La légionellose - L'Infirmière Libérale Magazine n° 205 du 01/06/2005 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 205 du 01/06/2005

 

Formation continue

Fiches techniques

- La légionellose est une pneumopathie sévère qui affecte essentiellement les personnes fragilisées. Le diagnostic clinique doit toujours être confirmé biologiquement. La contamination se fait par voie respiratoire, par inhalation d'eau contaminée diffusée en aérosol. Il n'y a pas de transmission inter-humaine. La période d'incubation est de 2 à 10 jours. Avec un traitement antibiotique précoce et adapté, l'évolution est favorable dans la majorité des cas. Néanmoins, la légionellose est une maladie grave, dont la létalité est de l'ordre de 15 %.

- Due à une bactérie nommée Legionella pneumophila, hôte naturel de l'environnement hydro-tellurique, la légionellose a été identifiée en 1976. Dans les pays occidentaux, elle se développe en relation avec le progrès technologique et avec la fragilisation de la population (vieillissement, maladies chroniques, terrain pulmonaire, tabagisme...).

- Les cas de légionellose doivent être distingués, selon qu'il s'agit de cas groupés ou de cas sporadiques :

-> les cas groupés (ou "épidémies") sont les plus rares. Une source commune de contamination est le plus souvent identifiée : tours aéro-réfrigérantes (TAR), systèmes d'eau chaude sanitaire (ECS) et douches des collectivités (hôpitaux, hôtels, campings, stations thermales...). L'identification de la source de contamination permet de mettre en oeuvre des mesures de contrôle et de prévention adaptées ;

-> les cas sporadiques (ou "cas isolés") sont les plus fréquents. L'identification de la source de contamination est plus délicate, donc plus rare, ce qui rend leur prévention plus difficile.

SURVEILLANCE

- La surveillance de la légionellose en France repose sur la déclaration obligatoire (DO) des cas par les cliniciens et les biologistes à la Ddass. C'est ensuite la Ddass qui notifie les déclarations à l'Institut de veille sanitaire (InVS). Le Centre national de référence des légionelles (CNRL, Université Lyon 1) collabore étroitement avec l'InVS sur les aspects microbiologiques. Le CNRL assure la caractérisation des souches de Legionella isolées dans les laboratoires et les compare par des techniques génomiques. Le rôle du CNRL est particulièrement important pour relier les sources environnementales aux épisodes de cas groupés humains.

La mise en place de mesures de contrôle adaptées repose sur la détection et le signalement rapides des cas par les cliniciens et biologistes à la Ddass et sur l'enquête (épidémiologique, environnementale et micro-biologique) approfondie qui doit être impérativement réalisée quand des cas groupés sont détectés. La suspicion de cas groupés repose sur le rapprochement des cas déclarés à la Ddass en termes de date de survenue, de résidence ou de lieu de fréquentation. Depuis 1998, quinze épisodes de cas groupés ou d'épidémies communautaires ont été enquêtés de manière approfondie. Pour sept d'entre eux, une TAR a été identifiée comme source de contamination. La diffusion de gouttelettes d'eau issues d'une TAR (qui peuvent véhiculer la Legionella) peut, dans des conditions météorologiques favorables et un environnement plat, dépasser dix kilomètres.

- Chaque année, on compte environ un millier de cas de légionellose en France (en 2003, 1 044 cas, à l'origine de 129 décès). Les données recueillies par l'InVS montrent que la légionellose n'est pas actuellement en recrudescence en France. La surveillance s'est beaucoup améliorée ces dernières années : elle permet de caractériser de mieux en mieux les sources susceptibles d'être à l'origine d'une contamination collective et de les détecter de plus en plus tôt.

- Pourtant, ces progrès ne permettent pas de garantir la suppression de tout risque, même si les efforts de prévention devraient réduire la fréquence des épidémies dans les années à venir. Ces éléments justifient les mesures de réduction des risques qui sont actuellement développées.

- « Comme pour beaucoup d'autres maladies infectieuses épidémiques, la surveillance et la maîtrise dépendront de la précocité du diagnostic et de la notification à la Ddass », rappelle le Dr Jean-Claude Desenclos, responsable du département des maladies infectieuses à l'Institut de veille sanitaire (InVS).

