Microbiologie - L'Infirmière Libérale Magazine n° 192 du 01/04/2004 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 192 du 01/04/2004

 

Formation continue

Fiches techniques

LE RENOUVEAU DE L'INFECTIOLOGIE

L'infectiologie et la microbiologie sont des disciplines jeunes, donc très vivantes, qui connaissent d'incessants changements. De leur côté, les microbes sont des formes de vie très anciennes, mais elles aussi très "vivantes" et en perpétuelle évolution.

Pourtant, il y a quelques années, beaucoup pensaient que les antibiotiques et les vaccins éradiqueraient progressivement l'ensemble des maladies infectieuses. Malheureusement, il n'en a rien été.

Des défis inédits - comme l'apparition du sida ou du sras - ont au contraire relancé l'intérêt pour l'infectiologie et pour la microbiologie. De nouvelles maladies infectieuses (émergentes ou résurgentes) sont apparues, qui ont révélé de nouveaux risques infectieux, de nouveaux micro-organismes... et aussi de nouveaux types de malades.

Car les maladies infectieuses évoluent continuellement, du fait notamment des changements de modes de vie. Sont principalement en cause : l'augmentation des concentrations humaines (méga-villes, méga-hôpitaux, méga-élevages, méga-pollutions...) et l'accélération des transports (de plus en plus de voyageurs, de plus en plus loin...).

L'ensemble des phénomènes par lesquels la contamination d'un patient peut être suivie d'une infection est très complexe. L'efficacité d'aucune mesure (préventive ou thérapeutique) ne peut donc jamais être garantie à 100 %. Pourtant, un certain nombre de précautions s'imposent, qui doivent être basées sur une meilleure connaissance du monde microbien et ultramicrobien (ATNC).

LES MICROBES, UNE FAMILLE RECOMPOSÉE

- Les micro-organismes (ou microbes, c'est-à-dire très petits organismes) comprennent :

-> les bactéries ;

-> les virus ;

-> les champignons ;

-> certains parasites (protozoaires unicellullaires) ;

-> les ATNC (agents transmissibles non conventionnels) ou prions.

DES ORGANISMES UBIQUISTES

- Les microbes sont présents partout :

-> sur le patient lui-même (peau, muqueuses, sécrétions, fèces...),

-> autour du patient (environnement immédiat, objets, surfaces, air eau, aliments, plantes...),

-> sur les personnes entourant le patient (les autres malades, les visiteurs...),

-> sur les soignants (mains, vêtements...).

LES MICROBES, DES "PARTENAIRES SOCIAUX" INCONTOURNABLES

Les microbes constituent une forme de vie primitive, très archaïque mais aussi très performante, qui évolue sans cesse. Ils sont apparus sur terre bien avant l'homme et ils lui survivront. Ils sont partout : autour de nous, sur nous et aussi en nous (cf. encadré "Des organismes ubiquistes"). Et ce, en très grand nombre. Car, si l'homme fait partie d'un écosystème, il est lui-même un écosystème pour les microbes qu'il héberge.

Certains d'entre eux sont utiles et jouent un rôle intéressant pour l'homme (métabolique, alimentaire...) et pour l'environnement, quand d'autres sont de redoutables "partenaires sociaux" dont il ne faut pas négliger la capacité de nuisance.

Les effets indésirables des micro-organismes peuvent être multiples, soit par multiplication (rôle infectieux, lié à leur virulence), soit par sécrétion de métabolites (rôle toxique). Par précaution, tout microbe doit donc être considéré comme pathogène ou potentiellement pathogène, notamment dans certaines circonstances (fragilité de la personne, acte invasif...).

ÉCOLOGIE MICROBIENNE

Les micro-organismes pathogènes pour l'homme ne sont que quelques centaines sur les milliers d'espèces connues. Stérile à la naissance, le nouveau-né se contamine par des micro-organismes d'origine maternelle et d'origine environnementale. Ils colonisent rapidement tous les sites accessibles et cette colonisation persiste toute la vie.

-> La symbiose est une association biologique entre des micro-organismes et leur hôte. Lorsque ceux-ci ne font que transiter, on les dit "saprophytes".

-> Le commensalisme est une association où les micro-organismes tirent avantage de leur hôte sans l'affecter.

-> L'opportunisme caractérise les micro-organismes qui deviennent pathogènes dans certaines circonstances.

-> Le parasitisme caractérise les micro-organismes qui portent toujours atteinte à leur hôte.

-> Le pouvoir pathogène d'un micro-organisme est sa capacité à provoquer une infection. C'est une propriété qualitative (tel microbe -> telle pathologie).

-> La virulence est la composante quantitative du pouvoir pathogène ("dose minimale infectieuse").

DES ÊTRES TRÈS "COMMUNICATIFS"

La dissémination des microbes peut être directe ou indirecte, manuportée ou aéroportée. Certaines activités favorisent la dissémination des microbes :

-> soins (invasifs ou non),

-> éternuement, toux, mouchage (rhume), parole (postillons...),

-> poignée de main,

-> passage aux toilettes,

-> manipulation d'une poignée de porte ou d'un téléphone,

-> jardinage, équitation, soins des animaux...

-> ménage, nettoyage, manipulation de déchets...

PRÉCAUTIONS STANDARD ET PRÉCAUTIONS SPÉCIFIQUES

L'application de "précautions standard" - pour tous les soins et pour tous les patients, quel que soit leur statut infectieux - permet de protéger les professionnels de santé et les patients contre les risques de contamination liés au contact avec le sang et les liquides biologiques (notamment le VIH, le VHB et le VHC). L'hygiène des mains (lavage, SHA, gants...) est un élément important des "précautions standard".

Pour certaines autres maladies infectieuses transmissibles, il convient d'ajouter des "précautions spécifiques" dont les modalités dépendent des modes de transmission des micro-organismes concernés :

-> isolement contact ("C") pour les infections manuportées (gale) ;

-> isolement air ("A") pour les infections aéroportées (tuberculose) ;

-> isolement gouttelettes ("G") pour certaines infections comme la coqueluche, la grippe ou la méningite à méningocoque.

ÉLIMINATION OU ÉRADICATION ?

- L'élimination signifie l'arrêt de la transmission d'une maladie à l'échelle d'un pays ou d'une région.

- L'éradication signifie sa disparition à l'échelle de la planète.

Ainsi, le dernier cas de variole diagnostiqué en France remonte à 1955 (élimination), et dans le monde (Somalie) à 1977. L'éradication planétaire de cette maladie a donc pu être proclamée en 1980 par l'OMS... La prochain candidat à l'éradication pourrait bien être la poliomyélite... en 2005.

À lire...

- Bosgiraud Claudine et coll., Microbiologie générale et santé, Éd. Eska, 2003.

- Éberlin Thierry, Les infections microbiennes, Éd. Nathan Université, Coll. Sciences 128, 1997.

- E. Pilly, Maladies infectieuses et tropicales, Éd. 2m2, 2002.

- Freney Jean et coll., Précis de bactériologie clinique, Éd. Eska, 2000.

- Gualde Norbert, Les microbes aussi ont une histoire, Éd. Les empêcheurs de penser en rond, 2003.

- Guezet Sylvie et coll., Hygiène des soins infirmiers en ambulatoire, Éd. C.Clin Ouest, 2002.

- Larpent Jean-Paul, Introduction à la nouvelle classification bactérienne, Éd. Tec & Doc, 2000.

- Le Coz-Iffenecker Anne et coll., Guide d'hygiène et soins ambulatoires, Éd. Frison-Roche, 2000.