Le contrat de collaboration : entre contrat de travail et contrat d'association - L'Infirmière Libérale Magazine n° 192 du 01/04/2004 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 192 du 01/04/2004

 

Juridique

La collaboration constitue un bon moyen pour débuter son exercice libéral, lorsque l'on ne possède ni clientèle préconstituée, ni apport de fonds. C'est aussi l'occasion de tester le travail en équipe, première étape avant une éventuelle association. Sa relative souplesse nécessite néanmoins de respecter certaines règles.

Le contrat de collaboration est l'acte par lequel une infirmière confirmée met à la disposition d'une collègue les locaux et le matériel nécessaires à l'exercice de la profession ainsi que, généralement, une partie de la clientèle attachée au cabinet.

LE CONTRAT DE COLLABORATION

Le statut de la collaboration infirmière n'est décrit par aucun texte. La collaboration est un avant tout un contrat, ce qui signifie la rédaction d'un écrit. Seul l'écrit est un moyen de protection efficace des parties signataires du contrat. Un certain nombre de mentions doivent alors obligatoirement figurer au contrat, notamment :

-> Les modalités de la rémunération : en général, la collaboratrice verse une contrepartie financière à sa participation, correspondant à un certain pourcentage des honoraires qu'elle aura encaissés et en fonction des services et de l'assistance technique qui lui sont fournis.

-> Les conditions dans lesquelles l'infirmière collaboratrice peut éventuellement satisfaire aux besoins de sa clientèle personnelle.

-> Les modalités de mise à disposition des locaux : en principe, lorsque l'infirmière principale est locataire du cabinet, elle doit demander au bailleur l'autorisation d'exercice de la même profession dans le cabinet pour l'infirmière collaboratrice. Un avenant au contrat doit alors être signé et la collaboratrice devient ainsi cotitulaire du bail ou sous-locataire. Il peut être prévu au contrat un mode de répartition des charges du fait de l'exercice en commun.

-> Les horaires de travail : ils doivent revêtir une grande souplesse à partir du moment où il s'agit d'une collaboration libérale et non salariée.

A ce titre, le contrat de collaboration ne doit comporter aucun élément de subordination hiérarchique, au risque de voir le contrat requalifié par l'Urssaf en contrat de travail, avec paiement alors des charges afférentes. En tout état de cause, l'indépendance de l'infirmière collaboratrice doit être respectée tant sur le papier que dans l'exercice de sa profession.

-> La durée du contrat de collaboration, puisqu'il s'agit d'un mode d'exercice libéral forcément limité dans le temps.

-> Les périodes de congés devront être précisées dans la mesure du possible afin d'éviter toute contestation ultérieure : n'oublions pas que le contrat de collaboration n'est pas destiné à durer trop longtemps. Il n'est qu'une étape avant une réelle association ou non.

-> L'existence d'une clause de non-concurrence.

L'EXERCICE DE LA COLLABORATION

Théoriquement, il existe un rapport d'égalité entre les deux infirmières et toute idée de subordination doit être exclue. La collaboration ne peut se vivre harmonieusement que dans un climat de connivence, de confiance réciproque et de libre discussion.

L'infirmière installée doit mettre à la disposition de sa collaboratrice les moyens matériels de l'exercice de la profession, non seulement pour le service de ses patients mais aussi pour le service des patients personnels de l'infirmière collaboratrice.

L'infirmière collaboratrice exerce ainsi sa profession en toute indépendance et doit, à ce titre, être personnellement assurée. Elle doit pouvoir aussi apposer sa plaque professionnelle. Elle perçoit l'intégralité des honoraires correspondant aux actes qu'elle accomplit et est donc passible de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

LA FIN DE LA COLLABORATION

Elle peut correspondre à l'arrivée du terme normal du contrat de collaboration, ou être le fait de la rupture de l'une ou l'autre des parties, moyennant, si cela est prévu au contrat, le respect d'un préavis (deux mois en général). Attention, la collaboratrice qui décide de quitter le cabinet pour s'installer peut être tenu par une clause de non concurrence prévue dans le contrat de collaboration. A noter que la clause de non-concurrence ne se présume pas, c'est-à-dire que si aucune clause n'est prévue au contrat ou si aucun contrat écrit n'a été rédigé, il n'est pas possible de se prévaloir d'une telle clause.

Le contrat de collaboration ayant une durée limitée, l'existence d'une clause de non-réinstallation dans un rayon déterminé autour du cabinet, pendant une durée de trois à cinq ans, est tout à fait légale et même fréquente. En général, le contrat de collaboration prévoit, en cas de non- respect de la clause de non-concurrence, le paiement d'une indemnité. Son montant peut aller jusqu'à celui correspondant au chiffre d'affaires annuel réalisé par le cabinet, payable dès l'installation dans le secteur par l'ancienne infirmière collaboratrice. Une telle clause aux montants parfois exorbitants est destinée à dissuader toute installation visant à concurrencer de manière déloyale le cabinet, en opérant un détournement de clientèle.

Notre expert vous répond

- Quels sont les risques encourus en cas de collaboration ne préservant pas le principe d'indépendance de l'infirmière collaboratrice ?

Si une subordination apparaît de manière évidente dans l'exercice de la collaboration, les risques financiers sont grands puisque l'Urssaf risque de requalifier le contrat de collaboration en contrat de travail. Des charges sociales devront alors être versées, tant d'un point de vue salarial que patronal.

Par ailleurs, l'infirmière collaboratrice, en cas de subordination trop pesante, peut toujours saisir le Conseil de prud'hommes afin de faire requalifier sa collaboration en contrat de travail. Les conséquences risquent alors d'être très lourdes : requalification de la rupture en licenciement avec paiement des indemnités de licenciement, de congés payés, paiement des charges patronales, voire de dommages et intérêts, etc. D'autre part, toute relation salariée étant interdite entre les infirmières, des sanctions pour travail illégal peuvent s'ajouter aux indemnités décrites ci-avant.

- Est-il vrai qu'après un remplacement, même de quelques semaines seulement, il est interdit, en l'absence de toute mention dans mon contrat à ce titre, de m'installer à proximité du cabinet où j'ai effectué ce remplacement ?

Non. Cette règle ne s'applique que si le remplacement a duré plus de trois mois. Une telle interdiction n'a en effet pas besoin d'être prévue dans le contrat de remplacement, conformément à l'article 43 du décret du 16 février 1993 relatif aux règles professionnelles. En outre, cette interdiction d'installation dans un cabinet concurrent peut aller jusqu'à deux ans, sauf disposition plus favorable prévue dans le contrat.