PRÉVENTION

- La prévention de la légionellose repose d'abord sur l'entretien régulier et le contrôle des sources d'exposition répertoriées, notamment les TAR, qui sont la principale source des épidémies communautaires. Un effort important d'inventaire et de contrôle des TAR a été initié par les pouvoirs publics. Des efforts importants ont également été consentis depuis une dizaine d'années pour les légionelloses acquises à l'hôpital. Les données de la déclaration obligatoire indiquent qu'ils ont eu un impact positif puisque les cas nosocomiaux sont à la baisse.

- Des recherches restent cependant nécessaires pour améliorer la prévention, notamment sur la prolifération des légionelles dans les TAR (rôle des biofilms, des amibes, dispersion dans l'environnement...), sur leur diffusion, sur les stratégies de contrôle (recensement et entretien des installations, analyse des points critiques, danger de la phase de nettoyage sous pression, surveillance environnementale, tests de détection rapide fiable...) et sur les sources de contamination des cas sporadiques.

RÉDUIRE LES RISQUES

La température optimale de croissance de Legionella pneumophila se situe entre 35 et 45 °C. Cette bactérie est donc l'hôte privilégié des réseaux d'eau chaude sanitaire (ECS), tant à la maison que dans les collectivités. Les dépôts calcaires (tartre) et organiques (biofilm) des réseaux constituent des niches écologiques particulièrement propices au développement de cette bactérie dans les réseaux. La réduction des risques liés aux légionelles repose avant tout sur un bon entretien des circuits et des installations d'eau, en particulier d'eau chaude.

- Pour éliminer Legionella pneumophila des réseaux, deux techniques sont généralement proposées :

-> le "choc thermique", qui consiste à augmenter la température de l'eau du réseau au-dessus de 70 °C pendant au moins 30 minutes (en avertissant les utilisateurs) ;

-> le "choc chloré", qui consiste à atteindre une concentration de 15 mg/l de chlore libre dans le réseau d'eau à traiter pendant 24 heures, suivi d'un rinçage abondant.

- En pratique, ces deux techniques sont difficiles à mettre en oeuvre. Il convient donc aussi d'utiliser des "petits moyens", notamment dans les parties les plus distales des réseaux d'eau :

-> se servir régulièrement de l'eau chaude,

-> si un point d'eau reste longtemps inutilisé (résidence secondaire), laisser couler l'eau chaude pendant plusieurs minutes avant de l'utiliser,

-> purger régulièrement (une fois par semaine) les canalisations et les robinetteries avec l'eau au maximum de sa température,

-> détartrer et désinfecter régulièrement les robinetteries accessibles (mousseurs, pommes de douches...),

-> régler le chauffe-eau à 60 °C.

DES ÉPIDÉMIES SURTOUT ESTIVALES, MAIS HIVERNALES AUSSI PARFOIS

- Si les épidémies de légionelloses sont plus fréquentes en période estivale, elles peuvent aussi survenir "hors saison". Ainsi, dans le Pas-de-Calais, l'épidémie communautaire survenue fin 2003 a été inhabituelle à plus d'un titre : prolongée, géographiquement dispersée, pernicieuse, meurtrière... et hivernale.

- Cette épidémie, qui s'est développée de novembre 2003 à janvier 2004, a été particulièrement difficile à maîtriser. Les déterminants géographiques (latitude, plaine semi-urbaine) et les conditions météorologiques hivernales (vent, humidité) ont sans doute contribué à la diffusion des aérosols contaminés.

- L'épidémie qui s'est développée dans le Nord-Est de l'agglomération lyonnaise en avril-mai 2005 a déjà fait plusieurs dizaines de victimes. Il semblerait que plusieurs TAR soient en cause dans la zone géographique concernée.

POUR EN SAVOIR PLUS

- AFSSE : Agence française de sécurité sanitaire environnementale (http://www.afsse.fr)

- CNRL : Centre national de référence des légionelles (http://dm3.univ-lyon1.fr/legio/LEGIONELLES0.htm)

- Ddass : Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (http://www.social.gouv.fr/htm/minister/dd-dr/)

- DGS : Direction générale de la santé (http://www.sante.gouv.fr)

- DO : déclaration obligatoire (http://www.invs.sante.fr/surveillance/mdo/)

- DRIRE : Direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (http://www.drire.gouv.fr)

- Ineris : Institut national de l'environnement industriel et des risques (http://www.ineris.fr)

- InVS : Institut de veille sanitaire (http://www.invs.sante.fr)

- Sites Internet sur la légionellose : http://www.legionelle.com ; http://www.legionellose.com ; http://www.legionella.org ; http://www.ewgli.org

- Uniclima : http://www.uniclima.org