Manifestations sur le pavé de Paris - L'Infirmière Libérale Magazine n° 205 du 01/06/2005 | Espace Infirmier
 

L'infirmière libérale magazine n° 205 du 01/06/2005

 

ACTIONS SYNDICALES

Actualités

L'Événement

Si les deux syndicats représentatifs s'accordent grosso modo sur le diagnostic des problèmes de la profession, ils divergent sur les solutions et les moyens d'action. Le 12 mai, Convergence infirmière était dans la rue, tandis que la FNI prépare ses "États généraux".

Le 12 mai, une manifestation était organisée à Paris, à l'appel de Convergence infirmière et de diverses autres organisations professionnelles (Coordination, Unaibode...). Sur le pavé de Paris, les manifestants n'étaient pas très nombreux : à peine quelques centaines. Pourtant, ils étaient venus de tous les coins de l'Hexagone, mais surtout du grand Sud-Est (Provence, Languedoc, Roussillon...). Les infirmiers se sont mobilisés principalement contre « l'exercice illégal de la profession » et les déréglementations tous azimuts que connaît actuellement la profession :

-> autorisation donnée aux personnels des laboratoires d'analyses médicales d'effectuer des prélèvements à domicile ;

-> possibilité accordée aux "aidants naturels" des personnes handicapées de réaliser certains soins infirmiers ;

-> éviction des infirmiers libéraux des maisons de retraite ;

-> développement des "services de soins infirmiers à domicile" (Ssiad) au détriment des libéraux...

En conséquence, les manifestants demandaient au Gouvernement « qu'il revienne sur l'ensemble des mesures qui légalisent l'exercice illégal de leur profession » (sic) et qu'il ouvre des négociations sur les conditions d'exercice de la profession, ainsi que sur la revalorisation des salaires et des honoraires. Ils demandaient également au Gouvernement « qu'il organise les "assises de la profession infirmière" pour l'obtention de la consultation infirmière, du droit de prescription, d'une réelle formation universitaire et la création immédiate de l'Ordre infirmier ». Recevant les délégations de manifestants, le ministre Xavier Bertrand a notamment évoqué la réouverture des négociations avec les caisses d'assurance maladie pour l'augmentation de l'indemnité forfaitaire de déplacement et la baisse des charges sociales, ainsi que le maintien des libéraux dans les maisons de retraite. En conclusion de cette journée, Marcel Affergan, président de Convergence infirmière, estime que « la manifestation a fait mouche ».

Dénoncer... ou persister

De son côté, la Fédération nationale des infirmiers (FNI) s'est nettement démarquée de la manifestation organisée le 12 mai. En effet, l'autre syndicat représentatif des infirmiers libéraux « considère que l'objet de cette manifestation est bien réducteur au regard des problèmes que rencontrent les infirmières libérales ».

En collaboration avec le Sniil et l'Onsil, la FNI prépare actuellement les "États généraux de la profession", qui devraient trouver leur aboutissement le 23 juin à l'Institut océanographique de Paris, un institut normalement dédié à la diffusion de connaissances concernant le "monde du silence"... Un drôle de lieu pour donner la parole à la profession. Néanmoins, l'événement risque d'avoir un certain retentissement... Tsunami annoncé?

D'ores et déjà, la Fni demande à Convergence infirmière de « dénoncer la convention, rejetée par l'ensemble de la profession, dont elle est seule signataire ». Mais, pour Convergence infirmière, « la politique de la "chaise vide" serait trop lourde de conséquences pour les infirmières et les patients »... À l'avenir, c'est bien là le véritable enjeu : dénoncer la convention ou s'y tenir. Être (signataire) ou ne pas être, telle est la question. Et, sur ce sujet crucial, les deux camps risquent de s'affronter encore longtemps.

Une marée de mécontentements

« Le 23 juin, les "États généraux" risquent de déborder dans la rue, prévient Nadine Hesnart, présidente de la FNI. Dans les départements, la mayonnaise monte bien. Face au mépris qui leur est opposé, les infirmières libérales s'apprêtent à venir exprimer massivement leur mécontentement. Et elles ont bien l'intention de ne pas se contenter de promesses... jusqu'ici jamais tenues ! » Un mois plus tôt, une répétition générale a eu lieu au Touquet (Pas-de-Calais). Le 23 mai, à l'initiative de la FNI, les infirmières libérales sont venues demander des comptes à Léonce Deprez, le député-maire UMP de la ville, qui avait déposé en novembre 2003 une proposition de loi « visant à créer un statut libéral pour les aides-soignantes ».

Pour la profession, cette initiative parlementaire reste hautement symbolique. Car elle avait marqué le début d'une période de mise à mal des compétences infirmières, caractérisée par des tentatives de déréglementations tous azimuts, sous couvert d'amélioration des services à la personne. Cette fois, la profession se mobilise et se met résolument en mouvement. Aux vagues de mécontentement succèdent des marées de manifestants. Sur les pavés, fleurissent des banderolles colorées. L'été risque d'être chaud... et quelque peu houleux !

FNI : « Politique, j'écris ton nom... »

- C'est d'abord pour « redonner du sens à ses revendications syndicales » que la Fédération nationale des infirmiers (FNI)* a décidé d'écrire sa politique, noir sur blanc. Un écrit qui, selon elle, lui permettra de « se resituer sans ambiguïté auprès des professionnels dans le débat syndical » et aussi de mieux communiquer auprès des autres organisations professionnelles, des différentes instances et des pouvoirs publics.

- En premier lieu, la FNI rappelle ses valeurs (« au service de la profession infirmière [et] de la qualité des soins aux patients »), sa stratégie et ses projets. Ambitieuse, « la FNI est convaincue que l'exercice libéral individuel impose à l'ensemble des praticiens un principe d'excellence ». Pour atteindre cet objectif, les professionnels devraient bénéficier d'un réseau de soutien, qui leur permettrait « d'entretenir en permanence un exercice libéral individuel hautement qualifié », à la pointe des techniques, en complémentarité avec les autres professionnels de santé et en relation avec les représentants des usagers.

- « La FNI réfute et combat la conception "tâcheronne" de l'exercice infirmier » car celui-ci « ne se cantonne pas à une addition d'actes à exécuter ». Il nécessite au contraire « dans le respect des textes, une compétence et une autonomie pleine et entière ». C'est pourquoi « la FNI souhaite faire reconnaître la compétence infirmière dans toutes ses dimensions techniques, humaines et sociales ». La FNI « combattra avec énergie toute tentative d'appliquer à l'exercice infirmier libéral des référentiels de pratiques professionnelles non scientifiquement et professionnellement validés ».

- Tirant la leçon des récents déboires législatifs de la profession, la FNI entend désormais être plus réactive (veille juridique) et aussi plus pro-active (lobbying) : « La FNI n'entend pas "subir" et souhaite s'engager dans une politique volontariste pour le bénéfice de la profession infirmière en général et de l'exercice libéral en particulier. » Ce qui passe, selon elle, par la création d'une structure ordinale et une plus grande participation à la politique de santé publique du pays.

* Fédération nationale des infirmiers (FNI), 7, rue Godot de Mauroy, 75009 Paris. Tél. : 01 47 42 94 13. Site Internet : http://www.fni.fr