L'IRRESPONSABILITÉ PÉNALE

D'un point de vue pénal les personnes auteurs d'une infraction alors qu'elles étaient atteintes d'un trouble psychique ayant aboli leur discernement ne peuvent être condamnées (article 122-1 du Code pénal). En revanche, elles restent responsables sur le plan civil (article 489-2 du Code civil) et tenues à réparation du dommage causé, de la même manière que toute autre personne et pour tout acte délictueux : violences, blessures, dommages aux biens, etc. Se constituer partie civile après avoir été victime de violences de la part d'un malade atteint de troubles mentaux, voire d'un malade sous tutelle, n'est pas dénué d'intérêts si le préjudice subi est important et que le majeur incapable dispose de ressources.

SE CONSTITUER PARTIE CIVILE

La répression d'un acte contraire à la loi pénale est exercée par le ministère public au nom de la société, en la personne du procureur de la République. Il s'agit de l'action « publique ». Mais l'infirmière qui aura été victime de violences, quelles qu'elles soient, doit pouvoir faire valoir son préjudice et obtenir réparation. La constitution de partie civile n'est possible qu'au tribunal, jamais au commissariat.

C'est la victime qui doit chiffrer son préjudice avant d'en demander la réparation au juge saisi de l'action pénale. Le juge apprécie alors les demandes de l'infirmière victime de l'agression et fixe souverainement le montant des dommages et intérêts. Il conviendra alors pour l'infirmière de rassembler le maximum de preuves : certificats médicaux, ITT, factures en cas de vol ou de détérioration de matériels, etc. A la demande du juge ou de la victime, qui y a souvent intérêt, un expert peut cependant être désigné pour évaluer le préjudice, notamment lorsqu'il s'agit d'un préjudice corporel. En pareil cas, le juge peut même condamner l'auteur de l'infraction sur un plan pénal, en lui infligeant une peine et différer sa décision relative au préjudice. L'expert peut aussi apprécier l'évolution de l'état de santé de la victime. Le préjudice ne peut d'ailleurs être précisément évalué tant qu'il n'est pas définitivement consolidé.

A l'issue du procès pénal, après avoir obtenu la condamnation de l'auteur de l'infraction à verser des dommages et intérêts en réparation du préjudice causé, le règlement n'est pas toujours immédiat, voire effectif. L'infirmier devra recourir aux services d'un huissier pour poursuivre le condamné. Bien souvent aussi, la victime est confrontée à l'insolvabilité du condamné.

Il est alors possible de demander l'indemnisation de son préjudice à une commission spéciale : la Civi (Commission d'indemnisation des victimes d'infraction). Il existe une Civi dans chaque tribunal de grande instance. La demande peut être formulée par simple lettre recommandée, avec demande d'avis de réception, sans avocat, dans les trois ans à compter des faits ou un an à compter de la décision pénale définitive. En cas d'atteinte à la personne, le préjudice est en principe intégralement indemnisé (préjudices corporel, professionnel, moral et économique). Néanmoins, la victime doit avoir des ressources modestes et justifier de la gravité de son préjudice, pour pouvoir prétendre à une réparation.

NOTRE EXPERT VOUS RÉPOND

- Je suis infirmier libéral dans une S.C.P de trois infirmiers (deux clientèles). Mon collègue et moi-même travaillons chacun 14 matinées et sept après-midi (l'équivalent de deux mi-temps), alors que ma collègue, elle, travaille 28 matinées et 14 après-midi (l'équivalent d'un temps plein).

Deux questions se posent à nous :

D'une part, mon collègue et moi même, pouvons-nous remplacer ma collègue et se faire rémunérer en tant que tel au sein de la société ?

D'autre part, m'est-il possible, de façon occasionnelle ou exceptionnelle, de remplacer une collègue qui exerce seule dans un cabinet distant de mon lieu d'exercice ?- Toutes vos interrogations dépendent en grande partie du contenu des statuts qui vous lient au sein de la SCP. Si les dits statuts ne comportent pas d'interdiction en ce sens, sachez qu'un infirmier libéral peut effectuer des remplacements dans son propre cabinet.

Attention, néanmoins : l'article 43 du décret du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles limite le cumul à deux remplacements seulement à la fois, et ce, même dans une association d'infirmiers ou un cabinet de groupe.

Enfin, ne négligez pas les risques de concurrence déloyale à termes en prévoyant notamment dans le contrat de remplacement, lorsque sa durée est supérieure à trois mois, une clause de non-concurrence qui devra obligatoirement être assortie d'une contrepartie financière.